Question de M. ASSOULINE David (Paris - SOCR) publiée le 08/05/2019

Question posée en séance publique le 07/05/2019

M. David Assouline. Monsieur le Premier ministre, nous avons entendu vos explications et nous partageons la condamnation de ceux qui utilisent les manifestations pour casser et dévoyer les revendications légitimes de ceux qui s'expriment par ce biais. Toutefois, rien ne peut justifier qu'un ministre de l'intérieur, qui est là pour apaiser et permettre la concorde, jette de l'huile sur le feu en proférant un mensonge massif. (Exclamations ironiques sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)


M. Philippe Dallier. Tout en finesse…


M. David Assouline. Rien ne peut justifier qu'on utilise des techniques de nasse, dont des manifestants légitimes, travailleurs, femmes, enfants, ne peuvent s'échapper. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)


Mme Michèle Vullien. Scandaleux !


M. Fabien Gay. Il a raison !


M. Philippe Pemezec. C'est de la démagogie !


M. David Assouline. Monsieur le Premier ministre, je vous pose cette question : derrière la déclaration du député Jean-Michel Fauvergue, de votre majorité – « il faut oublier l'affaire Malik Oussekine » (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.) –, faut-il percevoir une doctrine qui ne s'embarrassera plus des libertés publiques et de l'État de droit pour faire face à la difficulté de garantir la liberté de manifester malgré la présence de casseurs ?

Je le dis solennellement ici : ma génération n'oubliera jamais Malik Oussekine (Mêmes mouvements sur les mêmes travées.) et la façon dont il a été tué, à quelques dizaines de mètres d'ici, en se réfugiant dans une cage d'escalier.

Cette nouvelle doctrine est-elle une annonce, signifiant que, maintenant, face à la difficulté du maintien de l'ordre, on ne s'embarrassera plus des libertés publiques et de l'État de droit ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 08/05/2019

Réponse apportée en séance publique le 07/05/2019

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur David Assouline, je crois qu'il est important d'avoir en tête les circonstances, que le Premier ministre a rappelées, dans lesquelles nous étions en cette veille du 1er mai : les tensions, les informations dont nous avions connaissance, selon lesquelles 1 000 à 2 000 personnes viendraient pour casser, la mémoire de certains samedis, du 1er mai 2017, que le Premier ministre a rappelée, et du vandalisme à l'encontre d'un McDonald's et d'un garage Renault, incendiés le 1er mai précédent. Or, nous le savions tous, certains venaient de nouveau à Paris pour reproduire ces exactions.

La veille de la manifestation, j'ai échangé avec le responsable de la CGT et celui de FO, et j'ai pris un engagement : faire en sorte que la manifestation puisse partir à l'heure prévue et arriver à son point de destination. C'est un exercice difficile, parce que, vous le savez, près de 18 000 personnes s'étaient mobilisées en avant du cortège officiel déclaré, et celui-ci ne pouvait pas partir.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Ce n'est pas la question !

M. Christophe Castaner, ministre. À quatorze heures, nous avons ouvert le chemin, et les 18 000 premières personnes n'ont pas bougé ; alors, nous avons mis en place une force intermédiaire entre la tête du cortège et le cortège de la CGT et des autres partenaires sociaux, pour les faire avancer.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Ce n'est pas la question !

M. Christophe Castaner, ministre. Nous avons ensuite connu, pendant le parcours, de nombreuses exactions, notamment à proximité de l'hôpital de la Salpêtrière. J'ai entendu le maire du XIIIe arrondissement, M. Jérôme Coumet, évoquer, en utilisant d'ailleurs le mot qui m'est reproché, ce qui s'est passé dans une école, les violences à l'entrée de l'hôpital et le CRS blessé, qui, au moment où il était emmené par ses collègues vers l'hôpital, a pu entendre crier : « Achevez-le ! »

Monsieur le sénateur, vous me faites un reproche, celui d'avoir choisi un mot, « attaque », à partir des témoignages qui venaient de m'être livrés par le personnel hospitalier. Au vu des éléments apparus le lendemain, j'ai corrigé ce mot, et je l'ai fait sans aucun état d'âme, parce que, tout simplement, compte tenu de ces éléments, il n'était plus adapté. C'est cela, monsieur le sénateur, la réalité ! N'y voyez pas une quelconque menace pour l'ordre public,…

M. le président. Il faut conclure !

M. Christophe Castaner, ministre. … auquel nous sommes tous, ici, particulièrement attachés, quelle que soit notre histoire, y compris notre histoire commune, et quelle que soit la réalité de notre engagement. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – Mme Laure Darcos et M. François Grosdidier applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour la réplique.

M. David Assouline. La réalité des propos qui viennent d'être tenus sera jugée à l'aune des suites qui seront données à l'ensemble des saisines de l'IGPN, qui tardent à venir.

M. François Grosdidier. Et les agresseurs de policiers ?

M. le président. Il faut conclure !

M. David Assouline. On attend les verdicts ; il y a des centaines de cas, et il n'y a pour l'instant aucun aboutissement. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

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