Question de Mme DARCOS Laure (Essonne - Les Républicains) publiée le 18/07/2019

Mme Laure Darcos appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les conditions de plus en plus difficiles dans lesquelles les sapeurs-pompiers exercent leurs missions. Ces derniers sont devenus les acteurs majeurs du secours aux personnes dans les territoires, qu'il s'agisse de répondre à l'urgence ou de porter assistance. En Essonne, la part du secours aux personnes a représenté 79 000 interventions en 2018, soit 80 % de l'activité des sapeurs-pompiers. Les données portant sur les six premiers mois de l'année 2019 confirment cette tendance qui est la conséquence de plusieurs facteurs : la désertification médicale de plus en plus marquée en grande couronne parisienne ayant pour conséquence un nombre élevé d'interventions, environ 9 000, pour des soins ne relevant pas de l'urgence ; le vieillissement de la population et le développement des politiques de maintien à domicile comme de soins hospitaliers à caractère ambulatoire ; la multiplication des interventions de nature sociale et le défaut récurrent de disponibilité des transporteurs sanitaires privés. L'activité des sapeurs-pompiers de l'Essonne est particulièrement impactée par la situation très tendue du service d'aide médicale urgente de l'Essonne (service d'aide médicale urgente - SAMU 91), qui ne dispose pas des ressources adéquates, notamment des assistants de régulation médicale, au centre de réception et de régulation des appels (CRRA ou « centre 15 »). Dans le contexte où les services départementaux d'incendie et de secours doivent, chaque année, absorber 100 000 à 120 000 interventions nouvelles au prix d'une mise sous tension croissante des hommes, des matériels et de leur budget, elle lui demande de bien vouloir lui préciser les mesures qu'il entend prendre afin de rendre plus simple, plus rapide et plus efficace la réponse opérationnelle en matière de secours aux personnes. Elle lui demande s'il envisage, par exemple, comme le demande la fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, la généralisation de centres départementaux d'appels d'urgence communs à tous les acteurs, pompiers, police, gendarmerie et structure mobile d'urgence et de réanimation (SMUR), avec pour numéro d'appel unique le 112, gage d'une meilleure coordination entre les différents intervenants et, partant, d'une réponse systématique et rapide aux victimes. Par ailleurs, la mobilisation exponentielle des sapeurs-pompiers pour des missions ne relevant pas de l'urgence met en tension les budgets des services départementaux d'incendie et de secours. Elle lui demande comment, dans ces conditions, accompagner l'effort financier croissant des collectivités territoriales et leur permettre de faire face à ce qui est de plus en plus perçu par les élus comme un transfert de charges du secteur de la santé. Enfin, les sapeurs-pompiers s'inquiètent de la perte de sens de leur engagement et de la détérioration de leurs conditions de travail. Elle lui demande quelles mesures concrètes il est en mesure de proposer afin de remettre le secours aux personnes au cœur de leur engagement, quel que soit leur statut, professionnel ou volontaire.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 16/10/2019

Réponse apportée en séance publique le 15/10/2019

Mme Laure Darcos. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur. Depuis plusieurs mois, les sapeurs-pompiers demandent une amélioration significative de leurs conditions de travail. Ce sujet est évoqué de façon récurrente par nombre de mes collègues ici.

Devenus les acteurs majeurs du secours aux personnes, les sapeurs-pompiers paient les conséquences de la désertification médicale, du vieillissement de la population, des dysfonctionnements de la régulation médicale ou encore des carences ambulancières.

Chaque année, les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) doivent absorber entre 100 000 et 120 000 interventions nouvelles, au prix d'une mise sous tension croissante des hommes, des matériels et des budgets.

Dans mon département, l'Essonne, l'activité des sapeurs-pompiers est très impactée par la situation particulièrement tendue du SAMU 91, qui ne dispose pas des ressources humaines adéquates, notamment d'assistants de régulation médicale, au centre de réception et de régulation des appels.

Nos sapeurs-pompiers sont en outre les victimes expiatoires d'une société désinhibée, où la violence frappe tous ceux qui sont détenteurs d'autorité ou porteurs d'un uniforme. J'en veux pour preuve les 57 plaintes déposées par les pompiers depuis le début de l'année dans mon département, dont 4 pour des agressions graves le même week-end le mois dernier. Cette situation ne peut plus durer et nous impose d'agir. Elle vous impose d'agir, monsieur le ministre !

Quelles mesures entendez-vous prendre afin de rendre plus simple, plus rapide et plus efficace la réponse opérationnelle en matière de secours aux personnes ?

Les sapeurs-pompiers demandent la généralisation de centres départementaux d'appels d'urgence communs à tous les acteurs – pompiers, police, gendarmerie et SMUR –, avec pour numéro d'appel unique le 112. Accéderez-vous à cette demande ?

Par ailleurs, la mobilisation croissante des sapeurs-pompiers pour des missions ne relevant pas de l'urgence vitale met en tension les budgets des SDIS. L'État accompagnera-t-il l'effort financier déjà très important des collectivités territoriales ?

Enfin, la violence qui frappe les sapeurs-pompiers, confrontés aux difficultés des cités et à la misère sociale, doit être combattue avec la plus grande énergie. Quelles mesures concrètes proposez-vous pour répondre à ce défi ?

Il est urgent de remettre le secours aux personnes au cœur de l'engagement des sapeurs-pompiers, quel que soit leur statut, professionnel ou volontaire.

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Madame la sénatrice Laure Darcos, le secours aux personnes représente plus de 80 % des interventions des services d'incendie et de secours à l'échelon national, soit une augmentation de près de 50 % en dix ans. C'est considérable. Je tenais à rappeler cette statistique pour souligner l'acuité du problème.

Face à cette pression opérationnelle, les travaux conduits par le ministère de l'intérieur et celui des solidarités et de la santé ont abouti à six mesures, en cours de réalisation, parmi lesquelles je citerai : la généralisation des coordonnateurs ambulanciers au sein des SAMU-Centre 15 pour diminuer la sollicitation des sapeurs-pompiers pour des missions réalisables par des ambulanciers privés ; la réduction des délais d'attente des sapeurs-pompiers aux services d'urgence afin de limiter les temps d'immobilisation des véhicules de secours et de leurs équipages ; la possibilité pour les SDIS d'effectuer des interventions à deux sapeurs-pompiers, pour certaines missions ; une concertation accrue entre les SDIS, les SAMU et les agences régionales de santé, les ARS.

Une nouvelle vague de mesures sera engagée au second semestre 2019, parmi lesquelles figurent : la réorganisation de la garde ambulancière, afin que plus d'ambulanciers privés soient mobilisables en journée ; la mobilisation d'acteurs, en relais des sapeurs-pompiers, pour dissocier, territoire par territoire, et en fonction des besoins, ce qui relève de l'urgence et ce qui ne nécessite pas l'intervention immédiate des pompiers.

Ce travail complète d'autres initiatives, notamment le projet NexSIS, qui dotera les SDIS d'un outil commun pour mieux gérer les appels et les opérations. Interopérable avec celui du SAMU, de la police nationale et de la gendarmerie nationale, il prépare l'instauration du 112, le numéro unique d'appel d'urgence en France, conformément au souhait du Président de la République.

Soyez assurée, madame la sénatrice, de la détermination du Gouvernement à voir aboutir l'ensemble de ces mesures. Nous sommes tous, dans nos territoires, confrontés au type de situation que vous évoquez. Nous avons sur ce sujet, je le pense, une unité de vue, d'action et d'engagement. Il s'agit de faire en sorte que nos sapeurs-pompiers, quel que soit leur statut, puissent accomplir leur mission dans les meilleures conditions.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laure Darcos, pour la réplique.

Mme Laure Darcos. Sur le terrain, monsieur le secrétaire d'État, la réponse s'organise. En Essonne, un protocole de coordination entre le SDIS, la gendarmerie et la police nationale vient d'être signé par le préfet afin de protéger nos sapeurs-pompiers dans le cadre particulier des interventions en zones sensibles.

À l'État, il appartient de prendre toutes ses responsabilités pour rétablir la confiance avec les soldats du feu. Ils demandent de la considération et un engagement fort des pouvoirs publics dans plusieurs domaines : le secours aux personnes, le volontariat et la sécurité en intervention.

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