Question de M. JANSSENS Jean-Marie (Loir-et-Cher - UC) publiée le 16/04/2020

M. Jean-Marie Janssens attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur une faille juridique en matière de cession de bail rural intervenant lors de la cessation d'activité de l'un des copreneurs. En effet, si le caractère personnel du bail rural prohibe en principe sa cession, il existe des exceptions. L'une d'elles est aménagée par l'article L. 411-35, alinéa 3, du code rural et de la pêche maritime, qui dispose que « lorsqu'un des copreneurs du bail cesse de participer à l'exploitation du bien loué, le copreneur [peut] demander au bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception que le bail se poursuive à son seul nom. Le propriétaire ne peut s'y opposer qu'en saisissant dans un délai fixé par décret le tribunal paritaire, qui statue alors sur la demande ». Cependant, il n'est pas prévu la possibilité, pour le copreneur qui poursuit le bail à son nom, d'y mettre fin. Ainsi, quand bien même le fermier aurait atteint l'âge de la retraite, ce qui lui permettrait en principe de résilier unilatéralement le bail à durée déterminée, le propriétaire se voit permettre d'exiger que le contrat continue au nom du cosignataire ayant cessé son activité, et ce jusqu'à ce que ce dernier atteigne l'âge de la retraite. Cette carence permet alors au propriétaire de négocier, dans des conditions qui lui sont très favorables, son consentement à une résiliation mutuelle du bail. Aussi, il souhaite connaître les moyens qu'elle envisage pour remédier à cette situation.

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Transmise au Ministère de la justice


Réponse du Ministère de la justice publiée le 27/08/2020

Créé par la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, le troisième alinéa de l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime prévoit que lorsqu'un des copreneurs du bail cesse de participer à l'exploitation du bien loué, le copreneur qui continue à exploiter dispose d'un délai de trois mois à compter de cette cessation pour demander au bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception que le bail se poursuive à son seul nom. En vertu de l'article D. 411-9-12-2 du code rural et de la pêche maritime, le propriétaire ne peut s'y opposer qu'en saisissant, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la lettre recommandée, le tribunal paritaire, qui statue alors sur sa demande. Ce dispositif est applicable aux baux conclus depuis plus de trois ans, sauf si la cessation d'activité du copreneur est due à un cas de force majeure. L'alinéa suivant précise les conditions de forme que doit satisfaire, à peine de nullité, la lettre par laquelle le copreneur restant fait connaître sa demande au bailleur. Cette disposition prévoit donc un mécanisme de régularisation du bail au profit du preneur qui continue l'exploitation, lorsque son copreneur a cessé son activité. La poursuite au seul nom du preneur restant, prévue au 3ème alinéa de l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime, correspond à l'attribution exclusive du bail à son profit. Ce dispositif consolide ainsi la situation juridique du copreneur restant en lui permettant d'obtenir un titre conforme à la situation de fait. Cette régularisation s'applique au bail rural en cours, sans préjudice des dispositions relatives au droit au renouvellement du bail (art. L.411-46 et suivants du code rural et de la pêche maritime). Par ailleurs, ce dispositif est sans effet sur le droit conféré par la loi au preneur restant de résilier le bail lorsqu'il atteint l'âge de la retraite, à la fin d'une de ses périodes annuelles suivant la date à laquelle il aura l'âge requis, en notifiant sa décision au propriétaire au moins douze mois à l'avance en application des 7ème et 8ème alinéas de l'article L. 411-33 du code rural et de la pêche maritime. Il ne permet pas au bailleur d'exiger que le preneur restant continue son activité jusqu'à l'âge de départ de la retraite du copreneur qui a cessé son activité, dans la mesure où ce dernier n'est plus partie au bail. En conséquence, il n'apparaît pas nécessaire de légiférer pour modifier ce dispositif.   

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