Question de M. CAPO-CANELLAS Vincent (Seine-Saint-Denis - UC) publiée le 26/03/2020

Question posée en séance publique le 25/03/2020

M. Vincent Capo-Canellas. Ma question a trait à l'agriculture.

Hier, les marchés ont été interdits, dans des conditions qui peuvent d'ailleurs faire débat. Pour compenser le manque à gagner, le ministre de l'économie a enjoint la grande distribution – on peut être d'accord avec lui sur ce point – à acheter des produits français.

Dans le même temps, nous savons que, du fait de la fermeture des frontières, l'agriculture va manquer de saisonniers au cours des mois à venir. Environ 200 000 d'entre eux feront défaut, d'après la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles), et c'est là un enjeu considérable auquel nous devons faire face.

Dans ce contexte, le ministre de l'agriculture a lancé hier un vibrant appel aux Français pour que, lorsqu'ils sont sans activité, ils aillent travailler dans les champs. Cette déclaration a d'abord suscité l'incompréhension : alors que les mesures de confinement viennent d'être renforcées, comment des centaines de milliers de personnes pourraient-elles rejoindre les campagnes pour prêter main-forte aux agriculteurs ? Pourtant, l'appel semble avoir été entendu, puisque plus de 40 000 personnes se seraient déjà portées volontaires.

Hier soir, tard, le Gouvernement a annoncé par communiqué la création d'une plateforme dédiée.

Dès lors, plusieurs questions se posent : comment ce dispositif va-t-il fonctionner, en particulier dans quelles conditions sanitaires ? Si la mobilisation est insuffisante, comment notre agriculture pourra-t-elle continuer de répondre à la demande ? N'y a-t-il pas un risque de pénurie ?

Ce sont des questions légitimes que se posent nos agriculteurs et les Français.


Réponse du Ministère du travail publiée le 26/03/2020

Réponse apportée en séance publique le 25/03/2020

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail.

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Oui, monsieur le sénateur Capo-Canellas, ce sujet est très important ! La santé est notre priorité à tous. Garantir une alimentation de qualité dans les semaines et les mois à venir est essentiel.

C'est le printemps, période des premières récoltes et des semis pour l'automne. C'est pourquoi, depuis quelques jours, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, le ministre de l'économie et des finances et moi-même travaillons avec les professionnels du secteur pour faire face, ensemble, à la situation que vous décrivez. Effectivement, ce sont 200 000 saisonniers qui doivent être employés dans les semaines à venir ; sur cet effectif, on dénombrait par le passé 70 000 travailleurs détachés.

Nous avons donc prévu trois mesures.

Premièrement, d'ici à la fin de la semaine, mon ministère établira, en collaboration avec les professionnels du secteur, un guide des bonnes pratiques en matière de santé et de sécurité, afin que les travailleurs saisonniers et employés du secteur agricole soient certains de travailler sans risque pour leur santé.

Deuxièmement, nous avons lancé une plateforme commune à Pôle emploi et à la FNSEA afin de collecter toutes les offres et les demandes. Nous ferons ensemble un point journalier, département par département, avec l'objectif de pourvoir tous les emplois.

Troisièmement, nous avons décidé – l'annonce a été faite ce matin dans le cadre de la présentation des ordonnances faisant suite à la loi d'urgence sanitaire – d'autoriser le cumul entre chômage partiel et activité agricole saisonnière pour les semaines à venir. Une personne qui ne travaille plus, parce que son entreprise a fermé ou son activité a cessé, pourra venir en renfort dans les champs, bien sûr de façon volontaire, pour aider les agriculteurs, en cumulant le bénéfice du chômage partiel et la rémunération liée à son contrat de travail dans le secteur agricole.

Nous faisons de même dans le cadre du mécanisme de solidarité mis en place pour les indépendants. Un indépendant empêché d'exercer son activité – je pense, par exemple, aux restaurants ou aux bars qui ont ferm頖 pourra aussi prêter main-forte, en cumulant l'indemnité de 1 500 euros tirée du fonds de solidarité et la rémunération liée au contrat de travail dans l'agriculture.

En matière de santé, nous sommes tous sur le pont ; nous devons l'être, aussi, pour l'alimentation ! Je me réjouis donc du travail que nous menons actuellement avec tous les professionnels sur ce sujet.

M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour la réplique.

M. Vincent Capo-Canellas. Je vous remercie de ces éléments de réponse, madame la ministre. Trois questions restent néanmoins en suspens.

D'un point de vue sanitaire, comment le comité scientifique appréciera-t-il ces mesures ?

Sous l'angle économique, s'il n'y a pas assez de main-d'œuvre, la question de la pénurie pourra ressurgir.

Enfin, à plus long terme, ne faut-il pas envisager des mesures de soutien plus spécifiques au secteur agricole, sachant que certaines de ses filières sont particulièrement touchées et que les mesures économiques que nous avons adoptées jusqu'à présent sont relativement générales ? Je pense notamment aux mesures concernant le chômage partiel ou les heures supplémentaires, qui ne touchent pas forcément beaucoup le secteur agricole.

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