Question de M. GAY Fabien (Seine-Saint-Denis - CRCE) publiée le 03/10/2019

M. Fabien Gay attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur son annonce du dimanche 29 septembre 2019 d'un audit indépendant sur la filière nucléaire d'EDF, suite aux retards et aux surcoûts multiples des réacteurs européens à eau pressurisée (EPR) en France, en Angleterre et en Finlande.
La situation justifie sans doute effectivement un regard et une évaluation indépendante. Cependant, il est également essentiel, pour que la filière nucléaire française soit en mesure d'être réellement performante, de préserver les savoir-faire et la filière industrielle.
Or, en matière industrielle, il semble que la stratégie soit la grande absente au niveau national. Les filières d'excellence française sont privatisées, ouvertes à la concurrence, cédées et démantelées, dans une logique de rentabilité et de profits à court-terme.
Ainsi par exemple, General Electric réalise notamment la maintenance des centrales nucléaires françaises. L'entreprise est pourtant démantelée petit à petit, dans la seule logique du désendettement et sans investissements suffisants. Les syndicats constatent en conséquence une fuite des savoir-faire qui se révèle préjudiciable aujourd'hui et qui le sera davantage encore à l'avenir.
Il semble que cette même logique soit à l'œuvre dans tous les secteurs de l'industrie française. EDF se retrouve aujourd'hui, à travers le projet « Hercule », menacée de scission entre ses activités commerciales et ses activités de production.
Derrière ces opérations, ce sont les Français qui paient le prix fort, alors qu'une nouvelle hausse des tarifs de l'électricité est envisagée pour janvier 2020, faisant suite à deux hausses en 2019. L'électricité reste un bien de première nécessité et devrait être accessibles à tous. Elle est également nécessaire le temps de mettre en œuvre une véritable transition énergétique et écologique.
Il souhaite donc savoir ce qui sera fait pour préserver ces filières industrielles, et quelle est la stratégie du Gouvernement pour l'industrie française.

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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 04/06/2020

La filière nucléaire est une filière d'excellence de l'économie française. Avec plus de 200 000 emplois, elle irrigue les territoires et contribue à rééquilibrer notre balance commerciale. Depuis plusieurs années, elle doit toutefois faire face à d'importants défis et a bénéficié d'un important soutien de l'État, qui s'est traduit par des efforts financiers considérables, réalisés dans le cadre de la restructuration de la filière. La filière nucléaire doit aujourd'hui renforcer sa maîtrise des grands projets industriels. Au vu des enjeux et suite à la demande du ministre de l'économie et des finances, un audit indépendant a été réalisé par Jean-Martin Folz sur l'EPR de Flamanville. Ce rapport a été remis au ministre le 28 octobre 2019 et rendu public. En réponse aux recommandations du rapport, le ministre a demandé au Pdg d'EDF, Jean-Bernard Levy, de produire, sous un mois, un plan de maîtrise industrielle et de renforcement des compétences de la filière, afin d'accroître significativement la maîtrise collective de la filière nucléaire des grands projets. Par ailleurs, conformément aux orientations du projet de la Programmation Pluriannuelle de l'Énergie annoncé le 25 janvier 2019, le Gouvernement souhaite disposer d'ici mi-2021 de l'ensemble des éléments d'expertise nécessaires à une décision éclairée sur l'engagement éventuel d'un programme de construction de nouveaux réacteurs nucléaires. Ainsi, la filière nucléaire doit apporter au Gouvernement les éléments permettant de démontrer sa capacité à répondre à un programme de construction de nouveaux réacteurs dans des délais et des coûts impartis. Pour soutenir la compétitivité de la filière, le Gouvernement a reconduit le Comité stratégique de la filière nucléaire (CSFN). Le CSFN permet de favoriser un dialogue stratégique avec l'ensemble des parties prenantes et de piloter les actions transformantes pour la filière. Le contrat de filière, signé le 28 janvier 2019 par le ministre de la transition écologique et solidaire, le ministre de l'économie et des finances, le Président du CSFN, les représentants des grandes entreprises de la filière et les organisations syndicales, est structuré autour de quatre domaines prioritaires : les compétences, la transformation numérique des entreprises, l'innovation, et l'internationalisation des PME. Concernant General Electric, les activités du groupe en France, particulièrement dans le domaine nucléaire, font l'objet de toute l'attention de l'État. L'État dispose d'un siège au conseil d'administration de la société GEAST (qui regroupe les activités de maintenance du parc de centrales nucléaires et la maîtrise de la technologie des turbines « Arabelle »), assorti d'un droit de veto. En outre, des dispositions assurent la protection des intérêts de la filière nucléaire française s'agissant de la propriété intellectuelle de la turbine « Arabelle ». Ces dispositions consistent en l'octroi à une société contrôlée par l'État, de deux licences gratuites, irrévocables et sous-licenciables portant sur l'ensemble de la propriété intellectuelle nécessaire à l'exécution des services à la base installée d'EDF d'une part, et à la fourniture d'offres pour de nouveaux projets nucléaires d'autre part. Un comité de pilotage spécifique est réuni annuellement, afin de suivre la mise en œuvre de ces engagements. Enfin, concernant EDF, le Gouvernement a demandé à la direction de l'entreprise de proposer des évolutions lui permettant de faire face aux défis auxquels elle est confrontée dans le nucléaire, les énergies renouvelables, les services énergétiques et les réseaux. Les propositions d'évolution devront impérativement préserver l'intégrité du groupe et permettre de dédier les moyens et financements adéquats pour chaque activité. L'objectif de ce projet est de donner toutes les capacités à EDF de se développer, et de réussir la transition énergétique, tout en assurant au consommateur français un accès à une énergie compétitive.

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