Question de M. JACQUIN Olivier (Meurthe-et-Moselle - SOCR) publiée le 05/03/2020

M. Olivier Jacquin attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les nouvelles règles concernant les exploitants agricoles relativement au gazole non routier (GNR).

Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2020, les députés ont adopté un amendement qui porte une atteinte grave aux principes actuels d'utilisation du GNR détaxé sous condition d'emploi dans l'agriculture, la forêt, les espaces naturels et le secteur du paysage.

Cet amendement prévoit principalement trois mesures aux conséquences désastreuses pour les exploitants agricoles :
La première consiste dans un renforcement des modalités de contrôle et des sanctions concernant l'utilisation du GNR sous condition d'emploi. Or, un dispositif important est déjà en place pour assurer le respect du différentiel de taxation entre le gazole et le GNR sous condition d'emploi, lequel permet de prévenir la fraude par des sanctions déjà très lourdes.

La deuxième est relative à la création d'un gazole d'une couleur nouvelle pour les activités de travaux publics durant une période transitoire de dix-huit mois. En plus de la complexité de mise en œuvre, cette mesure sera immanquablement génératrice de coûts pour les agricultures, les forestiers, les entrepreneurs de travaux, les coopératives d'utilisation de matériel agricole (CUMA) et les entreprises du paysage. En effet, ces entreprises qui pourraient se livrer occasionnellement à la réalisation de travaux dits « publics » devront s'équiper de cuves à même de stocker un gazole d'une nouvelle couleur réservé au secteur des travaux publics. La même contrainte pèsera aussi sur les distributeurs qui sauront en répercuter les coûts quand ils n'en refuseront pas la livraison. Et ces investissements seront réalisés pour dix-huit mois seulement, puisqu'au premier janvier 2022 la taxation de droit commun du gazole s'imposera au secteur des travaux publics : les vols de carburant sur les chantiers ne sauraient justifier une telle « usine à gaz » !

La troisième mesure consiste dans le principe de l'établissement d'une liste d'engins et matériels, typés « travaux publics », qui devront utiliser ce nouveau carburant. Il s'agit de la mesure la plus préjudiciable puisque cette liste ne permettrait pas la distinction entre un même engin qui serait utilisé dans des cadres très différents. Les agriculteurs détiennent plus de chargeurs télescopiques que le secteur des travaux publics et les utilisent davantage tout au long de l'année. Les élagueuses sont fréquemment montées sur les tracteurs agricoles, il est difficile d'admettre qu'ils ne puissent utiliser du GNR, de même pour les centaines de pelleteuses à chenille que possèdent les forestiers pour leurs propres besoins ou celles utilisées pour les travaux ruraux tel le curage de fossés et lagunes. Les entrepreneurs du paysage sont les principaux utilisateurs des broyeuses de végétaux qui ne sont pas utilisées par les entreprises du bâtiment et des travaux publics et sont pourtant concernées.

Les spécificités du secteur agricole sont telles que l'application pure et simple de ces mesures va entraîner une nouvelle complexité administrative, une difficulté de mise en œuvre et de contrôle, de nombreux contentieux et surtout des hausses de charges injustifiées.

C'est pourquoi il lui demande de revenir sur l'application de ces mesures pour l'ensemble des matériels agricoles et pour toutes les catégories de matériels utilisés à la fois dans les travaux publics et dans les travaux agricoles ou forestiers dans l'arrêté à venir. Il lui demande également le report au 31 décembre 2020 de l'application des autres dispositions prévues par le nouveau texte afin de donner le temps aux entreprises de mettre en œuvre les nouvelles obligations créées (nouveau registre des travaux non agricoles ou forestiers, équipement en cuves…) et d'associer les représentants agricoles à tous les travaux préparatoires.

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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la relance


Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 24/06/2021

La suppression du tarif réduit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) applicable au gazole non routier (GNR) prévue par la loi de finances pour 2020 s'inscrit dans la volonté du Gouvernement de rationaliser la fiscalité nationale en supprimant les niches fiscales qui n'apparaissent pas justifiées du point de vue économique. Une mise en œuvre progressive sur trois ans était initialement prévue, échelonnée aux 1er juillet 2020, 1er janvier 2021 et 1er janvier 2022. Face aux premières difficultés rencontrées par les entreprises dans le contexte actuel, l'article 6 de la loi n° 2020-935 de finances rectificative pour 2020 a reporté au 1er juillet 2021 l'entrée en vigueur de cette mesure. Compte tenu du contexte économique et des difficultés que rencontrent actuellement les acteurs du bâtiment et des travaux publics (BTP) du fait des tensions constatées dans l'approvisionnement des matières premières, le Gouvernement a décidé de proposer au Parlement le report au 1er janvier 2023 de l'entrée en vigueur de cette réforme, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2021. Cependant, lors de la première lecture du PLFR à l'Assemblée nationale, un amendement a été adopté avançant le report au 1er juillet 2022.

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