Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - RDSE) publiée le 30/05/2019

M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur l'objectif de résorption des bidonvilles.
Depuis une vingtaine d'années, des zones de baraques précaires et insalubres se sont reconstituées en France métropolitaine, principalement dans les grandes agglomérations. Implantés illégalement, ces bidonvilles regroupent en majorité des migrants intra-européens pauvres, qui y survivent dans des conditions indignes à la fois pour leur santé et pour leur sécurité.
Selon l'« État des lieux des bidonvilles en France métropolitaine au 1er juillet 2018 », établi par la délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (DIHAL), environ 16 090 personnes sont recensées sur 497 sites, dont un quart de mineurs. Ces chiffres sont en augmentation par rapport au précédent recensement de décembre 2017, qui faisait état de 14 825 personnes (+ 8,5 %). 41 départements sont concernés, les principaux étant la Seine-Saint-Denis (1 960 personnes, 12 %), la Loire-Atlantique (1 894 personnes, 12 %) et les Bouches-du-Rhône (1 309 personnes, 8 %).
Face à ces situations humainement intolérables, l'instruction du Gouvernement du 25 janvier 2018 prévoit la résorption des bidonvilles et la mise en place de solutions favorisant l'insertion. C'est pourquoi il lui demande quel premier bilan peut en être tiré.

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Réponse du Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales publiée le 17/10/2019

Le Gouvernement a donné une nouvelle impulsion à la politique de résorption des bidonvilles, à travers une instruction du 25 janvier 2018 adressée aux préfets. Ce nouveau cadre d'action de l'État affirme les principes d'humanité et de respect des lois de la République, mais aussi une exigence d'efficacité, en fixant un objectif de résorption durable des bidonvilles. Cet objectif ambitieux marque une volonté forte engageant une action globale et transversale en faveur des populations concernées, comme en témoigne la signature de l'instruction par huit ministres. La résorption des bidonvilles est une politique qui s'inscrit dans la lutte contre la grande précarité, et implique de ce fait d'agir sur les causes structurelles du phénomène des bidonvilles. Les actions visant à atteindre cet objectif passent par la définition et la mise en œuvre de stratégies partenariales territoriales de résorption des bidonvilles impliquant les services de l'État, les collectivités locales et les acteurs de la société civile. Au premier rang, les préfets sont chargés d'engager une action de résorption des campements illicites « le plus tôt possible, si possible dès l'implantation et indépendamment de l'existence ou non de procédures juridiques engagées en vue de son évacuation ». Ces stratégies territoriales interviennent sur plusieurs volets : la sécurisation des conditions de vie sur le bidonville, l'encadrement de l'organisation du site et surtout, la mise en place de solutions de sortie des occupants vers le droit commun. Les solutions de sortie doivent allier à la fois programmes d'insertion en France dans un cadre contractuel, respect des lois de la République et coopération transnationale avec les pays d'origine des populations. Ces actions s'inscrivent dans la durée, jusqu'à la disparition complète du bidonville et en évitant toute réinstallation ou pérennisation. Un an et demi après la signature de l'instruction, il est d'ores et déjà possible de constater que les résultats obtenus sont encourageants. En effet, l'année 2018 a été une étape importante dans l'accompagnement des populations des bidonvilles. Les données recueillies confirment que la résorption, sans réinstallation, de bidonvilles, campements et squats est possible, et que la plupart des actions d'accompagnement vers l'insertion se révèlent efficaces dans la durée. Ainsi, dans le cadre des actions menées en 2018 : 3 845 personnes ont bénéficié d'un accompagnement sanitaire, soit + 120 % par rapport à 2017 ; 2 055 personnes ont bénéficié d'un accompagnement vers l'emploi, soit + 64 % par rapport à 2017. Cet accompagnement a permis à 974 personnes (soit plus de la moitié des personnes accompagnées) d'accéder à un emploi en 2018 ; 461 ménages, soit 1 840 personnes, ont accédé à un logement, dont 345 avec accompagnement (intermédiation locative, résidence sociale ou pension de familles) et 116 de manière autonome au sein du parc privé ou social. Parmi les enfants vivant sur les bidonvilles concernés par les actions, 1 694 enfants sont désormais scolarisés (soit 80 % des enfants soumis à l'obligation scolaire), notamment grâce à la mise en œuvre de dispositifs spécifiques, tel que des programmes de médiation parentale et scolaire. De plus en plus de territoires s'engagent dans des actions structurées et partenariales pour une résorption durable, soit en amont d'une évacuation (en conditionnant la réalisation de celle-ci à la mise place de solutions de sorties) soit en travaillant à la mise en place d'une stratégie globale sur la résorption des bidonvilles, les deux étant souvent liés. En plus des territoires traditionnellement engagés comme Strasbourg ou Toulouse, de nouveaux avancent dans ce sens : l'Indre-et-Loire, la Haute-Savoie, le Maine-et-Loire, la Vienne. D'autres poursuivent leurs efforts vers la mise en place d'une stratégie globale, tout en se heurtant à des difficultés (réticences des collectivités territoriales, tension sur le logement) : le Nord, l'Hérault, la Gironde, la Loire-Atlantique, l'Isère. En outre dans ces territoires, la recherche de solutions de sorties passe de plus en plus par la mobilisation de logement dans le diffus. Le soutien aux actions de résorption des bidonvilles se poursuit en 2019, avec une enveloppe renforcée dans le cadre de la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté à hauteur d'un million, soit 4 millions d'euros au total pour soutenir l'élaboration de stratégies territoriales. Ces crédits jouent un véritable rôle d'effet levier, permettant la mobilisation de co-financements, parmi lesquels se trouvent des financements des collectivités locales ou de l'Union européenne. En complément, la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté prévoit la création d'un dispositif dit de « maraudes mixtes » avec un financement à hauteur de 2 millions d'euros par an. Ces maraudes ambitionnent de sortir les enfants de la rue, des squats et des bidonvilles par un accompagnement des familles.

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