Question de M. BONNE Bernard (Loire - Les Républicains) publiée le 19/09/2019

M. Bernard Bonne attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le non respect par les accords Mercosur des critères essentiels qui fondent notre politique agricole, notamment le respect de nos normes environnementales et sanitaires ainsi que la protection de nos filières sensibles dans le cadre de quotas.
Cet accord remet en effet en cause notre agriculture, mais aussi notre alimentation, la santé des consommateurs et nos engagements climatiques.
Le modèle agricole des pays du Mercosur en totale opposition avec celui des pays européens, risque d'impacter très fortement les productions nationales bovines, sucrières, de volailles, de porc notamment.
Alors que ces filières doivent respecter un nombre toujours plus important de contraintes et de normes, alors que notre agriculture améliore sans cesse la qualité et le suivi de sa production et alors que la société française tend vers une consommation de proximité, il dénonce les incohérences manifestes entre la politique commerciale conduite avec cet accord et nos politiques agricoles, sanitaires et environnementales.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 21/11/2019

L'accord sur le Mercosur annoncé le vendredi 28 juin 2019 est un accord de principe. Les négociateurs doivent dorénavant poursuivre les échanges pour finaliser les détails techniques des textes de l'accord, ce qui prendra plusieurs mois. Les textes devront ensuite faire l'objet d'un nettoyage juridique avant d'être présentés au Conseil. Une fois cette phase conclue, le Conseil sera invité à adopter à l'unanimité -s'agissant d'un accord d'association- la décision de signature de l'accord, avant sa transmission au Parlement européen pour approbation. S'en suivra la procédure de ratification par les parlements nationaux s'agissant d'un accord mixte (les matières traitées dans l'accord relevant à la fois de compétences exclusives et partagées). Le texte de l'accord, accompagné de sa décision de conclusion, reviendra ensuite devant le Conseil de l'Union européenne (UE), qui statuera de nouveau à l'unanimité. La France est favorable aux accords de libre-échange et au commerce, pour autant que les accords signés soient équilibrés et respectent les filières sensibles. Le Gouvernement fait ainsi valoir auprès de la Commission européenne que les concessions tarifaires sur les produits sensibles doivent s'inscrire dans les limites d'une « enveloppe globale », permettant de définir ce qui est soutenable pour les filières au regard du marché, à l'échelle de l'ensemble des négociations en cours ou à venir. Le Gouvernement est attaché à obtenir de solides garanties sur les conditionnalités environnementales ainsi que sur le respect des normes sanitaires européennes sur les produits eux-mêmes afin de garantir un haut niveau de sécurité sanitaire pour le consommateur non négociable, mais aussi sur leur processus de fabrication. Pour répondre aux interrogations légitimes des agriculteurs et de la société civile, le Gouvernement a mis en place le 29 juillet 2019 une commission d'évaluation indépendante, chargée de mesurer les impacts de l'accord conclu entre l'UE et le Mercosur en matière économique, sociale, sanitaire et environnementale. Les travaux de cette commission permettront de mettre en lumière les différences de modes de production entre la France et les pays du Mercosur et d'en tirer les recommandations nécessaires. Concernant le volet sanitaire, cet accord, comme tous les accords de commerce de l'UE, ne remet pas en cause le principe selon lequel tout produit qui entre dans l'UE doit être conforme à ses normes et standards. À ce titre, le bœuf traité aux hormones, ou les produits génétiquement modifiés non autorisés ne pourront accéder au marché européen. Par ailleurs, le nouveau règlement sur les médicaments vétérinaires de l'UE (règlement (UE) n° 2019/6), qui entrera en application en janvier partir 2022, prévoit l'interdiction des importations de viandes issues d'animaux ayant reçu des antibiotiques comme activateurs de croissance ou des antibiotiques critiques. Cette règle s'appliquera également au Mercosur. L'accord ne modifie en rien ce qui est décidé par les législateurs européens et nationaux. L'accord inclut de larges références aux normes internationales et prévoit la régionalisation ainsi que la transparence des notifications des mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS). Le report de six ans de la mise en œuvre de délais précis dans les procédures, demandé par le Mercosur, n'a pas été concédé par l'UE, tout comme la référence aux normes privées. Le chapitre SPS sera par ailleurs couvert par le mécanisme de règlement des différends de l'accord. En complément, l'accord prévoit des dispositions de coopération en matière SPS pour renforcer l'efficacité des contrôles, notamment sur l'échange d'informations sanitaires, la lutte contre la résistance microbienne et le bien-être animal. L'accord prévoit des mesures de lutte contre la fraude avec des contrôles avant libération, des mesures d'urgence possibles en cas de menace, et une sévérité du système en cas de délisting. Le Gouvernement a bien identifié que les préoccupations exprimées, à la fois par les producteurs et les consommateurs, ne portent pas seulement sur la qualité sanitaire des importations, mais également sur l'équivalence des modes de production. Afin de garantir des conditions de concurrence équitable entre nos producteurs et ceux du Mercosur, il importe de continuer à améliorer l'information du consommateur, dans le respect des règles du commerce international, par l'étiquetage notamment de l'origine. Le renforcement de la compétitivité et de la durabilité de nos filières agricoles constitue également une priorité : une agriculture européenne solide et durable nécessite une politique agricole commune (PAC) à la hauteur des enjeux, dotée d'un budget équivalent au budget actuel. Le Gouvernement porte auprès de la Commission européenne l'objectif d'une meilleure cohérence entre la politique commerciale et la politique agricole de l'Union européenne, conformément aux engagements de l'axe 3 de son plan d'action relatif au CETA. Il le porte également dans la réforme de la PAC, en affirmant que la nouvelle PAC, en cohérence avec les autres politiques européennes, doit accompagner le projet européen au service d'une agriculture répondant à des standards exigeants et ne peut se concevoir sans une régulation sociale, environnementale et sanitaire des échanges avec les autres pays. Le Président de la République l'a encore réaffirmé lors du sommet du G7, sur l'accord commercial avec le Mercosur : l'écologie prime sur le commerce. Cela implique le respect des dispositions prévues dans l'accord de Paris et le respect effectif de toutes nos normes sanitaires, en mettant à égalité nos producteurs et leurs concurrents qui exportent chez nous. L'accord ne pourra être signé que dans ces conditions. Enfin, pour ce qui concerne les droits des communautés autochtones, cet accord s'inscrit dans le cadre plus global d'un accord d'association, qui doit permettre l'instauration d'un partenariat politique entre l'UE et le Mercosur.

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