Question de M. GREMILLET Daniel (Vosges - Les Républicains) publiée le 06/02/2020

M. Daniel Gremillet interroge Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur l'accès aux services bancaires en milieu rural.

L'industrie bancaire se transforme. Les fermetures d'agences se multiplient. En dix ans, les banques françaises ont fermé 5 % de leurs agences soit l'équivalent de 2 000 points de vente.

La perte d'un distributeur automatique de billets (DAB) sur un territoire est particulièrement mal vécue en zone rurale. De fait, elle s'accompagne de la baisse du chiffre d'affaires des petits commerces ; de la désertification des services ; de davantage d'isolement des plus fragiles (personnes âgées ou personnes à mobilité réduite).

Au surplus, elle contribue plus encore à l'éloignement, à la désertification rurale, au sentiment d'abandon et à la crainte de voir des territoires entier en perdition, alors même que les communes rurales, pourtant loin d'être majoritaires en termes de population, pèsent dans la dynamique économique française.

En effet, en milieu rural, les habitants peuvent être contraints à faire dix voire quinze kms pour retirer de l'argent liquide qu'ils habitent dans les communes de montagne à fort potentiel touristique ou en secteur de plaine en habitat dispersé. Par exemple, dans les Vosges, à Provenchère-sur-Fave, le DAB a disparu depuis septembre 2019. Dès lors, pour retirer de l'argent, les habitants sont obligés de faire six kilomètres pour aller au village voisin en voiture.

Certes, il existe, dorénavant, des systèmes de distribution d'espèces par les commerçants – « cash back » - mais ces services ne sont pas disponibles sur l'ensemble du territoire. De plus, certains commerces ne sont pas encore équipés de terminaux de paiements, soit en raison de leur coût prohibitifs, soit en raison d'un défaut de connexion numérique parce que situés en zone blanche malgré les efforts de déploiement en très haut débit.

Le 21 novembre 2018, le Sénat a adopté, en première lecture, à l'unanimité une proposition de loi visant à lutter contre la désertification bancaire dans les territoires ruraux et l'a transmise à l'Assemblée nationale. Ce texte n'a, depuis, pas été inscrit à l'ordre du jour des débats.

Le Sénat a principalement adopté des mesures visant à répondre aux enjeux en matière d'aménagement du territoire afin de pouvoir maintenir, garantir et pérenniser la présence des services rendus aux publics qu'ils soient privés ou publics voire parfois de les réinstaller afin de répondre aux besoins de la population, de garantir l'égal accès de tous quel que soit son lieu d'habitation aux services minimums et indispensables pour pouvoir vivre dignement avec sa famille.

Ainsi, le texte prévoit, d'une part, que le maire soit informé de tout projet de fermeture d'une succursale et des moyens mis en œuvre pour garantir la continuité de l'accès à son réseau pour ses clients et, d'autre part, que lorsqu'un établissement bancaire supprime un DAB dans un territoire à faible densité de population, il a l'obligation d'en ouvrir un nouveau dans un périmètre accessible en 15 minutes en voiture (sauf s'il en existe déjà au moins un dans ce rayon). D'autant que leur coût d'installation et de maintenance, représente plus de 100 000 euros par an, l'accès aux services financiers devenant une préoccupation en soi dans les zones rurales, les maires sont aujourd'hui contraints d'investir pour répondre aux besoins de leurs administrés.

Ainsi, fin 2018, la France métropolitaine comptait 52 697 distributeurs automatiques de billets, selon un rapport réalisé conjointement par la direction du Trésor, la Banque de France, les groupes bancaires. En un an, un millier de points de retrait ont ainsi disparu. Ainsi, il demande au Gouvernement de bien vouloir lui indiquer quelles sont les mesures qu'il entend prendre pour assurer le maintien des établissements bancaires en milieu rural.

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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la relance


Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 27/08/2020

Le Gouvernement partage les préoccupations des sénateurs concernant la désertification bancaire et les difficultés d'accès aux espèces dans certains territoires. Cependant, il ressort que le rapport du groupe de travail sur l'accessibilité aux espèces publié en juillet 2019 confirme globalement une très bonne accessibilité aux espèces, par le biais d'un réseau de près de 53 000 distributeurs automatiques de billets et de plus de 23 000 points de distribution d'espèces, par exemple chez des commerçants ou des débitants de tabac : 98,9 % de la population âgée de 15 ans et plus réside soit dans une commune équipée d'au moins un distributeur, soit dans une commune située à moins de quinze minutes en voiture de la commune équipée la plus proche ; en moyenne, un habitant résidant dans une commune non équipée d'un automate est à huit minutes en voiture de la commune équipée la plus proche ; en prenant en compte l'ensemble des points d'accès, 0,1 % de la population (soit 34 268 personnes âgées de 15 ans et plus) se situe à plus de 15 minutes d'un point de délivrance d'espèces. Depuis 2015, une très légère baisse du nombre de distributeurs a été observée, traduisant principalement une optimisation des installations existantes, majoritairement dans les zones urbaines et péri-urbaines, communes de plus de 10 000 habitants, ayant un fort taux d'équipement, sans dégradation de l'accès aux espèces. Cette baisse résulte d'un double mouvement de fermetures de certains distributeurs très peu utilisés et d'ouverture de nouveaux distributeurs (notamment dans 131 communes préalablement non équipées), ce qui témoigne de l'adaptation du réseau de distributeurs aux besoins des territoires. Dans ce contexte, comme indiqué dans la question écrite, il peut être rappelé l'importance du service de « cash back » qui permet un rendu d'espèces complémentaires à un achat à la demande du client auprès des commerçants qui le proposent. Le contexte fortement évolutif des usages des moyens de paiement demandera une attention particulière au cours des années à venir, afin de continuer de garantir à tous et partout l'accessibilité aux espèces, et de préserver la liberté de choix du moyen de paiement, en particulier pour les populations fragiles ou habitant en milieu rural. En revanche, obliger les acteurs bancaires à implanter des agences bancaires en zones rurales serait inapproprié voire juridiquement impossible. Une telle obligation occasionnerait une compensation pour ne pas se heurter au principe d'égalité devant les charges publiques et au principe constitutionnel de libre entreprise, et, partant, induirait des coûts budgétaires. Elle provoquerait des effets d'aubaine importants compte tenu de la capillarité actuelle des réseaux, et ce alors même que des solutions privées répondent aujourd'hui efficacement aux besoins.

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