Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC) publiée le 23/01/2020

M. Yves Détraigne souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les problèmes de santé publique que pose aujourd'hui l'usage généralisé des antibiotiques, tant pour les hommes que pour les animaux.

En effet, l'antibiorésistance est devenue, ces dernières années, une problématique majeure de nos sociétés. Afin de trouver des alternatives fiables, de plus en plus d'éleveurs se sont tournés vers les plantes pour soigner leurs troupeaux, valorisant un savoir-faire traditionnel basé sur la nature. Toutefois, la réglementation actuelle en interdit l'usage et met hors-la-loi de nombreux éleveurs.

Aussi, en octobre 2019 est paru dans la presse nationale « le manifeste des 1052 éleveurs hors-la-loi » dans lequel ces professionnels défendaient une autre manière de soigner leur cheptel et demandaient une réouverture du débat.

Un collectif regroupant des organisations fédératives et de développement, des instituts techniques, des praticiens vétérinaires, des praticiens botanistes et des structures économiques s'est d'ailleurs constitué depuis plusieurs années pour travailler sur cette question. Il a élaboré une proposition réglementaire pour que l'utilisation des plantes pour stimuler les animaux soit autorisée.

Pour ce faire, la loi doit évoluer en créant une nouvelle catégorie, celle de préparation naturelle traditionnelle, composée exclusivement de substances naturelles à usage biostimulant. Le collectif a ainsi listé 223 plantes qui pourraient constituer une nouvelle catégorie juridique utilisables en élevage pour les soins aux animaux sans danger pour les consommateurs comme pour les animaux.

Considérant qu'il convient de privilégier un moindre recours à la chimie de synthèse, il lui demande s'il entend travailler en ce sens avec les parties prenantes.

- page 353


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 26/03/2020

Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, au travers du plan Écoantibio en particulier, a engagé depuis plusieurs années différentes actions qui soulignent le grand intérêt porté au développement de pratiques permettant de diminuer le recours aux intrants chimiques en élevage. De manière générale, dès lors qu'un produit est utilisé pour prévenir ou guérir une maladie animale, il relève de la réglementation relative au médicament vétérinaire, dont l'objectif est de protéger la santé publique. La phytothérapie, et l'aromathérapie qui en constitue une branche, s'inscrivent bien dans ce cadre. Les contraintes fixées par cette réglementation sont proportionnées aux risques, afin d'offrir de solides garanties pour la santé animale, le bien-être animal, la sécurité de l'utilisateur et, dans le cas de médicaments vétérinaires administrés à des animaux producteurs de denrées alimentaires, pour la sécurité du consommateur des denrées animales issues des animaux. La réglementation actuelle n'interdit pas à l'éleveur l'usage des plantes pour soigner les troupeaux, mais elle l'encadre : le recours à la phytothérapie et à l'aromathérapie est parfaitement possible, dès lors qu'ils en respectent le cadre réglementaire, notamment les obligations de traçabilité et d'approvisionnement par des circuits de fabrication et de distribution sécurisés et contrôlés. Même si aujourd'hui, il existe très peu de médicaments à base de plantes avec une autorisation de mise sur le marché (AMM) disponibles en médecine vétérinaire, il existe néanmoins une autre voie autorisée et donc sécurisée, pour accéder à ces produits : il s'agit des préparations magistrales, qui sont réalisées sur ordonnance de leur vétérinaire, soit par ce vétérinaire soit par un pharmacien. Dans ce contexte, plusieurs actions ont été prises par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation qui visent à développer l'usage de médicaments à base de plantes, dans un cadre néanmoins sécurisé. La France a demandé la création d'un statut particulier pour ces produits à base de plantes lors des négociations du règlement européen sur les médicaments vétérinaires. Elle a obtenu que la Commission européenne établisse un rapport d'ici 2027 sur ces produits. Les autorités françaises poursuivent leurs travaux, afin de pouvoir être en mesure de porter à nouveau ce dossier au plan européen, si possible avant cette échéance de 2027. Deux allègements réglementaires ont néanmoins pu être introduits pour encourager les industriels à déposer des demandes d'AMM pour les médicaments à base de plantes : allègement du contenu du dossier de demande d'AMM et réduction par 3 du montant de la taxe perçue par l'agence nationale du médicament vétérinaire dans le cadre de l'instruction de ces demandes. Par ailleurs, l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) a rendu un avis en février 2018 établissant un état des lieux des alternatives aux antibiotiques en vue de diminuer leur usage en élevage : en substance, les études existantes ne sont pas assez robustes ni assez nombreuses. En cohérence avec cet avis de l'ANSES et dans le cadre des appels à projets du plan Écoantibio, le ministère participe au financement de projets de recherche sur ces produits. L'élaboration d'un module de formation d'une journée à destination des éleveurs ou la création d'un réseau des vétérinaires phytothérapeutes (RéPAAS) par exemple, ont également été subventionnés dans ce cadre. Enfin, au niveau des écoles nationales vétérinaires, un diplôme inter-écoles (DIE) spécifique a été mis en place, le DIE Phytothérapie vétérinaire. Il vise en particulier, comme le RéPAAS, à former davantage de vétérinaires à cette pratique et à leur mettre à disposition des outils, de manière à ce qu'ils puissent répondre à la demande des éleveurs dans ce domaine. De nombreuses actions ont été engagées par les autorités nationales, dans le cadre du plan Écoantibio en particulier, pour acquérir des références et faciliter le recours aux médicaments à base de plantes pour soigner les animaux d'élevage, dans un cadre sécurisant pour la santé animale, la santé du consommateur et de l'utilisateur de ces produits.

- page 1452

Page mise à jour le