Question de M. VAUGRENARD Yannick (Loire-Atlantique - SOCR) publiée le 19/12/2019

M. Yannick Vaugrenard attire l'attention de Mme la ministre des armées sur les oubliés de la Nation.

Selon l'article R. 513-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, la mention « mort au service de la Nation » peut être attribuée à une personne « décédé du fait de l'accomplissement de ses fonctions dans des circonstances exceptionnelles ».
L'appréciation des « circonstances exceptionnelles » est laissée au Gouvernement.

Pour autant, avant 2017, les attributions de la mention « mort au service de la Nation » ont confirmé la reconnaissance des militaires décédés accidentellement en exercice opérationnels.
Depuis 2017, les décisions prises vont à l'encontre de l'esprit initial du décret n° 2016-1903 du 28 décembre 2016 dont est issu l'article R. 513-1. En effet, les demandes de mention « mort au service de la Nation » des militaires qui décèdent accidentellement lors d'exercices opérationnels ou en missions intérieures sont systématiquement refusées.

Outre l'incompréhension que suscitent ces décisions, elles instaurent une injustice entre les militaires qui décèdent en exercice et ceux décédés à l'entraînement. Pour ces derniers, leurs enfants ne sont pas reconnus comme « pupilles de la Nation », leur conjoint ne perçoit que 50 % de la pension de réversion et leur nom ne sera pas gravé sur le monument aux morts de leur commune.

Il lui demande donc de bien vouloir clarifier les conditions d'attribution de la mention « mort au service de la Nation » afin de supprimer l'arbitraire pour son attribution en intégrant les militaires décédés accidentellement lors d'exercices opérationnels ou en missions intérieures, ce qui permettra d'assurer un soutien fraternel aux familles de ceux qui s'engagent pour défendre notre pays.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'intérieur publiée le 15/01/2020

Réponse apportée en séance publique le 14/01/2020

M. Yannick Vaugrenard. Ma question concerne ceux que nous pourrions appeler les « oubliés de la Nation ».

Selon le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, la mention « mort pour le service de la Nation » peut être attribuée à une personne décédée « du fait de l'accomplissement de ses fonctions dans des circonstances exceptionnelles ». Cependant, l'appréciation des « circonstances exceptionnelles » est laissée au ministre en fonction.

Or, avant 2017, les attributions de la mention « mort pour le service de la Nation » ont confirmé la reconnaissance des militaires décédés « accidentellement » lors d'exercices opérationnels. Mais depuis cette date, les décisions de la ministre vont à l'encontre de l'esprit initial du décret du 28 décembre 2016. En effet, les demandes de mention « mort pour le service de la Nation » pour des militaires qui décèdent accidentellement lors d'exercices opérationnels ou en missions intérieures sont désormais systématiquement rejetées.

Ces décisions, outre l'incompréhension qu'elles suscitent, instaurent une injustice à l'égard des militaires qui décèdent à l'entraînement. Les enfants de ces derniers ne sont pas reconnus comme « pupilles de la Nation », leur conjoint ne perçoit que 50 % de la pension de réversion et leur nom ne sera pas gravé sur le monument aux morts de leur commune.

L'un de mes collègues députés a déposé, le 22 mai dernier, une proposition de loi visant à octroyer le statut de « mort pour le service de la Nation » aux militaires décédés en exercice, ce qui permettrait d'assainir la situation actuelle et de la rendre plus juste.

Monsieur le secrétaire d'État, je souhaiterais connaître votre position sur cette proposition de loi et, plus globalement, que vous clarifiiez les conditions d'attribution de la mention « mort pour le service de la Nation » afin de supprimer l'arbitraire et d'intégrer les militaires décédés accidentellement lors d'exercices opérationnels ou en missions intérieures. Cela permettrait d'assurer notre soutien fraternel aux familles de ceux qui s'engagent pour défendre notre pays.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, qui permet au Gouvernement de préciser les conditions d'attribution de la mention « mort pour le service de la Nation ».

Cette mention a été créée en 2012, au lendemain des attentats commis par Mohammed Merah contre la communauté juive et contre l'armée. Elle vise à honorer la mémoire des militaires et des agents publics tués en raison de leurs fonctions ou de leur qualité par l'action volontaire d'un tiers.

Vous avez évoqué le décret de 2016, qui est venu inclure le décès « dans des circonstances exceptionnelles », appréciées comme des situations présentant un caractère de gravité particulière ou anormale et imprévisibles.

Les mesures symboliques prises par la République n'ont de valeur que si elles sont précisément ordonnées. Le décret de 2016 a créé des incertitudes, et le ministère des armées réfléchit à la façon dont il peut y mettre fin pour éviter toute confusion et tout sentiment d'injustice.

Cependant, il n'est pas souhaitable, pour la mémoire et la reconnaissance des militaires tués au combat ou celle des agents publics victimes d'actes de terrorisme, d'étendre de façon indéfinie l'attribution des marques de reconnaissance. Les armées sont légitimement attachées à ces distinctions et à leur sens.

Toutes les morts sont tragiques. Le ministère des armées s'attache à apporter un soutien sans faille aux familles endeuillées. Les ayants cause peuvent ainsi se voir attribuer une allocation du fonds de prévoyance. Les enfants mineurs peuvent également bénéficier d'un régime de protection particulier. Une aide à l'éducation et/ou une allocation d'entretien peuvent ainsi leur être attribuées, pour un an renouvelable, via l'intervention de l'action sociale des armées.

Soyez assuré que le ministère des armées – et, à travers lui, le Gouvernement – apporte un soutien fraternel aux familles de tous les militaires décédés, que ce soit en combat ou en accident de service. Toutefois, il n'envisage pas d'étendre à ce dernier cas l'attribution de la mention « mort pour le service de la Nation ».

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour la réplique.

M. Yannick Vaugrenard. Monsieur le secrétaire d'État, vous vous en doutez, je ne suis pas totalement satisfait par votre réponse.

Vous avez évoqué une extension indéfinie : ce n'est pas de cela qu'il s'agit ! Il s'agit de mettre fin à une distinction, presque de principe, faite au détriment des militaires décédés accidentellement à l'entraînement. L'entraînement est indispensable pour assurer la défense de notre pays et de ses habitants. Je souhaiterais que cette distinction soit atténuée.

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