Question de M. MONTAUGÉ Franck (Gers - SOCR) publiée le 10/10/2019

Question posée en séance publique le 09/10/2019

M. Franck Montaugé. Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, au fil des siècles, à mesure que l'agriculture contribuait, par ses évolutions, aux progrès de l'humanité, l'activité des hommes et des femmes qui l'incarnaient a été banalisée et même, petit à petit, dévalorisée, jusqu'à être aujourd'hui vilipendée, stigmatisée, voire incriminée. C'est cette incompréhension que les agriculteurs qui se mobilisent ces jours-ci dénoncent.

Au regard du temps long et des enjeux que nos sociétés doivent relever aujourd'hui dans l'urgence, le malaise qu'éprouvent les agriculteurs s'inscrit en réalité dans une crise de civilisation.

Nous devons tous, collectivement, faire évoluer nos paradigmes, dans l'agriculture, bien sûr, mais aussi dans les transports, le logement, ou encore l'énergie.

S'il y a malaise dans la civilisation – j'estime qu'à bien des égards nous en sommes là –, les agriculteurs ne doivent pas être les boucs émissaires d'une problématique qui concerne en réalité l'entière communauté des citoyens.

Les paysans ne sont pas le problème : ils sont l'une des solutions aux difficultés que nous devons résoudre collectivement et dans l'urgence.

Alors, monsieur le ministre, au vu de ce contexte, quelle est votre stratégie, quel est votre plan d'action ?

Où en êtes-vous de la mise en place des prestations pour services environnementaux, ou PSE, qui permettraient que soit reconnu ce qu'apportent les agriculteurs à la société dans son ensemble, au-delà des biens nourriciers ?

Comment allez-vous compenser la baisse des crédits de la politique agricole commune pour la transition vers le bio, ou pour la compensation des handicaps naturels ?

Qu'envisagez-vous de faire pour la réalisation rapide d'ouvrages hydrauliques ?

Enfin, le constat étant fait que la théorie du ruissellement ne fonctionne pas plus dans l'agriculture qu'ailleurs, comment envisagez-vous de répondre à la question de la revalorisation du revenu agricole, sur lequel la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable, dite loi Égalim, n'a eu, à ce jour, quasiment aucun effet ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR, ainsi que sur des travées des groupes CRCE et Les Républicains.)


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 10/10/2019

Réponse apportée en séance publique le 09/10/2019

M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur Montaugé, de nouveau, je ne peux qu'être d'accord avec vous quant au constat que vous avez dressé ; c'est le constat que font l'ensemble de vos collègues, sur toutes les travées de cet hémicycle.

Je veux répondre précisément aux questions que vous me posez. Aujourd'hui, la transition agroécologique est indispensable à notre agriculture. Elle devra se faire dans tous les domaines, dans la rotation culturale comme dans le changement des pratiques agraires et des cultures.

Vous m'interrogez sur le bio : jamais autant d'agriculteurs n'ont fait la transition vers l'agriculture biologique que l'année dernière. Ils sont 6 000 de plus ; aujourd'hui, 10 % des agriculteurs de notre pays pratiquent l'agriculture biologique et 7,5 % de la surface agricole utile lui est consacrée. L'objectif est d'y destiner 15 % de la SAU en 2025 : nous nous en rapprochons chaque année et, à l'évidence, nous atteindrons ce seuil !

Mais il faut aller plus loin encore ; pour ce faire, il faut en donner les moyens aux agriculteurs. C'est pourquoi la France se bat bec et ongles pour que le montant du cadre financier de la PAC ne baisse pas. Certes, il diminuera évidemment à due concurrence de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, mais la France n'acceptera pas qu'une autre portion des sommes affectées à la PAC lui soit retirée au profit d'autres politiques. Il est indispensable de conserver le montant actuel de la PAC à « UE-27 », c'est-à-dire sans les Britanniques.

Lundi prochain, lors de la réunion du conseil des ministres européens de l'agriculture à Luxembourg, je porterai au nom de la France un mémorandum relatif à vingt pays européens, demandant que le cadre financier du budget européen de la PAC reste le même.

Pour entrer dans le détail du budget de la PAC, nous souhaitons que le premier pilier reste important. Des aides directes sont en effet nécessaires. En même temps, nous allons faire entrer dans le premier pilier la transition agroécologique, au travers de ce qu'on appelle, dans le patois gersois, l'eco-scheme. (Sourires.) L'eco-scheme devra être obligatoire pour tous les pays de l'Union européenne : nous voulons une PAC intégrée et non 27 PAC différentes.

À l'intérieur du deuxième pilier, les PSE seront évidemment mises en place : un débat s'est déjà tenu au Sénat à ce propos, sur votre initiative. Je n'ai pas changé de perspective sur la question : le Gouvernement veut accompagner la mise en œuvre de ces prestations, et nous le ferons dans le cadre de la prochaine politique agricole commune. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM. – M. Yvon Collin applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour la réplique.

M. Franck Montaugé. Monsieur le ministre, vous étiez le rapporteur de la loi d'orientation agricole du 13 octobre 2014, qui a donné le la en matière d'agroécologie. Il faut absolument poursuivre dans ce sens, pour l'ensemble des agriculteurs de France. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)

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