Question de Mme JOURDA Gisèle (Aude - SOCR) publiée le 19/09/2019

Mme Gisèle Jourda interroge M. le ministre de l'action et des comptes publics quant à l'assujettissement des agences de gestion et de développement informatique (AGEDI) à l'impôt sur les sociétés et sur la nature de leurs activités.

En réponse à deux questions de sénateurs (questions écrites n° 09852 publiée le 04 avril 2019, et n° 10389 publiée le 16 mai 2019), le ministère de l'action et des comptes publics a récemment réaffirmé que l'assujettissement des AGEDI à l'impôt sur les sociétés (IS) était décidé en fonction de la nature des activités du syndicat.

En vertu les dispositions du 6° du 1 de l'article 207 du code général des impôts (CGI), les syndicats mixtes constitués exclusivement de collectivités territoriales ou de groupement de collectivités sont exonérés de l'impôt sur les sociétés – à condition de pratiquer une activité non-lucrative.

C'est bien le cas de l'AGEDI qui, si l'on se réfère à la règle dite des « 4 P » (publicité, prix, place, produits), exerce une activité non-lucrative, hors du marché concurrentiel de l'édition de logiciels informatiques.
Sans aucun démarchage commercial (publicité), le syndicat AGEDI équipe en logiciels et en applications un public constitué strictement de collectivités et de groupement de collectivités en échange d'une cotisation régulière et proportionnelle à la taille et aux besoins de ces dernières (prix). En raison de leur coût et du public auxquels ils sont destinés, les logiciels de l'AGEDI ne sont de facto pas situés sur le même marché que les produits des grands éditeurs privés de logiciels de gestion locale (place et produit).

La jurisprudence du Conseil d'État (CE, 7 mars 2012 n° 331970, Commune de Saint-Cyprien) élargit l'exonération prévue par le code général des impôts. Il estime en effet qu'une régie, dotée ou non de la personnalité morale, qui gère un service qui, par son objet, relève d'une exploitation à but lucratif, bénéficie de l'exonération d'impôt sur les sociétés prévue par les dispositions du 6° du 1 de l'article 207 du code général des impôts lorsque le service qu'elle exploite est indispensable à la satisfaction de besoins collectifs intéressant l'ensemble des habitants de la collectivité territoriale. Ce n'est donc plus le caractère lucratif ou non de l'activité qui doit primer mais celui de la pleine satisfaction de l'intérêt général.

La dématérialisation et la numérisation des service publics sont indispensables à la satisfaction des besoins collectifs des administrés, en termes de services administratif mais aussi de démocratie locale (site internet des municipalités). L'AGEDI fournit aux communes, même les plus modeste, des services dématérialisés de qualité.

L'ensemble de ces éléments justifient que l'AGEDI continue à bénéficier de l'exonération d'impôt sur les sociétés.

Elle lui demande par conséquent, ayant pleinement conscience et connaissance du secret fiscal, de prendre ces éléments en compte afin de sauvegarder l'AGEDI. En effet, si l'administration fiscale persiste à exiger de l'AGEDI qu'elle s'acquitte de l'impôt sur les sociétés à titre rétroactif, cela aura pour conséquence la disparition à court terme du syndicat. Dès lors, les collectivités locales devront faire face à des difficultés très importantes : il faut prendre en compte la hausse drastique des coûts informatiques, le coûts de transition vers de nouveaux logiciels mais aussi la perte d'un interlocuteur de référence dans le domaine informatique.

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Réponse du Ministère de l'action et des comptes publics publiée le 26/12/2019

Pour des raisons tenant au secret professionnel prévu à l'article L. 103 du livre des procédures fiscales (LPF), il n'est pas possible de communiquer des informations relatives à la situation de l'agence de gestion et de développement informatique (AGEDI). Les précisions suivantes peuvent néanmoins être apportées s'agissant des règles d'assujettissement aux impôts commerciaux des collectivités et établissements publics. Conformément aux dispositions combinées du 1 de l'article 206 et de l'article 1654 du code général des impôts (CGI) ainsi que de l'article 165 de l'annexe IV au CGI, sont passibles de l'impôt sur les sociétés (IS) les établissements publics ainsi que les organismes de l'État et des collectivités territoriales jouissant de l'autonomie financière réalisant des opérations à caractère lucratif. S'agissant de la nature des activités exercées par les organismes de droit public, les critères de lucrativité dégagés par la jurisprudence du Conseil d'État sont repris par la doctrine administrative (Bulletin Officiel des Finances Publiques (BOFiP) - Impôts, BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20). Ainsi, sous réserve de la condition tenant au caractère désintéressé de la gestion de ces organismes, qui est présumée remplie pour les organismes de droit public, le caractère lucratif d'une activité s'apprécie en analysant le produit proposé, le public visé, les prix pratiqués ainsi que la publicité réalisée (méthode dite des « 4 P »). Par conséquent, un organisme de droit public doit être soumis à l'IS s'il exerce une activité concurrentielle dans des conditions similaires à celles d'une entreprise commerciale (CE, 30 juin 2016 n° 382975, centre départemental de Méjannes-le-Clap ; CE, 28 janvier 2015 n° 371501, syndicat mixte de l'aéroport de Saint-Brieuc Armor ; CE, 20 juin 2012 n° 341410, Commune de la Ciotat). Toutefois, lorsqu'ils se livrent à une exploitation lucrative, les régions et les ententes interrégionales, les départements et les ententes interdépartementales, les communes, les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, les syndicats de communes et les syndicats mixtes constitués exclusivement de collectivités territoriales ou de groupements de ces collectivités, ainsi que leurs régies de services publics, bénéficient d'une exemption formelle d'IS, en application du 6° du 1 de l'article 207 du CGI. Conformément à la jurisprudence du Conseil d'État (CE, 16 janvier 1956 n° s 13019, 15018 et 15019 ; CE, 7 mars 2012 n° 331970, Commune de Saint-Cyprien), cette exonération ne s'applique qu'au titre de l'exécution d'un service public indispensable à la satisfaction des besoins collectifs de la population. Ainsi, demeurent imposables les structures qui exploitent des services à caractère industriel et commercial non indispensables à la satisfaction des besoins collectifs des habitants au sens de la jurisprudence du Conseil d'État. La direction générale des finances publiques (DGFIP) veille, dans le strict respect des procédures prévues par le LPF, à la correcte application de ces règles, sous le contrôle du juge de l'impôt.

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