Question de M. MORISSET Jean-Marie (Deux-Sèvres - Les Républicains) publiée le 26/09/2019

M. Jean-Marie Morisset attire l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur la suppression annoncée de la déduction forfaitaire spécifique. En effet, lors du discours de politique générale en juin dernier, le Premier ministre a déclaré vouloir supprimer la déduction forfaitaire spécifique. Or, cette mesure permet un abattement de 10 % pour frais professionnels dans les entreprises du bâtiment et des travaux publics (BTP), ce qui correspond à la prise en charge du panier-repas des salariés et de leurs frais kilométriques. Présentée comme une mesure de « justice sociale », cette suppression représente en réalité une hausse moyenne de charges de près de 9 points sur un tiers des salariés des entreprises du bâtiment et principalement les salaires des ouvriers. Selon la fédération française du bâtiment (FFB), ajoutée à la hausse de la fiscalité sur le gazole non routier, cela représenterait pour les artisans et entrepreneurs du bâtiment une hausse globale de charges de près de 1,8 milliard d'euros. Le secteur du bâtiment, qui a créé 50 000 emplois au cours des deux dernières années et forme près de 80 000 apprentis, n'est pas en mesure de pouvoir absorber une telle hausse de charges. Dans ce contexte, il lui demande de bien vouloir lui indiquer ses intentions afin de répondre aux inquiétudes légitimes des professionnels du secteur.

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Réponse du Ministère de l'action et des comptes publics publiée le 28/11/2019

L'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002 relatif aux frais professionnels déductibles pour le calcul des cotisations de sécurité sociale prévoit que la déduction forfaitaire spécifique (DFS) est réservée à certaines professions qui comportent des frais dont le montant est notoirement supérieur à celui résultant du dispositif relatif aux frais professionnels. La déduction forfaitaire spécifique correspond à un abattement d'assiette des cotisations sociales représentatif des frais professionnels dont bénéficient plusieurs secteurs d'activité, notamment la construction, le transport, l'aviation, le commerce, la presse et la culture. Originellement représentatif des frais professionnels engagés par les salariés, ce dispositif est désormais sans lien avec ces derniers et pose un problème de mise en œuvre en cas de cumul avec d'autres remboursements de frais. Il est par ailleurs fréquemment critiqué car, en réduisant l'assiette de cotisations, il obère les droits des salariés, notamment en matière de droits à retraite. Certains employeurs, comme ceux du transport routier de voyageurs, l'ont ainsi progressivement abandonné. La Cour de cassation, à travers plusieurs jurisprudences (Cour de cassation, 14 février 2013 n° 11-27032 ; Cour de cassation, 19 janvier 2017, n° 16-10782), est venue préciser que pour bénéficier de la DFS le salarié doit remplir deux conditions cumulatives : faire partie de la liste des professions prévues à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000 et exposer des frais professionnels lors de son activité professionnelle. L'appartenance à l'une des professions visées à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts ne peut dont suffire en soit à permettre le bénéfice de la déduction forfaitaire spécifique. Il doit de surcroît être établi que le salarié concerné est effectivement amené à exposer des frais supplémentaires de nourriture, de logement ou encore d'hébergement du fait de son activité, sans quoi l'abattement pour frais professionnels ne peut valablement être appliqué. À cet égard, il appartient à l'employeur de démontrer que le salarié a réellement engagé des frais professionnels. Ces deux conditions remplies, le bénéfice de la déduction forfaitaire spécifique de 10 % dans le secteur du bâtiment et des travaux publics est admis. Enfin, afin de limiter l'effet d'aubaine lié à l'interaction entre renforcement des allègements généraux et DFS, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 a prévu que la rémunération prise en compte pour la détermination du coefficient d'allègement général se rapproche d'une assiette de cotisations qui ne tient pas compte de l'application d'une déduction forfaitaire spécifique. Il est désormais prévu qu'à compter du 1er janvier 2020, les allègements généraux dont bénéficient les employeurs éligibles à la DFS seront plafonnés à 130 % des allègements auxquels a droit un employeur de droit commun pour un salarié à même niveau de salaire. Ce plafonnement, qui sera instauré par voie réglementaire, maintient un gain très significatif en faveur des employeurs éligibles à la DFS, et sera sans impact sur la rémunération nette des salariés.

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