Question de M. CAMBON Christian (Val-de-Marne - Les Républicains) publiée le 28/11/2019

Question posée en séance publique le 27/11/2019

M. Christian Cambon. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, au nom de mon groupe et au nom de la commission de la défense, je souhaite rendre à mon tour hommage à la mémoire de nos soldats disparus tragiquement dans l'accident d'hélicoptère intervenu au Sahel, alors qu'ils étaient engagés en plein combat contre des groupes djihadistes armés.

Une fois de plus, mes chers collègues, nos forces paient un lourd tribut à cette guerre qu'avec un courage et une abnégation sans limites elles livrent pour notre sécurité, celle des Français, mais aussi celle de toute l'Europe.

Nos pensées douloureuses vont aux familles de ces héros, à leurs camarades – de Pau, de Gap, de Varces et de Saint-Christol –, mais encore aux soldats de toutes nos forces engagées en OPEX, qui, chaque jour, partent en opération sans savoir s'ils rentreront le soir.

Avec une émotion toute particulière, nos pensées et notre affection vont ici à notre collègue, Jean-Marie, qui nous parlait si souvent de ce fils tant aimé, dont la vocation était le service de la France. Écoutons le message de son père, hier soir : « nous sommes dévastés, mais nous sommes fiers de lui » ; car, en vérité, ces treize soldats n'étaient pas là par hasard ; ils avaient choisi cet engagement au nom des valeurs, auxquelles ils croient, auxquelles ils croyaient.

En cet instant, nous leur devons qu'il n'y ait pas de polémique. Nous leur devons respect, recueillement et reconnaissance.

Ici, au Sénat, viendra sûrement le temps des interrogations. Elles sont légitimes. Peut-être aussi faudra-t-il un débat.

Mais, aujourd'hui, nous savons que, face à une extension de la menace djihadiste vers les pays voisins, notre présence militaire est indispensable. Je dirai même qu'elle est incontournable, car, sans sécurité, inutile de croire au développement ou à plus de présence sur le terrain de l'État malien, déjà si défaillant.

Nous savons aussi que nous ne pouvons assurer seuls cette mission, sur un territoire grand comme l'Europe. Vous l'avez dit, monsieur le Premier ministre, de nombreux pays nous aident déjà, mais ils nous aident insuffisamment.

À la veille de plusieurs sommets – sommet européen et sommet des nations occidentales de l'OTAN –, pensez-vous, monsieur le Premier ministre, pouvoir mobiliser plus encore nos alliés européens et occidentaux, afin qu'ils nous aident encore plus efficacement et qu'un tel drame ne se reproduise plus jamais – en d'autres termes, pour que Pierre-Emmanuel Bockel et ses compagnons d'infortune ne soient pas morts pour rien ? (Applaudissements prolongés.)


Réponse du Premier ministre publiée le 28/11/2019

Réponse apportée en séance publique le 27/11/2019

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président Cambon, je n'ai rien à ajouter à l'essentiel de l'intervention que vous venez de prononcer.

Je mesure l'émotion de l'ami et la parfaite compréhension que vous avez de l'ensemble de ces sujets, compte tenu des responsabilités que vous exercez au sein de la Haute Assemblée. Vous connaissez les militaires français, vous les voyez régulièrement, vous les auditionnez ici, vous les saluez, avec de nombreux sénateurs, sur les théâtres d'opérations extérieures. Vous partagez avec eux la réalité de ce que sont les opérations extérieures, le sens de l'engagement profond et, en même temps, la très grande simplicité dans les rapports humains qui prévaut généralement lorsque l'on rencontre celles et ceux qui servent sous les drapeaux français. Bref, monsieur le président, comme beaucoup d'entre nous ici, vous les aimez.

La perte de treize hommes entraîne évidemment de la tristesse et, à certains égards, une forme de désarroi.

Cependant, vous l'avez dit, nous sommes au Mali pour d'excellentes raisons.

Nous sommes au Mali pour garantir la sécurité de la France. Nous sommes au Mali pour accompagner des États partenaires et amis. Nous sommes au Mali parce qu'une décision politique a voulu que nous y soyons. Cette décision politique, il est bien naturel que le Parlement la discute, l'interroge. C'est ce que vous faites depuis longtemps et c'est ce que vous continuerez à faire. Il est légitime, normal, sain, dans une démocratie, qu'il en soit ainsi.

Vous l'avez dit également, monsieur le président, nous devons faire en sorte que la France, qui n'est pas seule au Mali, puisse être plus accompagnée encore. Nous devons faire en sorte que les mandats de l'ensemble des structures qui interviennent soient probablement mieux coordonnés. Nous devons faire en sorte que les objectifs politiques et opérationnels soient adaptés au fur et à mesure que la menace mute et se transforme.

Il appartiendra au Président de la République de s'exprimer, après le temps du deuil, sur ce que nous pouvons faire pour convaincre nos alliés et nos amis européens que l'intérêt de l'Europe se joue aussi dans cette région.

Il appartiendra à l'ensemble de la communauté nationale et des acteurs du débat public de convaincre nos partenaires sur place, les États du Sahel, qu'une partie décisive de la solution se trouve dans leurs mains et que la réconciliation nationale au Mali et la « reconstitution de l'armée nouvelle », comme on l'appelle parfois dans ce pays, sont des conditions indispensables au retour à la stabilité, à la préservation de celle-ci et au développement.

Il nous appartiendra de les convaincre qu'ils doivent tous continuer à s'engager et à assumer avoir besoin de nous, ou d'autres, pour garantir cette stabilité.

Comme je le disais tout à l'heure au sénateur Alain Richard, c'est un combat difficile. C'est un combat long. Nous le savons. Il faut donc débattre, formuler des objectifs politiques, convaincre nos alliés et soutenir encore et toujours les femmes et les hommes qui s'engagent sous nos drapeaux. (Applaudissements.)

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