Question de M. TISSOT Jean-Claude (Loire - SOCR) publiée le 21/11/2019

M. Jean-Claude Tissot attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la carte de paiement de l'allocation pour demandeur d'asile (ADA). Jusqu'à son entrée en vigueur le 5 novembre 2019, la carte de retrait de l'ADA permettait aux demandeurs d'asile d'effectuer des retraits et des achats. Depuis le 5 novembre, elle est devenue exclusivement une carte de paiement. Le coût de cotisation d'une carte autorisant retraits et paiements étant légèrement plus élevé que celui d'une carte permettant seulement les paiements (d'après le rapport de la commission des finances pour le budget pour 2020), c'est pour une économie de seulement 115 000 euros par an pour 120 000 cartes que ce changement a été mis en place. Or, il n'est pas sans conséquence. En effet, au sein des communes rurales, de nombreux petits commerces ne disposent pas de terminaux de paiement. L'accès aux transports publics se trouve remis en question pour les mêmes raisons. Les lignes intercommunales ne proposent que rarement des terminaux bancaires et exigent très majoritairement un règlement en espèces. Cette mesure limite donc fortement la liberté de mouvement et la capacité de consommation des demandeurs d'asile. De même, ce changement limite grandement leurs possibilités de participer à la vie locale (association, participation des enfants aux sorties scolaires...) pour laquelle des contributions sont très souvent demandées en espèces. En outre, les demandeurs d'asile devront composer un numéro payant (le 0811 041 041), de six centimes par minute, auxquels s'ajoute le prix de l'appel, pour connaître leur solde. Enfin, en limitant l'accès aux commerces à ces personnes, c'est également l'économie locale qui se trouve pénalisée. Les demandeurs d'asiles participaient, jusqu'au 5 novembre, à rendre ces diverses activités économiques viables, et ce, au même titre que les autres habitants des territoires ruraux. Aussi, il souhaiterait savoir si le Gouvernement envisage de revenir au précédent système de carte de retrait afin de ne pas restreindre les libertés et l'intégration des demandeurs d'asiles.

- page 5780

Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 10/09/2020

La mise en place d'une carte de paiement, sans possibilité de retrait, permet, en limitant la circulation d'argent liquide, d'éviter que l'allocation pour demandeur d'asile serve à d'autres fins que celles d'assurer la subsistance du demandeur d'asile, au moyen de dépenses courantes sur le territoire national. Ce faisant, les risques de fraudes et d'abus, liés à une trop grande liquidité de l'allocation, seront mieux maîtrisés. Avant sa généralisation au territoire métropolitain, cette mesure a fait l'objet d'une expérimentation durant plusieurs mois en Guyane : les retours ont été positifs et ont montré que la mise en place d'une carte de paiement en lieu et place d'une carte de retrait ne dégradait en rien les conditions de vie des demandeurs d'asile. En outre, le Gouvernement est à l'écoute des associations qui ont été reçues au ministère de l'intérieur et qui participent à un comité de suivi de la réforme pour garantir que celle-ci ne génère pas de difficulté. L'entrée en vigueur de la mesure, initialement prévue en septembre 2019, a été retardée afin de permettre aux opérateurs qui en étaient dépourvus de s'équiper de terminaux de paiement électronique (TPE) et d'assurer une information appropriée des demandeurs. De surcroît, un aménagement important du dispositif a été consenti avec le déplafonnement total du nombre de transactions autorisées. De la sorte, quel que soit le montant de leur transaction, les demandeurs d'asile peuvent continuer à acheter leurs produits de première nécessité dans les supermarchés et les commerces dotés de TPE. Le bilan réalisé par l'office français de l'immigration et de l'intégration a d'ailleurs confirmé la possibilité, pour les demandeurs d'asile, de procéder à de petits achats avec une carte « 100 % paiement », 44 % des transactions ayant porté sur un montant inférieur à 10 € en novembre 2019. De la même manière, alors que les associations craignaient que les demandeurs d'asile hébergés dans des zones rurales moins bien pourvues en commerces ne puissent disposer librement de leur allocation, il ressort de ce bilan que la carte de paiement a été largement utilisée sur l'ensemble du territoire métropolitain, selon une répartition régionale correspondant à celle des allocataires. Enfin, la démonétisation ne méconnaît pas le fait que l'accès des demandeurs d'asile aux espèces demeure utile dans leur vie quotidienne. Ainsi, la pratique du cashback, qui est réservée aux seuls commerçants par le code monétaire et financier (ce qui limite de facto le risque d'abus), permet de récupérer jusqu'à 60 euros en espèces dans le cadre d'un paiement par carte d'un euro minimum. La mise en œuvre de cette mesure continue de faire l'objet d'un suivi attentif. Un groupe de travail réunissant des associations d'horizons divers accompagnant les demandeurs d'asile a été mis en place. Il suit avec attention la mise en œuvre de cette mesure. Le cas échéant, le dispositif pourra être adapté de façon à résoudre les difficultés opérationnelles qui pourraient être signalées.

- page 4133

Page mise à jour le