Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 21/05/2020

M. Hervé Maurey attire l'attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur les conséquences financières de la crise sanitaire sur les communes.

Les différentes évaluations à ce sujet prévoient une diminution conséquente des recettes, notamment fiscales, des collectivités locales. L'association des maires de France estime ainsi les pertes globales à 20 milliards d'euros entre 2020 et 2022. Le Gouvernement les chiffre provisoirement à 4 milliards en 2020 et 10 milliards en 2021.

Les communes même si elles seraient moins affectées sont concernées. Celles-ci doivent faire face, à plus ou moins court terme, aux baisses de redevances liées à la fermeture de certains services publics (centres de loisirs, équipements sportifs ou culturels), la perte des droits de place dans les marchés, la diminution des droits de mutation à titre onéreux et des recettes liées à la taxe de séjour.

Certains syndicats de communes qui tirent leurs recettes des sommes perçues des usagers sont déjà confrontés à de graves problèmes de trésorerie.

Il faut s'attendre également à ce que la baisse des ressources de l'État et des autres collectivités (régions, départements, établissements publics de coopération intercommunale - EPCI) se répercute inévitablement sur les concours et subventions versés aux communes à l'avenir.

La mobilisation exceptionnelle des communes a également conduit à des dépenses supplémentaires importantes auxquelles elles doivent faire face avec des ressources déjà particulièrement contraintes et tout en ayant à supporter des charges importantes, puisqu'elles ne bénéficient pas des mécanismes réservés aux entreprises comme l'activité partielle.

Face à ces sombres perspectives, il convient que le Gouvernement s'engage à ce que les communes ne soient pas la variable d'ajustement des futurs choix financiers de l'État, en prévoyant un vrai plan de soutien en leur faveur. Il pourrait d'ores et déjà s'engager sur le principe d'une prise en charge des dépenses supplémentaires liées directement à des décisions de l'État comme la réouverture des écoles.

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Réponse du Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales – Ville et logement publiée le 27/05/2020

Réponse apportée en séance publique le 26/05/2020

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 1190, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

M. Hervé Maurey. Monsieur le ministre, la crise sanitaire aura – nous le savons – de lourdes conséquences sur les finances des collectivités locales. En effet, elle va entraîner une perte de recettes que le Gouvernement a évaluée à 14 milliards d'euros pour la période 2020-2021.

Les communes seront a priori moins affectées que les régions et les départements, néanmoins elles subiront des baisses de ressources, que ce soit au titre des produits des services, des droits de place, de la taxe de séjour, de droits de mutation ou encore, dans certains cas, des loyers commerciaux.

De plus, les communes devront supporter la situation de certains syndicats dont elles sont membres et qui ne perçoivent plus de recettes, ou bien en perçoivent beaucoup moins, au titre d'un certain nombre de services, comme les piscines, les restaurants scolaires ou les centres de loisirs.

Enfin, la réduction des capacités financières de l'État, des régions, des départements et des établissements publics de coopération intercommunale se répercutera inévitablement sur les concours et subventions dont bénéficient habituellement les communes, par un effet de cascade malheureusement bien connu.

La mobilisation exceptionnelle des communes face au Covid-19 a également entraîné de lourdes dépenses supplémentaires – je pense notamment aux frais engendrés par la réouverture des écoles. Un certain nombre de communes risquent donc de connaître de réelles difficultés, particulièrement en milieu rural. Leur inquiétude est grandissante : pouvez-vous nous assurer que l'État interviendra pour qu'elles n'aient pas à subir l'impact financier de la crise ?

Les maires ont besoin d'être rassurés. Certes, nous avons entendu le Gouvernement dire qu'il n'abandonnerait pas les communes. Mais nous l'avons également entendu dire que « les collectivités locales devront faire des efforts » !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement. Monsieur Maurey, avant tout, je vous prie de bien vouloir excuser Jacqueline Gourault, qui m'a demandé de vous apporter les éléments de réponse suivants.

Depuis le début de la crise sanitaire, le Gouvernement prête une attention toute particulière à la situation des collectivités territoriales. Vous l'avez dit : les équilibres budgétaires sont parfois remis en cause par l'ensemble des nouvelles dépenses qu'elles ont dû engager pour gérer la crise du Covid-19.

Certaines collectivités sont potentiellement fragilisées par les dépenses déjà effectuées, mais aussi par la baisse prévisionnelle d'un certain nombre de recettes fiscales ; bien entendu, nous les avons toutes et tous en tête.

À cette équation budgétaire se sont ajoutés des facteurs de complexification, comme l'impossibilité, durant la période de confinement, de réunir les exécutifs pour adopter le budget primitif pour 2020.

Face à cette situation, comment rassurer les collectivités locales, comme vous le demandez ?

Tout d'abord, le Gouvernement s'est attaché à déployer, dès le mois de mars, des réponses concrètes en direction des collectivités territoriales ; par ordonnance, il a décalé les dates limites d'adoption des budgets et l'arrêté des comptes pour 2020. Il a également permis un certain nombre de dérogations et d'assouplissements en matière d'exécution budgétaire.

En outre, Jacqueline Gourault et Sébastien Lecornu ont rappelé aux préfets qu'ils disposaient de leviers permettant de soutenir la trésorerie des collectivités fragilisées, comme les avances de fiscalité et de dotation globale de fonctionnement (DGF) ou les acomptes au titre du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA). Bon nombre d'élus locaux nous ont d'ailleurs sollicités à ce titre.

À ce jour, ces mesures ont bénéficié à plus d'une centaine de communes. Elles restent évidemment à disposition de toutes celles qui le souhaitent.

Le Gouvernement s'est aussi attaché à soutenir les collectivités territoriales affectées par un surcroît de dépenses en raison de la crise sanitaire, en contribuant à hauteur de 50 % aux achats de matériel. Comme vous le savez, à la suite de nombreuses observations remontées du terrain, la date de prise en compte des commandes a été avancée, comme l'a annoncé le Premier ministre.

Enfin, le Premier ministre a confié une mission au député Jean-René Cazeneuve, président de la délégation aux collectivités territoriales de l'Assemblée nationale, pour évaluer de manière fine les conséquences financières de l'épidémie sur les structures locales et proposer, en leur faveur, des mesures d'accompagnement. M. Cazeneuve devrait rendre ses propositions dans quelques jours. Il s'attachera bien entendu à les décliner en fonction du niveau de collectivité, tout particulièrement en direction du bloc communal. C'est sur la base de ses conclusions que le Gouvernement pourra concrétiser et accentuer l'accompagnement financier des collectivités locales.

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour la réplique.

M. Hervé Maurey. Monsieur le ministre, je vous remercie des éléments que vous avez bien voulu m'apporter. Malheureusement, je ne suis pas totalement rassuré : ce n'est pas le fait de décaler le calendrier d'adoption des budgets locaux qui réglera vraiment les problèmes.

J'aurais aimé obtenir, au moins, des engagements quant à la prise en charge des dépenses liées à la crise sanitaire et à la réouverture des écoles. Vous avez fait allusion au soutien du Gouvernement : pour l'instant, l'État ne doit intervenir que pour le financement des masques, et encore à hauteur de 50 %. Toute une série d'autres dépenses n'ont pas été prises en compte. Il serait important que nous ayons un engagement du Gouvernement ne serait-ce qu'à ce titre.

Au cours des dernières années, et notamment durant le précédent quinquennat, les communes ont été mises à rude épreuve avec la baisse des dotations. Or elles représentent une part importante de l'investissement public, dont on a besoin dans le cadre de la relance. Le Sénat y est très vigilant, et il est très attentif à ce que les communes soient réellement soutenues par l'État : elles ne doivent pas faire les frais de cette terrible épidémie !

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