Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC) publiée le 30/01/2020

M. Yves Détraigne souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les conséquences économiques désastreuses pour le secteur de la vini-viticulture des menaces de taxation excessive que fait peser le président des États-Unis sur les biens européens destinés à l'exportation.

Le chef d'État français et le président américain se seraient mis d'accord pour donner une chance aux négociations afin de trouver une solution dans un cadre international et éviter une guerre commerciale qui ne serait bénéfique pour personne. Dans cet intervalle, il n'y aurait pas d'application de sanctions.

Ce conflit est étranger aux viticulteurs français et concerne une guerre commerciale qui implique d'autres secteurs. Sans attendre, l'Union européenne doit mettre en œuvre rapidement des programmes de promotion spécifiquement dédiés aux produits impactés par l'application de ces taxes. Elle doit également étudier des possibilités de recours aux mesures exceptionnelles de l'organisation commune des marchés agricoles pour compenser les pertes.

Ce secteur, de la vigne au négoce international, est un acteur majeur des territoires français, par son dynamisme économique, et un facteur d'équilibre des ruralités françaises dans toutes les régions. Aussi, et en attendant une solution européenne, il lui demande ce qu'il propose concrètement au niveau national afin de soutenir ces entreprises dans les difficultés qu'elles affrontent aujourd'hui et dans les nouveaux projets de développement qu'elles vont devoir entreprendre demain.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 26/03/2020

Les sanctions commerciales mises en œuvre par les États-Unis à l'encontre de l'Union européenne, à la suite de la décision du panel de l'organisation mondiale du commerce (OMC) en lien avec le différend entre Airbus et Boeing, sont entrées en vigueur le 18 octobre 2019. Pour les filières agricoles françaises, le principal impact porte sur les vins tranquilles, en deçà de 14°, conditionnés dans des contenants de moins de deux litres, auxquels est imposée une taxe ad valorem additionnelle de 25 %. Avec l'application de ces taxes additionnelles, ce sont toutes les régions viticoles françaises qui sont visées. Les exportations françaises des vins taxés vers les États-Unis ont représenté près d'1,1 Mds€ en 2018, soit 25 % de l'ensemble des exportations européennes de vins vers les États-Unis. Par ailleurs, le 2 décembre 2019, le représentant américain au commerce a proposé l'adoption de nouvelles mesures de sanctions commerciales en représailles à la taxe française sur les services numériques, incluant notamment les vins pétillants. Au cours de la consultation publique qui s'est déroulée aux États-Unis jusqu'au 14 janvier 2020, les commentaires formulés ont témoigné d'un faible soutien des parties prenantes intéressées à l'imposition de sanctions tarifaires. À la suite de nombreux échanges au mois de janvier 2020 entre les exécutifs français et américain, un accord a été trouvé à Davos en vertu duquel les États-Unis s'engagent à ne pas imposer de sanctions sur les exportations françaises à ce titre pendant que les négociations se poursuivent à l'organisation de coopération et de développement économique en vue de trouver un accord international. Le Gouvernement s'est fortement mobilisé depuis la mise en place des taxes additionnelles par les États-Unis, afin que les filières françaises soient le moins impactées possible. La France dénonce la mise en place des sanctions, et privilégie une solution concertée avec l'ensemble de ses partenaires européens afin de lever les sanctions. Le Gouvernement soutient ainsi résolument la Commission européenne dans le dialogue engagé avec les États-Unis, et la soutient également dans son message de fermeté sur les sanctions que l'Union européenne sera elle-même autorisée à imposer aux États-Unis dans le cas du contentieux visant Boeing, de manière ferme, proportionnée et conforme aux règles de l'OMC. S'agissant plus particulièrement de la filière viticole, un plan d'action a par ailleurs été élaboré afin de limiter et contrebalancer les risques de pertes sur le marché américain consécutives à ces mesures de rétorsion commerciales. Il comporte un volet européen et un volet national. Saisi par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, le commissaire européen à l'agriculture s'est d'ores et déjà engagé à permettre aux opérateurs de la filière viticole de bénéficier d'une plus grande flexibilité dans la mise en œuvre des mesures de promotion du programme national d'aide dédié au secteur viticole, financé par des fonds européens. Il s'agit notamment de donner la possibilité aux opérateurs qui le souhaitent de changer les marchés de destination de leurs opérations de promotion déjà approuvées, et de prolonger une opération de promotion au-delà de la limite actuelle fixée à cinq ans. Les textes ouvrent également la possibilité de payer les actions menées à terme même si l'ensemble de l'opération n'est pas terminé. Les textes ouvrant ces dérogations ont été votés le 15 janvier 2020 par les États membres et sont dans le circuit de validation au niveau européen. Les services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation travaillent à leur déclinaison au niveau national, afin de les rendre effectifs le plus rapidement possible après leur entrée en vigueur. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation se mobilise au surplus pour obtenir la mise en œuvre d'un fonds européen d'indemnisations pour les opérateurs touchés par les sanctions américaines. Cette demande a été officiellement portée par la France et l'Espagne au Conseil des ministres de l'agriculture de l'Union européenne du 16 décembre 2019 et des échanges à haut niveau sont en cours avec les services de la Commission européenne. Au niveau national, le Gouvernement prévoit des opérations collectives de promotion à l'export ainsi que le renforcement des actions « Business to Business » conduites par Business France. Pour ce faire, le budget dédié à la promotion « Business to Consumer » des vins français dans les pays tiers sera doublé : il s'élèvera à 1,3 M€ en 2020, contre 625 000 euros en 2019. Les entreprises dont le chiffre d'affaire est inférieur à 500 M€ et qui souhaitent diversifier leurs débouchés à l'export sont invitées à mobiliser les outils de soutien financier public à l'export délivrés par Bpifrance Assurance Export au nom et pour le compte de l'État, et en particulier à l'assurance-prospection, qui leur permet de s'ouvrir à de nouveaux marchés. Enfin, le Gouvernement met également en œuvre des mesures de droit commun (délais de paiement, remises gracieuses, etc.) pour les entreprises qui rencontreraient des difficultés financières liées aux sanctions commerciales américaines. Le Gouvernement reste mobilisé auprès de ses homologues européens comme sur le plan national pour accompagner la filière viticole et limiter l'impact de ces sanctions sur son fonctionnement.

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