Question de M. JOLY Patrice (Nièvre - SOCR) publiée le 05/03/2020

M. Patrice Joly attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur les inquiétudes des représentants des grandes organisations et des fédérations de l'aide à domicile concernant le calendrier incertain du projet de loi relatif au grand âge et à l'autonomie.

Le 30 janvier 2018 et pendant plus de six mois, tous les acteurs accompagnant les personnes âgées n'ont eu de cesse de dénoncer les moyens humains et financiers manquants, ainsi que les effets délétères de la réforme de la tarification introduite par la loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement.

Une loi était annoncée pour l'automne 2019. Les enjeux sont cruciaux et connus de tous : la part des seniors va augmenter et le vieillissement de la population va s'accentuer en raison de l'entrée des baby-boomers dans des âges avancés. La question de la prise en charge de la dépendance des personnes âgées se pose donc avec une réelle acuité.

Deux ans après un mouvement social d'ampleur dans les établissements et les services d'aide à domicile pour les personnes âgées, les professionnels restent très inquiets et sont en attente de la mise en œuvre de mesures concrètes, d'un calendrier stable et d'une réforme lisible, coordonnée et financée. Aussi, il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement en la matière.

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Transmise au Ministère des solidarités et de la santé


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles publiée le 20/01/2021

Réponse apportée en séance publique le 19/01/2021

Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Joly, auteur de la question n° 1159, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Patrice Joly. Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite vous relayer les inquiétudes des représentants des grandes organisations et fédérations de l'aide à domicile concernant le calendrier incertain du projet de loi relatif au grand âge et à l'autonomie.

Comment, pour commencer, ne pas rappeler la forte mobilisation des acteurs accompagnant les personnes âgées, le 30 janvier 2018, pour exprimer leur malaise ? Ce fut leur manière de dénoncer les moyens humains et financiers manquants, ainsi que les effets délétères de la réforme de la tarification de 2015.

Depuis lors, un rapport comportant plus de 175 propositions visant à refonder la prise en charge des personnes âgées en perte d'autonomie a été remis, en mars 2019, à la ministre des solidarités et de la santé. La mission sur l'attractivité des métiers du grand âge et de l'autonomie a pour sa part rendu ses conclusions, dans un rapport portant « plan de mobilisation nationale en faveur de l'attractivité des métiers du grand âge », en octobre 2019. Ces deux rapports ont mis en exergue la nécessité de mener une réflexion réelle sur les métiers du grand âge, leurs qualifications, diplômes, statuts et rémunérations, ainsi que sur les formations préparant à ces métiers.

Comme vous le savez, les directeurs d'Ehpad ont des difficultés à recruter des personnels qualifiés et se retrouvent à devoir embaucher des encadrants non diplômés, qui apprennent leur métier sur le terrain, sans suivre de formation théorique et sans obtenir de qualification professionnelle reconnue. Ces employés – majoritairement des femmes – se retrouvent cantonnés dans des postes à faible rémunération, sans possibilité d'évolution, ce qui rend ces emplois peu attractifs.

Les enjeux sont cruciaux et connus de tous. La problématique du vieillissement de la population devient plus aiguë en raison de l'arrivée des baby-boomers à des âges avancés. La prise en charge de la dépendance des personnes âgées se pose donc avec une plus grande acuité.

Trois ans après un mouvement social d'ampleur dans les établissements et les services d'aide à domicile pour les personnes âgées, les professionnels restent très inquiets et attendent la mise en œuvre de mesures concrètes, d'un calendrier stable et d'une réforme lisible, coordonnée et financée. Une loi était annoncée pour l'automne 2019 ; elle est désormais repoussée, éventuellement à l'été 2021, selon Mme Bourguignon, ministre déléguée chargée de l'autonomie. Le Président Emmanuel Macron ne l'a d'ailleurs pas mentionnée parmi ses priorités lors de ses vœux aux Français le 31 décembre dernier, ce qui était surprenant. Aussi, je souhaite connaître les intentions du Gouvernement en la matière.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles. Monsieur le sénateur Patrice Joly, vous m'interrogez sur le calendrier gouvernemental en matière de prévention et de soutien à l'autonomie et au grand âge. Ce calendrier, vous le connaissez : il a déjà débuté et il est bien entamé. De nombreuses concertations se sont déjà tenues, sur des questions organisationnelles ; on peut citer le rapport Libault sur le renforcement de l'attractivité des métiers du grand âge, mais aussi le rapport de Myriam El Khomri et de nombreux autres.

Ces rapports ont connu deux premières traductions, en attendant la réforme globale sur laquelle nous travaillons. Le projet de loi Grand Âge et autonomie fait partie de cette réforme ; il sera examiné dès que nous aurons surmonté cette crise sanitaire.

C'est dans cet esprit qu'ont été adoptées la loi relative à la dette sociale et à l'autonomie ainsi que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, qui contenait un certain nombre de dispositions en la matière. Il y a déjà eu des avancées majeures : la première d'entre elles est la création de la cinquième branche de la sécurité sociale, pour la protection du risque de perte d'autonomie. C'est une première étape essentielle pour la concrétisation de notre ambition en la matière, mais notre ambition ne s'arrête pas là.

Le défi démographique bat son plein ; nous avons à cœur de faire vivre de nouvelles solidarités. Pour leur donner corps, il nous faut repenser l'accueil de nos concitoyens en perte d'autonomie, comme ils le demandent eux-mêmes. Il faut répondre à leur attente de mieux vivre, que ce soit chez eux ou dans un établissement en phase avec leurs aspirations. Pour cela, il faut à la fois des lieux adaptés et des personnes pour y travailler. Nous avons œuvré sur ces deux sujets.

Le plan de relance vient financer la rénovation de près de 30 000 places dans les établissements. Le Ségur de la santé vient quant à lui rehausser le salaire des professionnels en Ehpad d'un montant minimum de 160 à 185 euros nets par mois.

Les professionnels du domicile ne sont pas en reste. Le point d'indice a enfin été dégelé, et le Gouvernement a décidé d'accompagner le financement de la revalorisation des salaires des aides à domicile, qui dépendent normalement des seuls départements. Ainsi, 200 millions d'euros sont mobilisés chaque année par l'État, en plus de ce que les conseils départementaux apporteront eux-mêmes.

Les besoins sont majeurs ; la crise les a mis en relief un peu plus encore. Elle mobilise pleinement Olivier Véran et Brigitte Bourguignon, qui travaillent activement à la fois sur la protection de nos aînés face à la crise sanitaire et sur le projet de soutien à l'autonomie que nous développons. Notre priorité est de faire face à la crise, mais nous continuons et continuerons de porter notre ambition par tous les moyens, tant que cette crise ne sera pas pleinement jugulée.

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