Question de M. PIERRE Jackie (Vosges - Les Républicains) publiée le 23/04/2020

M. Jackie Pierre attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation financière précaire de très nombreuses entreprises du bâtiment, qui connaît un point d'orgue depuis la crise du Covid-19. Depuis quelques jours, le secteur a établi un guide de préconisations, validé par le ministère de la santé, permettant une reprise progressive des chantiers en préservant la sécurité des salariés. Ces mesures, qui demeurent à l'appréciation de chaque entrepreneur, ne pourront néanmoins s'appliquer partout et lorsqu'elles le pourront, se traduiront par un surcoût important (évalué à 20 % sur le poste main-d'œuvre) pour nos très petites, petites et moyennes entreprises (TPE-PME). À l'achat, souvent difficile, des équipements nécessaires (gel, masques, lunettes), s'ajoute l'impact de ces mesures et de la distanciation sociale sur le rythme de production. À cette baisse de productivité, il convient d'ajouter les coûts majorés pour certains matériaux en raison des difficultés d'approvisionnement. Pour autant, si l'on veut maintenir la capacité de production du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) et préserver nos entreprises de la faillite, il est nécessaire que l'ensemble de la filière construction participe à l'effort général. Cela implique que le surcoût engendré par les mesures sanitaires soit équitablement réparti entre les fournisseurs, les entreprises du BTP et les maîtres d'ouvrage. Une ordonnance publiée fin mars 2020 prévoit, à cet égard plusieurs mesures de rééquilibrage : notamment l'adaptation des marchés à la période de confinement, la neutralisation des pénalités de retard et l'indemnisation de l'entreprise pour le surcoût. La filière BTP appelle à un rééquilibrage équivalent en matière de marchés privés, c'est-à-dire pour l'écrasante majorité des contrats dont dépend l'activité bâtiment, et ce jusqu'à la fin au moins de l'état d'urgence sanitaire. Il lui demande donc d'une part, quelles sont les mesures que l'État met en œuvre pour aider les entreprises du bâtiment à se fournir en matériels de protection et, d'autre part, de lui indiquer si une ordonnance « marchés privés » (équivalente aux marchés publics) sera publiée afin d'éviter à la profession du bâtiment de supporter seule le fardeau économique induit par les règles de protection des salariés de ce secteur.

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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la relance


Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 27/08/2020

Les entreprises du bâtiment et des travaux publics sont essentielles à la vie économique du pays et à son fonctionnement, en contribuant à des besoins du quotidien des Français tels que le logement, l'eau ou les infrastructures de transport. Le Gouvernement mesure les difficultés que peuvent rencontrer ces professions face à la crise sanitaire du Covid-19, notamment dans la mise en place des gestes barrières, dans leur capacité à s'approvisionner en matériaux et matériels et à mobiliser le personnel requis. Mais il est nécessaire d'œuvrer à la poursuite de leur activité dans des conditions de sécurité optimale, pour éviter une mise à l'arrêt totale des chantiers, qui déstabiliserait non seulement les entreprises concernées mais aussi l'ensemble de la chaîne économique. Afin de préparer le déconfinement des entreprises, la secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie et des Finances a annoncé le 30 avril 2020, le lancement d'une plateforme de commercialisation et de distribution de 10 millions de masques « grand public » pour les petites et très petites entreprises : masques-pme.laposte.fr. Cette plateforme s'adresse aux entreprises de moins de 50 salariés ressortissantes des réseaux des Chambres de commerce et d'industrie (CCI) et des Chambres de métiers et de l'artisanat (CMA), quel que soit leur secteur d'activité. Ainsi, les entreprises de 10 à 49 salariés ont la possibilité de passer commande depuis le 2 mai et les entreprises de moins de 10 salariés depuis le 4 mai. Ce dispositif comprend l'achat et le paiement en ligne, la préparation des commandes et la livraison sur site. Par ailleurs, le Gouvernement a soutenu la mise en place de la plateforme professionnelle stopcovid19.fr qui permet de favoriser la rencontre entre les fabricants et les acheteurs de gels hydro-alcooliques, masques de protection et autres équipements de protection ou de désinfection. Afin d'éviter que les entreprises du bâtiment et des travaux publics ne soient trop impactées par la situation, le Gouvernement a adopté l'ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 qui prévoit plusieurs mesures permettant un rééquilibrage du surcoût engendré par les mesures sanitaires entre les fournisseurs, les entreprises du bâtiment et les maîtres d'ouvrage publics pendant l'état d'urgence sanitaire. Pour l'instant, il n'est pas envisagé d'adopter une nouvelle ordonnance qui intégrerait des dispositions équivalentes à l'ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020, s'appliquant aux marchés privés. Dans le cas des relations entre personnes privées, les difficultés liées à l'épidémie de Covid -19 pourraient dans certains cas, sous le contrôle du juge civil, relever du régime de la force majeure, qui exonère les parties au contrat de toute faute contractuelle en cas de suspension ou annulation de contrat. Si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue par la force majeure à moins que le retard qui en résulterait justifie la résolution du marché. Si l'empêchement est définitif, la reconnaissance de la force majeure autorise la résolution de plein droit du contrat et les parties sont libérées de leurs obligations. Sous réserve de stipulations contractuelles aménageant les cas de force majeure, ceux-ci se constatent au cas par cas dès lors que les trois conditions cumulatives suivantes sont réunies : évènement imprévisible, évènement extérieur aux parties et prestataire ou acheteur public dans l'impossibilité absolue de poursuivre l'exécution de tout ou partie du marché public. Il est particulièrement recommandé de privilégier, dès la survenance des difficultés supposées liées à l'épidémie, une négociation à l'amiable entre les parties. Toutefois, il n'est pas assuré que la force majeure pourra être retenue et il est particulièrement important de bien examiner les clauses du contrat. Pour pouvoir valablement invoquer la force majeure, le titulaire devra démontrer qu'il ne dispose d'aucun autre moyen pour exécuter la prestation (adaptation des conditions de travail, source d'approvisionnement alternative, etc.) et qu'il existe un lien de causalité entre l'inexécution et l'épidémie. Il convient donc de documenter de manière approfondie une éventuelle demande (arrêts de travail des salariés, déclarations de défaillance des fournisseurs, constats contradictoires, inventaires, attestations diverses, etc.) en vue de la phase indemnitaire qui s'ouvrira à l'issue de la crise. En complément, les professionnels peuvent faire valoir la garantie « perte d'exploitation sans dommage matériel » ou « carence de fournisseurs » lorsque leur contrat d'assurance en dispose – seule clause capable à ce jour de couvrir les pertes liées à l'épidémie de Coronavirus. Le 15 avril 2020, la présidente de la Fédération Française de l'Assurance a annoncé que près de 3,2 milliards d'euros ont été débloqués dont 1,75 milliard de mesures de solidarité en faveur des entreprises et des assurés les plus fragiles. Des discussions se poursuivent entre le Gouvernement et la Fédération Française de l'Assurance afin d'améliorer la protection dont pourront bénéficier les entreprises les plus touchées.

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