Question de M. GAY Fabien (Seine-Saint-Denis - CRCE) publiée le 09/05/2019

M. Fabien Gay attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur la lutte contre le phénomène des « mules » et le transport de cocaïne transitant par l'aéroport Félix Éboué de Cayenne.

Véritable fléau, les « mules » transportant de la drogue et transitant par la Guyane sont estimées entre quinze et vingt par vol. Un plan anti-mules a été annoncé par le Gouvernement, qui représente un pas en direction de la lutte contre ce phénomène, avec l'augmentation des militaires à la frontière avec le Suriname et l'augmentation du nombre de lits dans les hôpitaux.

Cependant, d'autres mesures pourraient y être ajoutées afin d'améliorer l'efficacité de la lutte contre ce phénomène dévastateur. Ainsi, le collectif « trop violans » mène une action pour faire installer un scanner à l'aéroport Felix Éboué, afin de lutter plus efficacement contre le phénomène des « mules ».

Les pays voisins, comme le Suriname, ont en effet recours au scanner au sein des aéroports, ce qui n'est pas le cas en France. Le lieu de passage est donc de ce fait devenu l'aéroport de Cayenne, qui n'en dispose pas. Si un dispositif d'échographie avait été annoncé, un tel système n'est pas aussi efficace qu'un scanner, et dans les deux cas, la présence de personnel qualifié pour manipuler le système est nécessaire.

L'Union européenne autorise les scanners, sous certaines conditions cadrées et définies en 2011. Un scanner constituerait principalement un outil de dissuasion, à la fois pour les trafiquants et pour ceux qui transportent la drogue. Cela permettrait de mettre en œuvre un dispositif véritablement préventif, et appuierait le travail conséquent des associations engagées en ce sens.

Il souhaite donc savoir comment le Gouvernement compte mettre en œuvre une lutte encore plus efficace contre les mules et s'il envisage la mise en place d'un scanner à l'aéroport Félix Éboué de Cayenne.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 22/08/2019

Le département de la Guyane connaît depuis plusieurs années une augmentation constante des interpellations de passeurs et des saisies de produits stupéfiants, principalement de cocaïne. Pour répondre à cette problématique globale, un protocole interministériel d'action renforcée a été signé au ministère de la Justice le mercredi 27 mars 2019 par la Garde des Sceaux, la ministre des outre-mer, le secrétaire d'État auprès du ministre de l'Intérieur, la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé et le directeur général des Douanes et droits indirects. D'une durée d'application de trois mois renouvelables, ce plan d'action prévoit, en Guyane, un renforcement des effectifs de la brigade de recherche de Saint-Laurent-du-Maroni, un doublement des capacités d'accueil de l'hôpital de Cayenne pour prendre en charge les passeurs transportant de la cocaïne in corpore ainsi qu'un renforcement des contrôles douaniers et une amélioration du ciblage des passeurs à l'aéroport de Cayenne. En métropole, ce plan d'action se concrétise par une priorisation de l'action des agents des douanes présents à Orly sur les contrôles de vols en provenance de Cayenne. Par ailleurs, une antenne de l'OCRTIS sera installée à l'aéroport d'Orly en septembre 2019, permettant de faciliter le travail de la police judiciaire. Cet accroissement des contrôles douaniers depuis la frontière avec le Surinam jusqu'à l'arrivée en métropole est suivi d'une réponse pénale ferme par les parquets de Cayenne et de Créteil. Un premier bilan très positif a été dressé par les services répressifs de l'État : le plan a permis la saisie de près de 600 kg de cocaïne et 230 000 euros ainsi que l'interpellation de près de 270 personnes. Par ailleurs, des évolutions issues de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice sont de nature à renforcer l'efficacité de l'action des autorités répressives en cette matière. Ainsi, les agents des douanes pourront dorénavant, sur instructions du procureur de la République, directement délivrer aux passeurs de drogue une convocation à comparaître devant le tribunal correctionnel pour y être jugés. Par ailleurs, la procédure de comparution différée offrira aux procureurs de la République la possibilité de poursuivre les passeurs de drogue devant le tribunal correctionnel et de requérir contre eux toute mesure de sûreté, dans l'attente du retour du rapport d'analyse des produits stupéfiants ou de l'expulsion complète des ovules de cocaïne ingérés. S'agissant plus spécifiquement des moyens techniques de détection des passeurs, un scanner à ondes radio-millimétriques permettrait de détecter la présence de stupéfiants à corps. Toutefois, cette technologie ne permettrait pas de détecter les produits stupéfiants ingérés ou introduits dans le corps humain, cette détection ne pouvant être assurée qu'à l'aide d'un scanner médical à rayon X ou un échographe, dont l'usage nécessite l'intervention d'un personnel médical. La capacité de détection d'un scanner à ondes radio-millimétriques est donc à relativiser. Par ailleurs, la problématique des passeurs de drogue réside moins dans leur détection que que dans leur appréhension par les agents des douanes et les forces de l'ordre, au regard de leur nombre croissant ces dernières années. Pour ces raisons et au regard du coût d'un tel scanner, le Gouvernement ne privilégie pas, en l'état, l'acquisition d'un tel matériel. Le bilan de la mise en œuvre du plan d'action renforcée, permettra de mesurer si l'absence de ce matériel pénalise l'action des agents des douanes et des forces de l'ordre. Enfin, si la dissuasion que peut constituer l'installation d'un tel matériel ne doit pas être négligée, les services opérationnels assurant les contrôles à l'aéroport de Cayenne ont d'ores et déjà mis en place des actions de communication et de dissuasion, complémentaires des actions de contrôle, permettant ainsi d'intensifier l'action de l'État face au phénomène grandissant du trafic de stupéfiants par voie aérienne dans le cadre d'une approche globale.

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