Question de M. BAZIN Arnaud (Val-d'Oise - Les Républicains) publiée le 12/12/2019

M. Arnaud Bazin attire l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur les enseignements à tirer du rapport de l'inspection générale des finances sur la fraude à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) dans le secteur du e-commerce.

Ces fraudes concernent en premier lieu des vendeurs établis en Asie, qui proposent leurs produits sur des plateformes accessibles en France, 98 % des vendeurs enregistrés sur les plateformes d'e-commerce n'étant pas immatriculés à la TVA en France.

Ces vendeurs « bénéficient ainsi d'un avantage de prix de 20 % par rapport aux sociétés qui remplissent leurs obligations fiscales en matière de TVA, créant une distorsion de concurrence majeure », souligne le rapport.

Cette fraude avait déjà été soulignée par la Cour des comptes en septembre 2019 ; celle-ci l'avait chiffrée alors à 15 milliards d'euros par an.

Si le rapport de l'inspection des finances est éclairant, un manque de précision perdure, étant précisé que « les montants en jeu sont considérables ».

Il souhaiterait donc connaitre le montant précis de la fraude et son ampleur ainsi que les moyens préconisés pour y remédier.

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Transmise au Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance - Comptes publics


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance - Comptes publics publiée le 12/11/2020

Dans le secteur du e-commerce, beaucoup d'opérateurs étrangers profitent de la visibilité offerte par les plateformes pour vendre leurs marchandises à des clients français (système dit de la « Place de marché » ou « Marketplace »). Ces « Marketplace » offrent un espace propice à la fraude en matière de TVA. Pour y remédier la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude et la loi de finances pour 2020 ont permis de renforcer les moyens de contrôle de l'administration : la taxation dès le 1er euro des opérateurs étrangers ayant recours à des services de logistique situés en France (« fulfillment  ») ; l'obligation pour les plateformes de transmettre à l'administration fiscale le nom de leurs utilisateurs et les transactions réalisées par leur intermédiaire afin de détecter les contribuables défaillants ; l'instauration d'un régime de solidarité des plateformes en ligne pour le paiement de la TVA due par les opérateurs réalisant via ces plateformes des opérations taxables en France. En 2019, les contrôles engagés par l'administration fiscale ont permis de taxer à la TVA en France un total de 250 M€ de chiffre d'affaires. De même, des milliers d'entreprises se sont immatriculées en France et ont commencé à payer de la TVA (7,8 M€ de TVA ont déjà été acquittés). Au plan pénal,  quatorze dossiers, pour lesquels une fraude supérieure à 100 000 € assortie de majorations exclusives de bonne foi a été établie, ont été transmis à la justice en 2019. En outre, face à des fraudes toujours plus organisées, complexes et mobiles, une nouvelle impulsion interministérielle à la politique de lutte contre la fraude est engagée, afin de donner la priorité aux partages opérationnels de renseignements et à la définition de stratégies communes d'actions entre administrations partenaires. En 2020, la délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF) est remaniée au profit d'une mission interministérielle de coordination anti-fraude (MICAF). Dans ce nouveau schéma, la direction générale des finances publiques (DGFiP) devient cheffe de file de trois groupes anti-fraude relatifs à la TVA, le e-commerce et les sociétés éphémères. Une réunion de lancement en juin 2020 a acté la transformation de la Task Force TVA en Groupe opérationnel national anti-fraude (GONAF) TVA. Au niveau communautaire, à la suite des interventions de la France dans le cadre d'EUROFISC, un groupe de travail dédié au commerce électronique et aux ventes à distance a été créé en avril 2016 (WF5). Les premières réunions ont permis aux 22 États membres d'échanger sur les méthodes de récupération du contenu de pages internet (dites de « scraping ») à des fins de programmation. Le WF5 a également permis la mutualisation entre États membres des dispositifs anti-fraude TVA sur les plateformes de e-commerce. Pour approfondir son action, le WF5 va se doter d'une équipe de 10 à 12 experts à compter du 3 trimestre 2020 pour intégrer les travaux en cours au sein de la Commission européenne relatifs à la collecte et l'échange des données de paiements que les États conservent au niveau national (Central electronic system of payment information (CESOP). Par ailleurs, la montée en puissance de l'analyse de données (« data-mining ») va permettre l'exploitation de nouvelles données (données des plateformes d'échanges, travaux sur les données des réseaux sociaux) afin de détecter plus efficacement la fraude. Ces éléments illustrent l'action pugnace des services de l'administration fiscale en matière de lutte contre la fraude et son adaptation aux nouveaux schémas de fraude. Enfin, l'enquête de la Cour des comptes qui évalue la fraude à la TVA à 15 Md€ par an, quel que soit le secteur d'activité, confirme que la fraude est un phénomène multiforme en constante évolution, qui reste difficile à appréhender. En outre, l'évaluation réalisée par la Cour et l'INSEE repose sur une méthode ascendante qui part des résultats du contrôle fiscal pour les extrapoler au niveau de l'économie dans son ensemble. Ce chiffrage, réalisé dans un calendrier resserré, qui n'a pas permis de corriger les biais de sélection et de détection fera l'objet de nouveaux travaux de l'INSEE afin de construire une méthode de chiffrage fiable tout en veillant à la cohérence des travaux d'estimation de la fraude qui seront réalisés par la DGFiP.

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