Question de Mme FILLEUL Martine (Nord - SOCR) publiée le 09/04/2020

Mme Martine Filleul attire l'attention de M. le ministre de la culture sur la situation des écoles nationales supérieures d'architecture et de paysage (ENSA et ENSAP) à la suite de leur réforme de février 2018.

La réforme avait pour objet de réformer le statut de ces écoles ; le but était d'accroître leur autonomie scientifique et pédagogique, de leur déléguer le recrutement des enseignants et d'encourager l'indépendance des enseignants en leur accordant le statut d'enseignant-chercheur.

Plutôt bien accueillie par le milieu au démarrage, l'application de la réforme a laissé place à l'amertume et la colère. En effet, l'absence de moyens entrave considérablement l'accomplissement de la réforme.

Afin de mettre fin aux grèves administratives, de rétablir la confiance avec les professionnels et de permettre la bonne mise en œuvre de la réforme, elle souhaite connaître les mesures que le Gouvernement compte mettre en place.

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Transmise au Ministère de la culture


Réponse du Ministère de la culture publiée le 27/08/2020

La publication, en 2018, de cinq décrets relatifs notamment aux écoles nationales supérieures d'architecture et de paysage (ENSA-P) et au statut de leurs enseignants-chercheurs a représenté l'aboutissement de plusieurs années de concertation sur la réforme des écoles et sur l'enseignement en architecture. Ces réflexions avaient donné lieu au rapport de MM. Vincent Feltesse et Jean-Pierre Duport issu de la concertation sur l'enseignement supérieur et la recherche en architecture (2013) et au rapport conjoint des inspections générales des affaires culturelles et de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (« Une nouvelle ambition pour la recherche en architecture » - 2014). En 2015, la Stratégie nationale pour l'architecture, notamment dans son axe C (« Articuler formation-recherche-métiers et rapprocher les univers professionnels de l'architecture, de la construction et du cadre de vie ») avait repris une partie des propositions de ces rapports. Inspirée par la volonté de consolider la place de l'enseignement de l'architecture dans le paysage national de l'enseignement supérieur et de la recherche, la réforme de 2018 s'est inscrite dans un mouvement de convergence des ENSA-P vers le modèle universitaire, illustré par l'inscription de leur cursus dans le modèle LMD, leur participation à la plateforme Admission Post Bac (remplacée par ParcourSup), leur accréditation conjointe par les ministères chargés de la culture et de l'enseignement supérieur et leur participation active aux politiques de sites universitaires. La réforme a permis de mettre en place plusieurs avancées concrètes. Concernant les enseignants en architecture, la réforme a institué deux nouveaux corps d'enseignants-chercheurs (les professeurs et les maîtres de conférences des ENSA-P), dont les obligations statutaires incluent désormais une mission de recherche. Avec la création du Conseil national des enseignants-chercheurs des écoles nationales supérieures d'architecture (CNECEA), la réforme statutaire a permis d'instaurer une procédure de qualification nationale propre aux enseignants-chercheurs en architecture, identique à celle qui existe dans les universités, qui consacre le principe d'évaluation par les pairs. Pour la première session de qualification en 2018-2019, le CNECEA a examiné 1 137 dossiers de candidats et en a qualifié un total de 602. Depuis la réforme, le recrutement est assuré, selon les profils définis par les établissements eux-mêmes, par des comités de sélection dont la composition est définie par les enseignants-chercheurs présents dans les conseils pédagogiques et scientifiques des ENSA-P. Pour leur première année de fonctionnement en 2019, les comités de sélection des 20 ENSA-P ont examiné les candidatures de 1 855 candidats. Les comités de sélection ont choisi d'en classer 423. Les 112 lauréats définitifs (29 professeurs et 83 maîtres de conférences) ont été titularisés au 1er septembre 2019. Par ailleurs, la réforme a permis de faire figurer dans le code de l'éducation l'autonomie scientifique, pédagogique, administrative et financière des ENSA-P. Elle a renforcé l'ancrage territorial, académique et professionnel des vingt écoles nationales supérieures d'architecture et de paysage, en ouvrant la composition de leurs conseils d'administration aux acteurs locaux (métropole, région, regroupement universitaire, ordre régional des architectes). Elle a également confié à ces établissements une mission d'expertise des politiques publiques de l'architecture, du patrimoine, de l'urbanisme et du paysage, afin de renouveler le dialogue avec les collectivités territoriales sur l'ensemble des défis sociétaux actuels. Du point de vue des moyens, la réforme s'appuie sur un plan pluriannuel de renforcement des personnels enseignants des ENSA-P. Ce plan vise d'une part, en lien avec le ministère chargé de l'enseignement supérieur, à créer des postes d'enseignants-chercheurs en architecture afin notamment de renforcer le potentiel de recherche des écoles, d'autre part à modifier la composition du corps enseignant dans les ENSA-P afin d'atteindre 80 % d'enseignants « statutaires » (enseignants-chercheurs et enseignants associés) et 20 % d'intervenants extérieurs et d'enseignants contractuels. Toutefois, depuis la fin de l'année 2019, les ENSA-P ont fait état de dysfonctionnements en matière notamment de fonctionnement des instances ou de développement de la recherche, qui empêcheraient certains volets clés de la réforme de 2018 de se déployer. En réponse à ces interrogations, les directeurs et directrices des ENSA-P ont été reçus en février dernier par le cabinet du ministre de la culture, mais également par le directeur général des patrimoines et par la directrice de l'architecture, adjointe au directeur général des patrimoines. Dans un courrier du 4 mars 2020 adressé aux directeurs et aux présidents des conseils d'administration des ENSA-P, le ministre a annoncé que les postes administratifs vacants dans les écoles seraient immédiatement pourvus, en complément de ceux déjà publiés en 2019 ou ouverts aux concours pour 2020. En outre, le ministère a autorisé la publication du recrutement d'enseignants-chercheurs à hauteur de 149 nouveaux postes pour la rentrée 2020. Dans un courrier précédemment adressé aux directeurs et directrices des ENSA-P, la directrice de l'architecture a également proposé aux établissements et à leurs différentes communautés une approche en trois temps. À court terme, le ministère de la culture a pu apporter une solution à la situation des maîtres de conférences associés pour lesquels des arriérés de paiement avaient été constatés. Concernant les postes administratifs vacants, les services du ministère ont identifié les besoins prioritaires des écoles et travaillent à leur publication, en cohérence avec les plafonds d'emplois notifiés pour 2020 au niveau de l'ensemble des ENSA-P. Enfin, le service de l'architecture a préparé activement la seconde campagne de recrutement des enseignants-chercheurs, avec un nombre de postes autorisés à la publication fixé à un maximum de 149. La campagne de recrutement s'effectuera en juin 2020. A moyen terme, une mission d'inspection a été demandée à l'IGAC pour faire un bilan d'étape de la réforme, en le plaçant dans une perspective d'ensemble sur les enjeux de l'enseignement supérieur du ministère de la culture. Cette mission permettra notamment d'aborder les questions de moyens alloués aux ENSA-P. Enfin, le ministère de la culture a annoncé l'ouverture d'une réflexion plus large sur l'avenir de l'architecture, de la profession d'architecte et de l'ensemble des métiers de l'architecture, en lien avec la formation et la recherche. Cette réflexion correspond au travail prospectif que les signataires du courrier collectif de décembre 2019 appellent de leurs vœux. Elle permettra de mieux préciser les attentes vis-à-vis de l'enseignement et de la recherche en architecture, dans un contexte qui a évolué par rapport à celui qui avait présidé à la réforme de 2018. Elle pourra prendre en compte notamment l'évolution du cadre institutionnel dans lequel s'inscrivent les ENSA-P (politiques de sites universitaires), les priorités scientifiques de l'État qui seront inscrites dans le projet de loi de programmation de la recherche, ainsi que les enseignements qui seront tirés de la crise sanitaire actuelle en matière d'architecture, de logement ou d'urbanisme.

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