Question de M. MENONVILLE Franck (Meuse - Les Indépendants) publiée le 26/12/2019

M. Franck Menonville attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la lutte contre les plantes dénommées ambroisies. Les conséquences sanitaires des pollens allergisants qu'elles émettent constituent une préoccupation de santé publique impactant, dans certains territoires, l'ensemble de nos concitoyens ruraux comme urbains, raison pour laquelle la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a permis de les prendre en compte comme espèce nuisible à la santé.
Toutefois, les 3 000 graines d'ambroisies produites par pieds annuellement, dont la capacité germinative dure entre vingt et trente ans, se disséminent et ne connaissent pas les frontières des terrains cultivés et non cultivés. De sorte que les envahissements de cette flore constituent aussi un fléau pour l'agriculture entraînant, tour à tour et suivant la gravité de la situation, la baisse de rendement, le déclassement de récolte, l'abandon de cultures de printemps, un surcoût de gestion important et la dévalorisation du foncier agricole en raison d'une pollution biologique durable.
Il souhaiterait savoir si, à l'occasion de la révision en cours du classement national, il est envisagé le classement des ambroisies comme espèces nuisibles aux végétaux. Plus généralement, il souhaiterait connaître les mesures qu'il envisage pour faciliter la lutte contre la propagation de ces plantes nuisibles préjudiciables aux exploitants agricoles.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 26/03/2020

Plantes invasives originaires d'Amérique du nord, plusieurs espèces d'ambroisie ont colonisé toutes les régions françaises où elles affectent à la fois la santé publique et l'économie agricole. L'ambroisie à feuilles d'armoise est l'espèce la plus répandue, et ses impacts sont largement documentés. La production de pollen anémophile allergène par trois espèces - l'ambroisie à feuilles d'armoise (ambrosia artemisiifolia L.), l'ambroisie à épis lisses (ambrosia psilostachya DC.) et l'ambroisie trifide (ambrosia trifida L.) - est bien identifiée comme une menace pour la santé humaine et fait l'objet de l'article D.1338-1 du code de la santé publique intégré par le décret n° 2017-645 en application de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé. Ce décret prévoit l'application de mesures visant à prévenir l'apparition ou éviter la prolifération des trois espèces d'ambroisie, en tenant compte d'autres finalités, comme la préservation de la biodiversité et la santé des végétaux. Le ministère de la santé, avec l'appui de plusieurs ministères, dont le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, a intégré au nouveau dispositif réglementaire national spécifique à la lutte contre les ambroisies, une instruction interministérielle visant la rédaction de plans d'actions locaux de prévention et de lutte, pour lesquels la cohérence des mesures est assurée par le préfet de région. Plantes rudérales et exotiques annuelles, l'ambroisie à feuilles d'armoise et l'ambroisie trifide entraînent des évolutions locales de flore défavorables aux cultures de printemps dont elles réduisent le rendement. Cette concurrence, étroitement corrélée aux pratiques culturales et aux solutions phytopharmaceutiques disponibles et autorisées, varie selon les espèces et variétés cultivées et les espèces d'ambroisie. L'ambroisie trifide, caractérisée en particulier par sa haute taille et son fort impact sur la production agricole, fait l'objet d'un suivi particulier par certains services régionaux en charge de la protection des végétaux, afin d'estimer si son niveau de présence sur le territoire nécessite encore d'organiser la mise en œuvre d'actions de lutte collectives. Les travaux en recherche agronomique sur la gestion des adventices progressent grâce notamment au travail de terrain des instituts techniques agricoles. Terres Inovia intervient directement dans la recherche et la formation des techniciens agricoles spécialisés. Des collaborations plus larges existent afin de gérer les adventices à l'échelle de l'exploitation en intégrant les rotations. Le réseau FLORAD mobilise ainsi différents acteurs de la recherche, du développement et de l'enseignement agricole et bénéficie des financements CASDAR. La difficulté de gestion de l'ambroisie à feuilles d'armoise dans certaines cultures, en particulier celle du tournesol en raison de la proximité botanique des deux plantes, a par ailleurs encouragé les obtenteurs à proposer des variétés de tournesol tolérantes aux herbicides (VTH) dès le début de la décennie en cours. Ces variétés sont suivies par la recherche qui a recommandé un accompagnement des agriculteurs pour minimiser les risques d'apparition d'adventices résistantes sur les parcelles, en veillant en particulier à des choix de rotation judicieux. Le ministère chargé de l'agriculture a demandé que soit mis en place un plan d'accompagnement associant l'ensemble des parties concernées. Ce plan vise à surveiller le déploiement des VTH et à sensibiliser et à responsabiliser les professionnels sur leur usage dans un souci de durabilité des pratiques agricoles. Le maintien de ces cultures concurrencées par les ambroisies dans les rotations permet également de pérenniser des ressources alimentaires essentielles aux abeilles domestiques et aux pollinisateurs sauvages. Enfin, d'autres moyens de lutte biologique sont en cours d'expérimentation, comme le recours au coléoptère phytophage ophraella communa, présent en Italie, et dont des chercheurs (institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement, l'agence nationale de sécurité sanitaire pour l'alimentation, l'environnement et le travail, et le centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) évaluent l'impact favorable sur des cultures de tournesol envahies par l'ambroisie. Les ambroisies ne font pas l'objet de réglementation au niveau européen ou national au titre de la santé des végétaux. L'ambroisie à feuilles d'armoise, largement répandue en Europe, ne répond pas aux critères d'espèce émergente ou à répartition limitée qui justifient le classement en organisme de quarantaine dans le règlement européen de la santé des végétaux n° 2016/2031/UE. L'ambroisie trifide, encore très localisée en Europe, a fait l'objet d'une recommandation de réglementation au titre de la santé des végétaux par l'organisation européenne de la protection des plantes et par l'agence nationale de sécurité sanitaire pour l'alimentation, l'environnement et le travail – saisine 2016-SA-0090 https://www.anses.fr/fr/system/files/SANTVEG2016SA0090Ra.pdf. Un classement de cette plante en organisme nuisible réglementé au titre du 6° de l'article L.251-3 du code rural et de la pêche maritime pourrait être envisagé. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a sollicité FREDON France, désigné par arrêté du 2 juin 2017 pour l'animation et le fonctionnement de l'observatoire des ambroisies (centre national de référence de prévention et de lutte contre les ambroisies) pour étudier la faisabilité et les modalités d'une lutte collective efficace et agro-écologiquement acceptable par les différents partenaires. Ces propositions seront présentées au comité national d'orientation de la politique sanitaire animale et végétale, qui se prononcera sur l'opportunité d'un tel classement.

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