Question de Mme BERTRAND Anne-Marie (Bouches-du-Rhône - Les Républicains) publiée le 07/11/2019

Question posée en séance publique le 06/11/2019

Mme Anne-Marie Bertrand. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, le public présent dans cet hémicycle ne peut ni applaudir ni conspuer les orateurs. La raison en est simple : les élus ne légifèrent pas sous la menace ! C'est un principe essentiel dans une démocratie.

Depuis le vote, par notre assemblée, d'une proposition de loi visant à interdire le port de signes religieux lors des sorties scolaires, nombreux sont les sénateurs qui, comme moi, ont reçu des courriels menaçants, dont les auteurs vont jusqu'à espérer notre mort !

Mme Éliane Assassi. Ceux qui ont voté contre en reçoivent aussi, madame !

Mme Anne-Marie Bertrand. La liste des 163 sénateurs ayant voté cette loi qualifiée par certains de « scélérate » est jetée en pâture. Un groupe Facebook parle même de « sénateurs nazis » et invite ses membres à communiquer les lieux de résidence et les photos des parlementaires qui ont voté ce texte… Les intimidations sont explicites.

Notre collègue Jacqueline Eustache-Brinio, auteur de la proposition de loi, qui mène un combat essentiel pour la laïcité, a été contrainte, devant la violence des attaques, de se constituer partie civile. Je tiens lui apporter tout mon soutien. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, Les Indépendants, UC et RDSE.)

Un texte a été démocratiquement voté par une assemblée, des parlementaires sont traqués, menacés, mais, monsieur le ministre, on ne vous a pas entendu dénoncer ce qui constitue une atteinte grave à l'exercice d'une démocratie sereine. Pourquoi ce silence ?

M. le président. Veuillez poser votre question !

Mme Anne-Marie Bertrand. Vous êtes le ministre de l'intérieur. À ce titre, quelles mesures comptez-vous prendre pour mettre fin à ces tentatives d'intimidation ? Devons-nous nous inquiéter ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – Mme Josiane Costes applaudit également.)


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 07/11/2019

Réponse apportée en séance publique le 06/11/2019

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur. Madame la sénatrice, nous devons tous nous retrouver pour défendre la liberté du débat public, particulièrement précieuse dans un hémicycle comme celui du Sénat et même consubstantielle à l'engagement politique de chacune et chacun d'entre nous. Il n'est donc pas nécessaire de polémiquer, me semble-t-il. (Murmures sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme Eustache-Brinio m'ayant alerté, j'ai immédiatement saisi la plateforme Pharos (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.), fait un signalement au procureur de la République et eu une expression politique pour dénoncer avec la plus grande force ces actes d'intimidation totalement inacceptables. Je le fais de façon systématique en pareil cas, directement auprès des parlementaires concernés.

Au 1er septembre, nous avions enregistré 244 actes de violence ou de malveillance à l'égard d'élus ou de parlementaires : 212 dans le cadre du mouvement des « gilets jaunes » et 32 dans celui de la contestation du CETA. Systématiquement, nous les avons tous ensemble condamnés, quels que soient les désaccords que nous pouvons avoir et exprimer.

C'est la liberté même du débat dans cet hémicycle qui veut que vous soyez protégés dans vos prises de parole. Nous vous devons, à chacune et à chacun d'entre vous, la protection de la police ou de la gendarmerie chaque fois que nécessaire. Dans cet esprit, j'ai donné des instructions précises à tous les préfets pour que tout parlementaire sollicitant leur appui, leur assistance, par exemple la mise en sécurité de sa permanence, puisse être accompagné.

Par ailleurs, Mme la garde des sceaux a signé ce matin même une circulaire adressée à l'ensemble des procureurs pour que, en cas de menaces contre des élus, nationaux ou locaux, il y ait systématiquement recherche des responsabilités et sanctions. Ces comportements totalement scandaleux ne sauraient menacer la liberté d'expression et la liberté de vote des élus de la République ! (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM et sur des travées des groupes Les Républicains, UC et RDSE.)

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