Question de M. OUZOULIAS Pierre (Hauts-de-Seine - CRCE) publiée le 16/04/2020

M. Pierre Ouzoulias interroge Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sur les moyens budgétaires supplémentaires demandés par les équipes de recherche qui travaillent sur les virus.
Pour la recherche sur ces macromolécules biologiques, la cryo-microscopie électronique est devenue une méthode d'approche indispensable. Les instruments qui mettent en œuvre cette technologie permettent d'observer, avec une résolution de deux à trois ångström, la structure moléculaire du virus et notamment celle de son enveloppe, ce qui est déterminant pour développer des moyens thérapeutiques contre leur diffusion.
Plusieurs équipes de recherche du sud-est de la France, très investies dans le domaine des macromolécules biologiques, comme celle de l'UMR 7257 basée sur le campus de Luminy à Marseille, ont déposé, à plusieurs reprises depuis 2016, des demandes pour l'acquisition d'un instrument de ce type. Considérée comme prioritaire par les tutelles administratives de ces unités, cette demande n'a pu être honorée, par impéritie budgétaire.
Le 6 avril 2020, lors de l'audition de la ministre chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche par la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat, il lui avait rappelé cette demande et la nécessité de la satisfaire pour développer l'effort de recherche nationale sur le coronavirus.
La ministre chargée de l'enseignement supérieur et de la recherche lui avait répondu qu'un équipement similaire était déjà à disposition des chercheurs sur la plateforme « microscopie imagerie Côte-d'Azur » (MICA). Après vérification, il appert que ce centre ne dispose pas de cet équipement.
Il la saisit donc de nouveau pour lui demander quels moyens budgétaires supplémentaires elle envisage de mobiliser pour permettre aux équipes du sud-est de la France investies dans la recherche sur le coronavirus de disposer dans les plus brefs délais de cet équipement indispensable.
Il attire son attention sur la nécessité d'assurer la souveraineté de la France dans ce domaine de la recherche qui est essentiel pour notre politique de santé publique et sur le grand risque de départ, vers des laboratoires étrangers, des chercheurs qui ne pourraient disposer en France de cet équipement.

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Transmise au Ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation


Réponse du Ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation publiée le 31/12/2020

La technique de cryo-microscopie électronique en transmission (Cryo-EM) a révolutionné, de façon tout à fait spectaculaire, le domaine de la biologie structurale ces dernières années et a fait l'objet du prix Nobel de chimie en 2017. Elle est utilisée pour étudier les structures moléculaires des échantillons biologiques et ne requiert pas d'utilisation de colorant ou de fixateur. La Cryo-EM traverse une phase de développement technologique sans précédent et est devenue aujourd'hui un outil incontournable, faisant l'objet d'une forte demande d'investissement. Elle est également devenue un élément d'attractivité des sites de recherche en biologie et est objet de développement à la frontière de la biologie et de la physique. Par ailleurs la quantité de données qu'elle produit permet d'alimenter de nombreuses communautés de biologistes sous réserve que les microscopes soient connectés à une infrastructure numérique performante et distribuée. C'est aussi une technologie qui demande des compétences techniques donc des formations de pointe que la France doit pouvoir dispenser pour conserver un leadership dans le domaine. Actuellement, et malgré son rôle pionnier en Europe (avec l'installation du premier microscope de ce type en France en 2014), notre pays souffre d'un retard important en matière d'investissement dans ce type de technologie. À titre d'illustration, la France ne dispose aujourd'hui que de 3 modèles de microscopes de pointe (300kV) alors que d'autres pays ont investi massivement dans cette technologie (près d'une cinquantaine de microscopes au total en Allemagne et Royaume-Uni). Pour pallier cette situation, l'infrastructure de recherche FRISBI spécialisée en biologie structurale et nœud de l'infrastructure europénne Instruct, a soumis un dossier à l'appel à projets du PIA Equipements structurants pour la recherche/ Equipex + pour compléter son équipement de 3 microscopes Titan Krios et les mettre à la disposition des chercheurs français. En parallèle, 8 projets ont été soumis pour financement de 12 machines dans le cadre du renouvellement des CPER, dont les négociations sont en cours. Ces 8 projets concernent 3 gros appareils à 300 KV de type TITAN Krios et 9 plus modestes à 200 KV, dans la logique de la feuille de route FRISBI. Le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation s'est positionné en soutenant très favorablement ces projets auprès des partenaires régionaux. Le ministère espère vivement que ce double flux de financement permettra d'améliorer très significativement le niveau d'équipement pour la cryo-microscopie électronique en France, et pourra bénéficier en particulier aux projets sur la COVID-19 qui nécessitent le recours à cette technologie.

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