Question de Mme BORIES Pascale (Gard - Les Républicains) publiée le 05/03/2020

Mme Pascale Bories attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la reconnaissance de l'accouchement à domicile (AAD) par les politiques de santé publique.
Depuis la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, la souscription à une assurance responsabilité civile professionnelle (RCP) pour tous les acteurs de la santé est rendue obligatoire. Concernant les sages-femmes libérales pratiquant l'AAD, beaucoup d'assureurs ont gonflé les prix tout en excluant les activités à « haut risque de litige ». Avec leur salaire insuffisant, les sages-femmes ne sont pas en mesure de s'assurer. Dans ce contexte, les sages-femmes ont vu progressivement les assureurs exclure de leur contrat la pratique des AAD. Face à l'impossibilité de se souscrire à une assurance RCP, le nombre de sages-femmes accompagnant les naissances à domicile baisse considérablement. Cette baisse engendre de fait la hausse inquiétante des accouchements non accompagnés (ANA), accroissant les dangers et risques pour la mère et l'enfant.
De plus, conformément à la Convention européenne des droits de l'homme, les conditions dans lesquelles on donne la vie font indéniablement partie intégrante de la vie privée d'une personne aux fins de l'article 8 relatif au respect de la vie privée et familiale (Ternovszky c. Hongrie, § 22). Dans l'affaire citée, la Cour européenne des droits de l'homme a constaté que la requérante n'était pas libre de choisir d'accoucher à domicile en raison notamment de l'absence de législation spécifique et complète en la matière. Elle a toutefois rappelé que les autorités nationales disposent d'une large marge d'appréciation dans les affaires qui mettent en jeu des questions complexes de politique de santé et d'affectation de ressources.
La Cour européenne des droits de l'homme estime donc que les États membres doivent prévoir une législation permettant aux parents qui font le choix d'un accouchement à domicile d'être accompagnés par des professionnels de santé.
Les professionnels demandent que l'État intervienne pour que soit trouvée une solution à la problématique de l'assurance RCP et que le Gouvernement demande aux agences régionales de santé (ARS) d'intégrer l'offre AAD aux réseaux de santé périnataux.
En conséquence, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer s'il entend intégrer cette pratique dans l'offre publique de soins afin de permettre l'exercice du libre choix du patient tel que prévu par le code de la santé publique.

- page 1113


Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 16/04/2020

Moins de 1 % des naissances ont eu lieu hors d'une structure de soins en 2016. Ce pourcentage concerne à la fois les accouchements survenus de façon inopinée hors structure hospitalière et les accouchements à domicile souhaités par les parturientes, ce qui confirme le caractère marginal de ces dernières situations en France. Cette situation s'explique par l'effort important fait depuis plusieurs décennies dans notre pays pour sécuriser la naissance et réduire la mortalité maternelle et néonatale susceptible de survenir à cette occasion. Cette politique, appuyée sur la publication de décrets réglementant l'activité d'obstétrique et de plans périnatalité successifs, a porté ses fruits puisque la mortalité maternelle par exemple, qui s'élevait à 13,2 pour cent-mille femmes en 1996, s'établit aujourd'hui à un taux de 10,3. Cette préoccupation de sécurisation de la naissance continue d'animer la politique gouvernementale actuelle, dans un contexte où les indicateurs de morbi mortalité périnatale sont en stagnation depuis plusieurs années en France et placent notre pays derrière les autres pays européens, comme en témoignent les dernières données de l'enquête Européristat. Aussi la politique gouvernementale s'attache-t-elle à conforter la place et les conditions de fonctionnement des établissements de santé autorisés à l'activité d'obstétrique, au travers d'un nouveau régime d'autorisation de cette activité qui devrait intervenir d'ici à fin 2020. La demande d'une frange de la population d'avoir accès à un cadre « alternatif » de réalisation des accouchements a toutefois été entendue au travers de l'expérimentation des maisons de naissance, conduite depuis 2013 et traduite par la création de huit maisons. Ces structures, qui organisent la prise en charge des parturientes en dehors d'un cadre hospitalier et dont le fonctionnement repose exclusivement sur des sages-femmes, libérales ou salariées, sont une forme de réponse à ces demandes, tout en garantissant la qualité et la sécurité des prises en charge indispensables pour ces parturientes. Après un travail d'analyse des résultats obtenus par les maisons de naissance, qui donnera prochainement lieu à la diffusion au parlement d'un rapport d'évaluation, le Gouvernement considère que cette expérimentation est globalement positive et qu'elle apporte une offre complémentaire dans le paysage actuel de l'offre de soins de périnatalité pour les femmes potentiellement éligibles et souhaitant ce type de prise en charge. En conséquence, des travaux vont être engagés pour sécuriser et pérenniser l'offre existante en prenant en compte les résultats de cette évaluation et dans le but de garantir le maintien de la qualité et de la sécurité des soins ainsi que d'améliorer l'efficience du dispositif.

- page 1813

Page mise à jour le