Question de M. LOZACH Jean-Jacques (Creuse - SOCR) publiée le 19/03/2020

M. Jean-Jacques Lozach attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la carte de paiement de l'allocation pour demandeur d'asile (ADA).

Les conditions de versement de l'ADA ont évolué à compter du 5 novembre 2019. Alors que cette allocation était depuis 2016 versée mensuellement par alimentation d'une carte de retrait, le décret n° 2018-1359 du 28 décembre 2018 a modifié l'article D. 744-33 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) afin de prévoir désormais le versement de l'ADA sur une carte de paiement.

Cette dernière ne permet plus le retrait d'argent liquide, excepté en cash-back, une solution peu répandue dans les petits commerces des territoires ruraux qui ne disposent de surcroît pas tous de terminaux de paiement.

Par ailleurs, les titulaires de la carte ne pourront effectuer que vingt-cinq transactions par mois sans frais, chaque opération effectuée au delà de ce seuil étant facturée 50 centimes d'euros supplémentaires.

Alors que de menues dépenses se règlent encore en espèces (alimentation, accès aux lignes intercommunales, participation à la vie associative locale, sorties scolaires…), cette mesure entrave fortement la mobilité et la consommation des demandeurs d'asile et de leurs familles. Elle constitue un frein à leur insertion et ralentit le développement économique local.

L'absence d'un numéro de téléphone gratuit pour consulter un solde, faire opposition ou déclarer un incident technique est également un obstacle.

Enfin, de nombreuses associations font état de difficultés importantes pour leurs bénévoles dans la collecte de la participation financière demandée à ce public.

Il lui demande si le Gouvernement envisage de revenir au précédent système de carte, ou si des améliorations pourraient être déployées afin de lutter plus efficacement contre la précarité et la restriction des libertés des demandeurs d'asile et de leurs familles.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 10/09/2020

La mise en place d'une carte de paiement, sans possibilité de retrait, permet, en limitant la circulation d'argent liquide, d'éviter que l'allocation pour demandeur d'asile serve à d'autres fins que celles d'assurer la subsistance du demandeur d'asile, au moyen de dépenses courantes sur le territoire national. Ce faisant, les risques de fraudes et d'abus, liés à une trop grande liquidité de l'allocation, seront mieux maîtrisés. Avant sa généralisation au territoire métropolitain, cette mesure a fait l'objet d'une expérimentation durant plusieurs mois en Guyane : les retours ont été positifs et ont montré que la mise en place d'une carte de paiement en lieu et place d'une carte de retrait ne dégradait en rien les conditions de vie des demandeurs d'asile. En outre, le Gouvernement est à l'écoute des associations qui ont été reçues au ministère de l'intérieur et qui participent à un comité de suivi de la réforme pour garantir que celle-ci ne génère pas de difficulté. L'entrée en vigueur de la mesure, initialement prévue en septembre 2019, a été retardée afin de permettre aux opérateurs qui en étaient dépourvus de s'équiper de terminaux de paiement électronique (TPE) et d'assurer une information appropriée des demandeurs. De surcroît, un aménagement important du dispositif a été consenti avec le déplafonnement total du nombre de transactions autorisées. De la sorte, quel que soit le montant de leur transaction, les demandeurs d'asile peuvent continuer à acheter leurs produits de première nécessité dans les supermarchés et les commerces dotés de TPE. Le bilan réalisé par l'office français de l'immigration et de l'intégration a d'ailleurs confirmé la possibilité, pour les demandeurs d'asile, de procéder à de petits achats avec une carte « 100 % paiement », 44 % des transactions ayant porté sur un montant inférieur à 10 € en novembre 2019. De la même manière, alors que les associations craignaient que les demandeurs d'asile hébergés dans des zones rurales moins bien pourvues en commerces ne puissent disposer librement de leur allocation, il ressort de ce bilan que la carte de paiement a été largement utilisée sur l'ensemble du territoire métropolitain, selon une répartition régionale correspondant à celle des allocataires. Enfin, la démonétisation ne méconnaît pas le fait que l'accès des demandeurs d'asile aux espèces demeure utile dans leur vie quotidienne. Ainsi, la pratique du cashback, qui est réservée aux seuls commerçants par le code monétaire et financier (ce qui limite de facto le risque d'abus), permet de récupérer jusqu'à 60 euros en espèces dans le cadre d'un paiement par carte d'un euro minimum. La mise en œuvre de cette mesure continue de faire l'objet d'un suivi attentif. Un groupe de travail réunissant des associations d'horizons divers accompagnant les demandeurs d'asile a été mis en place. Il suit avec attention la mise en œuvre de cette mesure. Le cas échéant, le dispositif pourra être adapté de façon à résoudre les difficultés opérationnelles qui pourraient être signalées.

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