Question de M. CHAIZE Patrick (Ain - Les Républicains) publiée le 25/07/2019

M. Patrick Chaize appelle l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur la remise en question envisagée de deux dispositions fiscales dont bénéficient les entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP).
La suppression du taux réduit de taxe intérieure de consommation (TICPE) sur les produits énergétiques pour le « gazole non routier » (GNR), initialement prévue dans le projet de loi de finances pour 2019, a été abandonnée dans le contexte général de protestations contre la hausse des taxes sur les carburants.
Cependant, à la suite des annonces qui sont intervenues, les artisans du BTP redoutent les conséquences d'une éventuelle mise en application de cette mesure. En effet, en pesant fortement sur leur secteur d'activité, elle représenterait des centaines de millions d'euros.
L'impact de cette suppression se ferait ressentir à court terme comme à long terme pour ces entreprises, qui verraient leurs trésoreries mises à mal sans étalement de la mesure.
Enfin, la suppression brutale du GNR serait d'autant plus inadmissible qu'il n'existe, à ce jour, aucune alternative technique permettant d'éviter une consommation de gazole.
Cette crainte quant à la suppression de cet avantage fiscal s'inscrit dans le contexte de l'annonce, le 12 juin 2019, de l'abrogation en 2020 de la déduction forfaitaire spécifique sur les frais professionnels (DFS).
Ce dispositif d'abattement de l'assiette des cotisations sociales tient compte des frais professionnels et est applicable pour certaines professions dont l'exercice entraîne des frais importants. C'est notamment le cas pour les salariés de chantier dans le BTP que les employeurs indemnisent pour leurs repas et leurs déplacements.
L'abrogation de la DFS aurait de lourdes conséquences pour les entreprises de ce secteur. Elle entraînerait en effet, par répercussion, une augmentation des charges patronales de plusieurs centaines de millions d'euros.
Ainsi, l'impact économique et social serait fort pour les entreprises comme pour les ouvriers du bâtiment, qui verraient leur pouvoir d'achat diminuer.
En outre, cette abrogation pénaliserait les territoires ruraux, où les frais liés aux déplacements sont de facto plus importants.
Dans un tel contexte, il lui demande de préciser les intentions du Gouvernement relativement aux mesures envisagées de suppression et d'abrogation de ces dispositions fiscales qui garantissent l'équilibre des entreprises du secteur du BTP dont l'activité constitue une part importante de l'économie française.

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Transmise au Ministère de l'économie et des finances


Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 30/01/2020

Le tarif réduit de la taxe intérieure sur les produits énergétiques (TICPE) appliqué au gazole sous conditions d'emploi, ou gazole non routier (GNR), ne se justifie pas sur les plans économique et environnemental et sa suppression progressive contribuera à orienter le choix des acteurs vers des usages ou des technologies plus vertueuses. Sa suppression doit également contribuer au financement des mesures prises en réponse à la crise des « gilets jaunes », notamment la baisse de l'impôt sur le revenu des classes moyennes. La suppression du tarif réduit sera mise en œuvre de façon progressive à compter du 1er juillet 2020, permettant aux acteurs concernés de disposer d'un délai d'une année complète à compter de l'annonce de la mesure pour s'adapter. Par ailleurs, un important travail de concertation avec l'ensemble des secteurs économiques concernés a permis d'identifier les mesures d'accompagnement à retenir. Dans le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP), le Gouvernement propose de porter de 5 % à 10 %, par décret au Conseil d'État, le taux minimal de l'avance versée par les collectivités locales dans le cadre des marchés publics. Parallèlement, les collectivités locales bénéficieront de l'extension de l'éligibilité au fonds de compensation de la TVA sur des travaux portant sur les réseaux. Par ailleurs, afin de ne pas affecter l'économie générale des contrats en cours, une majoration de plein droit de ces derniers est prévue lorsque la part du GNR dans les coûts d'exploitation excède 2 %. Dans les secteurs ferroviaire et agricole, les tarifs réduits de TICPE demeureront quant à eux inchangés. Le secteur agricole bénéficiera en outre, à partir de 2022, d'un gain de trésorerie résultant de l'application directe du tarif très réduit auquel il est éligible au moment de l'acquisition du produit, et non après dépôt d'une demande de remboursement. Dans les secteurs des industries extractives à forte valeur ajoutée et des activités de manutention portuaire dans l'enceinte des ports maritimes, compte tenu de leur forte exposition à la concurrence internationale, la hausse de tarif a été neutralisée par l'application de tarifs réduits pour le gazole utilisé pour les travaux statiques et de terrassement. Les activités de manutention portuaire bénéficieront, en outre, d'un tarif réduit de la taxe sur la consommation finale d'électricité. Par ailleurs, l'acquisition d'engins non routiers fonctionnant avec un carburant alternatif au GNR sera favorisée par le biais d'un dispositif de suramortissement de ces engins : les entreprises, notamment de travaux publics, d'exploitation de remontées mécaniques et de domaines skiables, pourront déduire de leur résultat imposable 40 % du prix de revient de ces investissements. Dans le secteur du transport frigorifique, un mécanisme spécifique d'indexation des prix en fonction de l'évolution du coût du carburant routier est prévu. Enfin, le contrôle de l'interdiction d'utiliser du gazole au tarif de TICPE applicable aux travaux agricoles à d'autres types de travaux, notamment des travaux publics, sera renforcé. En particulier, la faculté d'incorporer des colorants et des traceurs est prévue afin de prévenir ou de lutter contre les vols de carburant et les contrôles sur sites seront renforcés grâce au concours de la police et de la gendarmerie nationales. Par ailleurs, l'obligation, pour l'ensemble des donneurs d'ordre et des bénéficiaires du remboursement agricole, de tenir un registre des travaux relevant du secteur du BTP permettra une instruction plus efficace des dossiers de demande de remboursement de TICPE. La large concertation dont a fait l'objet cette mesure a ainsi permis d'apporter un ensemble de solutions concrètes aux difficultés rencontrées par les secteurs les plus affectés.

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