Question de Mme ARTIGALAS Viviane (Hautes-Pyrénées - SOCR) publiée le 12/12/2019

Question posée en séance publique le 11/12/2019

Mme Viviane Artigalas. Ma question s'adresse à M. le ministre chargé de la ville et du logement.

Monsieur le ministre, ma question porte sur la réforme du calcul des aides au logement (APL) que votre gouvernement va mettre en place au 1er janvier prochain. Celles-ci seront désormais calculées « en temps réel » sur la base des ressources du trimestre précédent, et non plus de celles perçues deux ans plus tôt.

Vous présentez cette réforme comme une mesure de justice. Or l'économie qu'elle va engendrer – 1,4 milliard d'euros d'après vos estimations – se fera au détriment des familles les plus modestes et des jeunes qui entrent dans la vie active. Une fois de plus, ce sont précisément ceux qui ont le plus besoin de justice sociale qui vont faire les frais de votre politique.

Chacun sait que les jeunes de 18 ans à 24 ans qui démarrent leur vie professionnelle, très souvent avec des emplois précaires, ont les plus grandes difficultés à accéder au logement. Les familles modestes connaissent la même situation, y compris celles où les parents travaillent – la moitié des familles modestes sont dans ce cas. Et c'était précisément le principe des APL : elles permettaient de les soutenir pendant quelque temps encore, même si leur situation évoluait positivement.

Depuis le début du quinquennat, les aides au logement sont la cible de votre gouvernement : baisse de 5 euros, suppression de l'APL accession et, aujourd'hui, réforme du mode de calcul. Depuis 2017, l'impact de ces réformes s'élève déjà à 7 milliards d'euros. Ce sont autant d'atteintes portées au pouvoir d'achat des jeunes actifs et des ménages les plus modestes.

Monsieur le ministre, quelles mesures d'accompagnement avez-vous prévues pour ces personnes qui vont perdre brutalement leurs APL et se retrouver dans les plus grandes difficultés ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)


Réponse du Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales – Ville et logement publiée le 12/12/2019

Réponse apportée en séance publique le 11/12/2019

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement. Madame la sénatrice, vous m'interrogez sur la réforme des APL « en temps réel » et vous me demandez si c'est une réforme de justice.

Je vais vous poser une question très simple : qui peut comprendre que les APL soient accordées en fonction de la situation du bénéficiaire deux ans auparavant ? C'est pourtant la réalité : aujourd'hui, on vous attribue des APL en fonction de qui vous étiez deux ans avant.

Prenez par exemple une mère qui, il y a deux ans, travaillait à temps plein et qui, aujourd'hui, travaille à mi-temps ou qui, il y a deux ans, était en couple et qui, aujourd'hui, est une mère célibataire : aujourd'hui, cette femme ne bénéficie pas du niveau des APL auquel elle aurait droit.

Vous m'interrogez sur le cas particulier des étudiants et des jeunes actifs. Je vais là aussi être très clair.

Pour les étudiants, cela ne change absolument rien. C'est même parfois bénéfique, puisque le système actuel a des aberrations : par exemple, un étudiant salarié peut aujourd'hui percevoir moins d'APL qu'un étudiant qui ne l'est pas.

Pour les jeunes actifs, on ne le dit pas suffisamment, mais le système actuel oblige d'attendre deux ans pour percevoir une aide, si la personne n'en percevait pas, lorsqu'elle était étudiante.

M. Fabien Gay. C'est faux !

M. Julien Denormandie, ministre. Monsieur le sénateur, c'est totalement vrai et vous pourrez le vérifier.

Il existe aussi une autre situation problématique dans le système actuel : on applique à un jeune actif qui devient indépendant des forfaits évaluatifs qui font qu'il doit lui aussi attendre deux ans.

La réforme consiste à adapter l'APL en fonction de la situation réelle de la personne : un jeune actif qui entre dans le monde du travail ne doit plus attendre. (Protestations sur les travées du groupe CRCE.)

M. le président. Il faut conclure !

M. Julien Denormandie, ministre. Cette réforme vise à refonder notre système pour donner à celles et ceux qui en ont besoin les bonnes protections. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour la réplique.

Mme Viviane Artigalas. Monsieur le ministre, vous ne m'avez absolument pas convaincue. Vous n'avez pas répondu à ma question ; en fait, vous niez la réalité des conséquences de votre réforme.

Je ne vous ai pas interrogé sur les étudiants, mais sur les mesures d'accompagnement que vous allez mettre en place – c'est la demande qui remonte de nos territoires. Évidemment, vous n'allez pas en mettre en place, puisque vous niez le problème ! Il y a vraiment un décalage entre la réalité du terrain et votre discours. Les personnes les plus modestes sauront vous le reprocher le moment venu, comme pour tout ce que vous faites concernant le logement ! (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)

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