Question de M. FOUCHÉ Alain (Vienne - Les Indépendants) publiée le 02/05/2019

M. Alain Fouché attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les modalités de mise en œuvre de l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) en France et en Europe. Cette aide, qui vient soutenir les agriculteurs installés dans des territoires où les conditions de productions sont plus difficiles qu'ailleurs, du fait de contraintes naturelles ou spécifiques, est capitale pour beaucoup d'exploitations. La révision de la carte au niveau national a été réalisé sans concertation avec les territoires et les organisations professionnelles agricoles et parfois de façon arbitraire. Par ailleurs, dans les conditions d'attribution, il doit être tenu compte du lieu du siège social et du pourcentage de terres agricoles et d'élevage sur la zone, ce critère ne semble pas précis. Enfin, en Europe, cette indemnité ne paraît pas égalitaire et la législation qui l'entoure n'est pas la même dans tous les territoires. Financée à 75 % par le fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), dans le cadre de programmes régionaux, elle doit toutefois suivre un cadrage national précis pour lequel les collectivités n'ont pas de pouvoir de décision. Aussi, il lui demande de bien vouloir apporter des précisions sur les modalités d'attribution en France et un comparatif avec les autres pays européens.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 13/06/2019

Les zones défavorisées simples (ZDS) avaient été définies à la fin des années 1970 en se fondant sur des critères socio-économiques mais aussi, parfois, d'opportunité. Un rapport de la Cour des comptes européenne de 2003 pointait l'utilisation de critères non harmonisés conduisant à des situations très disparates au sein de l'Union européenne et à un classement contestable dans un certain nombre de cas. Une révision était donc nécessaire pour pérenniser les soutiens prévus aux agriculteurs de ces zones, en particulier l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) en assurant une homogénéité de traitement pour les agriculteurs européens. Le règlement européen relatif au développement rural a rendu cette révision obligatoire pour l'ensemble des États membres d'ici 2019. Des discussions ont été engagées dès 2016 avec les professionnels agricoles afin d'établir ce nouveau zonage. Un comité national ad hoc, associant les représentants des organisations professionnelles agricoles et les régions autorités de gestion du fonds européen agricole pour le développement rural, a été mis en place par le ministère chargé de l'agriculture. Il s'est réuni à onze reprises entre octobre 2016 et avril 2018. Les services déconcentrés ont également réuni les professionnels agricoles et les collectivités territoriales au niveau local à de multiples reprises, notamment depuis juin 2018 et la stabilisation du projet de carte. Enfin, le ministère chargé de l'agriculture et ses services ont reçu spécifiquement, à de multiples reprises et à leur demande, les organisations professionnelles et les élus des territoires concernés. Ce nouveau zonage a donc été largement concerté et élaboré dans la transparence. Le nouveau zonage se compose désormais de deux parties : une première partie, les « zones soumises à contraintes naturelles », qui découle de l'application stricte de critères européens biophysiques et climatiques, sur laquelle il n'y a pas de marge de discussion. La carte établie sur la base de ces critères a été soumise à l'approbation du Joint Research Center de la Commission européenne. Ces critères sont communs à l'ensemble des États membres de l'Union européenne et la Commission européenne a veillé à ce que leur application soit respectée partout ; une deuxième partie, les « zones soumises à contraintes spécifiques », sur laquelle la prise en compte de certaines spécificités est permise. Ces critères sont définis par chaque État membre mais sont limités par le respect d'un plafond réglementaire de 10 % du territoire pouvant être classé sous cette catégorie. Pour la France, le caractère extensif de l'élevage dans certains territoires, ou encore certaines particularités d'intérêt pour l'environnement ou le paysage (présence de haies ou parcellaire morcelé, présence de surfaces peu productives ou de zones humides, zones soumises à déprise agricole, ou encore insularité) ont été prises en compte. Ce sont notamment ces critères qui ont fait l'objet d'une concertation étroite avec l'ensemble des organisations professionnelles agricoles. Le projet de zonage stabilisé à l'issue de cette concertation a été adopté en l'état par la Commission européenne le 27 février 2019. Les textes réglementaires nationaux, c'est-à-dire le décret n° 2019-243 du 27 mars 2019 relatif à la révision des critères de délimitation des zones agricoles défavorisées autres que les zones de montagne, et l'arrêté du 27 mars 2019 portant délimitation des zones agricoles défavorisées, ont été publiés le 29 mars 2019 permettant ainsi l'entrée en vigueur du nouveau zonage au 31 mars 2019. L'accompagnement des agriculteurs sortant du zonage des ZDS prendra la forme d'un accompagnement individuel par l'octroi d'une aide dégressive en 2019 et 2020 correspondant, respectivement, à 80 % et 40 % du montant de l'ICHN de la programmation 2014-2020. La France mettra ainsi en œuvre les possibilités ouvertes par la réglementation européenne en accordant aux agriculteurs sortant du zonage les montants d'indemnité les plus élevés possibles. Par ailleurs, les jeunes agriculteurs déjà installés dans les communes sortantes conserveront le bénéfice de la majoration de la dotation jeune agriculteur qui leur a été attribuée, et ne subiront pas de remise en cause des aides attribuées si les revenus dégagés lors de la période d'installation ne correspondent pas au niveau prévu dans leur plan d'entreprise initial, du fait de la sortie de leur exploitation du zonage des ZDS. L'accompagnement des agriculteurs sortant du zonage doit également s'inscrire dans une perspective de plus long terme. Ainsi, des mesures à vocation plus structurante viendront, dès la campagne 2020, compléter l'aide dégressive mentionnée ci-dessus. Un travail approfondi est en cours dans les régions pour définir les mesures les plus adaptées pour chaque territoire, en s'appuyant sur les audits d'exploitation qui sont en cours, et sur les conclusions des travaux du conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux sur les zones intermédiaires. D'ores et déjà, des projets collectifs émanant de territoires sortant du zonage des ZDS ont été soutenus dans le cadre de l'appel à manifestation d'intérêt « structuration des filières agricoles et agroalimentaires », organisé dans le cadre du volet agricole du grand plan d'investissement et géré par FranceAgriMer. Une nouvelle phase de cet appel à projets sera ouverte en 2019 afin d'amplifier le financement dédié à la structuration des filières.

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