Question de M. BABARY Serge (Indre-et-Loire - Les Républicains) publiée le 31/10/2019

M. Serge Babary attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation de binationaux franco-américains nés aux États-Unis et qui ont la nationalité américaine en raison de la règle du droit du sol applicable dans ce pays.

Des milliers de ces binationaux, appelés « Américains accidentels », car nés sur le territoire américain mais n'y ayant très souvent vécu que quelques années, voire quelques mois, se trouvent confrontés depuis plusieurs années à de considérables injustices en matière bancaire et fiscale : refus d'ouverture ou fermetures de comptes, moindre accès à certains services financiers...

Le ministère de l'économie et des finances, ainsi que celui du ministère des affaires étrangères, ont été sollicités à de nombreuses reprises à ce sujet. Ainsi, une proposition de résolution sur la situation de ces « Américains accidentels » a été adoptée à l'unanimité au Sénat le 15 mai 2018.

Le rapport d'information n° 1945 (Assemblée nationale, XVe législature) relatif à l'assujettissement à la fiscalité américaine des Français nés aux États-Unis a été adopté en mai 2019. Parmi les douze préconisations qui y sont présentées, certaines nécessitent des négociations bilatérales avec les États-Unis ou une concertation à l'échelle de l'Union européenne, voire une modification du droit américain.

Récemment, le gouvernement français a obtenu de l'administration américaine qu'elle admette que la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) acquittées en France ne sont pas des cotisations sociales mais bien des impositions de toute nature. Cela permet de tenir compte de la CSG et de la CRDS dans le calcul du crédit déductible de l'impôt américain sur le revenu accordé aux résidents américains percevant des revenus de source française et aux résidents de France soumis à l'impôt américain.

En revanche, il semble qu'aucune avancée n'ait été enregistrée s'agissant de la transmission du numéro d'identification fiscale (NIF) américain.

Or, craignant de faire l'objet de « sanctions financières et réputationnelles très importantes » aux États-Unis, à compter du 1er janvier 2020, les banques françaises ont fait savoir qu'elles pourraient être contraintes de mettre fin aux relations commerciales qu'elles entretiennent avec des « personnes américaines » se trouvant dans l'impossibilité de fournir un NIF américain. Quelque 40 000 comptes bancaires seraient concernés.

Aussi, il souhaiterait savoir les mesures concrètes qui sont prises pour faire avancer ce dossier.

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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 02/01/2020

Les « Américains accidentels », c'est-à-dire nos concitoyens également ressortissants américains du fait de leur lieu de naissance, sont de ce fait assujettis à des obligations au regard de la législation fiscale américaine, en dépit de l'absence de lien particulier effectif avec ce pays. Ces difficultés ont été accentuées par l'application du Foreign Account Tax Compliance Act, ou « loi Fatca ». Elles ne sont toutefois pas exclusivement imputables à cette législation, puisqu'elles sont plus fondamentalement la résultante du principe de la Citizenship Based Taxation, lequel est un élément structurant et ancien du système fiscal américain. Le Gouvernement a identifié cette problématique de longue date et a mené de nombreuses démarches actives auprès des autorités américaines. La France a d'ailleurs certainement été l'État européen le plus mobilisé pour faire avancer ce dossier. Une délégation interministérielle composée des services du ministère de l'économie et des finances (direction de la législation fiscale), du ministère de l'Europe et des affaires étrangères ainsi que du ministère des solidarités et de la santé (direction de la sécurité sociale) s'est ainsi rendue à Washington en mai 2018 pour rencontrer les représentants des autorités américaines. Les demandes exprimées à cette occasion, relayées à de nombreuses reprises depuis lors, ont d'ores et déjà abouti à certains résultats notables. En effet, d'une part, les autorités américaines se sont rangées cet été à la position juridique défendue par le Gouvernement, selon laquelle la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) constituent des impôts, couverts à ce titre par la convention fiscale de 1994 qui lie nos deux Etats. Cette inflexion permet ainsi de résoudre des situations préjudiciables de double imposition. D'autre part, l'Internal Revenue Service (IRS) a présenté le 6 septembre 2019 une nouvelle procédure d'amnistie fiscale. Celle-ci constitue une avancée significative qui, compte tenu des seuils de référence élevés (en termes de niveau de revenus et de patrimoine), permettra de résoudre la situation fiscale de nombreux binationaux ayant décidé de renoncer à leur nationalité américaine. Les problématiques rencontrées par les clients de nationalité américaine dans leurs relations avec les établissements bancaires, consécutives aux difficultés de délivrance, par les autorités américaines, d'un numéro de sécurité sociale qui fait également fonction de numéro d'identification fiscale (Tax Identification Number – TIN), constituent quant à elles toujours un motif de préoccupation légitime. Il existe en effet un enjeu de court-terme, lié à l'expiration prochaine de la date de dérogation accordée jusqu'au 1er janvier 2020 pour l'obligation de collecte de ce TIN par les banques. Les représentants parlementaires ont été amenés à insister auprès des responsables du Trésor américain sur l'urgente nécessité de résoudre ces difficultés, qui ne sont nullement imputables aux pouvoirs publics français, mais qui sont au contraire inhérentes à la complexité du système administratif des Etats-Unis. Le Gouvernement a également échangé avec l'administration américaine, pour lui faire part de la nécessité de parvenir à une résolution rapide de ces difficultés. Les autorités françaises ont relayé ce message, à plusieurs reprises, auprès de leurs homologues du Trésor et de l'IRS et ont mobilisé les autres administrations concernées chez nos partenaires européens pour en renforcer la portée. Ces initiatives viennent d'aboutir à la publication par l'IRS, le 15 octobre 2019, de compléments aux instructions existantes qui précisent les obligations des institutions financières en matière de collecte et de transmission du TIN. Or, ces instructions amendées reconnaissent désormais expressément que, après cette échéance du 31 décembre 2019, l'absence de TIN transmis par les banques n'emporte nullement pour conséquence immédiate la caractérisation d'un manquement significatif de la part de celles-ci. En effet, les services de l'IRS prendront en considération les circonstances particulières ayant conduit à cette carence, ainsi que les procédures internes mises en place et les diligences accomplies par les institutions financières pour collecter cette information. De telles précisions sont de nature à sécuriser les établissements bancaires et leurs clients vis-à-vis du risque de sanctions financières, puisqu'ils seront ainsi en mesure d'attester de leur bonne foi et des difficultés rencontrées.

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