Question de M. HENNO Olivier (Nord - UC) publiée le 21/05/2020

M. Olivier Henno interroge Mme la ministre du travail sur la situation des jeunes qui sont à la recherche d'un apprentissage. Suite à la pandémie du Covid-19 et dans la perspective d'une grave crise économique, les entreprises sont particulièrement frileuses quant à l'embauche de jeunes en apprentissage pour la rentrée de septembre 2020. Cette baisse des embauches touche particulièrement les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE-PME) qui sont les premiers employeurs d'apprentis dans notre pays. Cependant, l'apprentissage est une chance incroyable pour les jeunes. L'employeur rémunère l'apprenti pour son travail et finance sa formation. Cela permet à de nombreux jeunes d'acquérir une qualification et des compétences, qu'ils ne pourraient pas obtenir sinon. Il souhaite savoir quels outils le gouvernement compte mettre en place pour accompagner les entreprises qui font le choix de recruter et de maintenir des apprentis.

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Réponse du Ministère du travail publiée le 17/06/2020

Réponse apportée en séance publique le 16/06/2020

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, auteur de la question n° 1194, adressée à Mme la ministre du travail.

M. Olivier Henno. Madame la ministre, la situation des jeunes qui souhaitent s'insérer dans le monde du travail est particulièrement préoccupante. Pas une journée ne passe sans que la presse relate leurs difficultés dans le contexte de crise que nous connaissons.

Avec la crise économique, les entreprises sont parfois frileuses à embaucher pour la rentrée de septembre. Combien de promesses de stage, d'embauche en CDI, en CDD ou en apprentissage ont-elles été remises en question ? Combien de postes n'ont-ils pas été ouverts à la suite du confinement ? Une génération entière est en train d'être abandonnée au bord de la route !

De fait, des milliers de jeunes sont bloqués, dans l'attente de démarrer enfin leur vie professionnelle. Les plus chanceux sont aidés par leur famille, parfois elle-même frappée par la crise ; d'autres doivent impérativement trouver un emploi précaire pour rembourser leur prêt étudiant ou payer leur loyer. Avec la peur de se retrouver sans emploi, l'anxiété grandit, souvent dans un isolement néfaste.

Nous ne pouvons pas avoir une génération sacrifiée à cause du Covid ! Nous devons donc entendre la détresse de nos jeunes, leur tendre la main, nous mobiliser pour proposer des mesures exceptionnelles.

Les jeunes à la recherche d'un apprentissage sont les premiers touchés par le ralentissement de l'économie. En effet, la baisse des embauches est particulièrement sensible dans les très petites, petites et moyennes entreprises, qui sont les premiers employeurs d'apprentis.

Pourtant, l'apprentissage, nous le savons, est une chance incroyable pour les jeunes : il permet à nombre d'entre eux d'acquérir une qualification et des compétences qu'ils ne pourraient pas obtenir dans un autre cadre.

Madame la ministre, depuis l'inscription à l'ordre du jour de ma question, un dispositif de 5 000 euros pour les mineurs et de 8 000 euros pour les majeurs a été adopté ; je le salue, mais je pense qu'il faut aller plus loin encore, en diminuant le reste à charge pour les entreprises et en alertant les partenaires sociaux sur le risque d'une génération sacrifiée. Quelles politiques publiques comptez-vous mettre en œuvre pour favoriser l'apprentissage ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail.

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Monsieur le sénateur Olivier Henno, nous partageons une conviction : il n'est pas question de laisser une génération être sacrifiée.

Le taux de chômage des jeunes avait commencé à baisser : certes, il était encore de 18 %, mais il était auparavant de 21 %. C'était il y a quatre mois. Le nombre d'apprentis était en hausse de 16 %. On commençait à voir la lumière au bout du tunnel, et les jeunes reprenaient espoir.

Il n'est pas question que, en raison de la crise économique liée à la crise sanitaire, nos jeunes soient sacrifiés. C'est la raison pour laquelle l'emploi des jeunes est un thème majeur des concertations avec les partenaires sociaux que le Président de la République m'a demandé de mener.

S'agissant de l'apprentissage, nous avons déjà pris des décisions, car il y avait urgence : la rentrée se prépare maintenant. Sur les autres sujets, le Président de la République recevra de nouveau les partenaires sociaux dans quelques jours, sur la base des propositions que je lui présenterai à l'issue des concertations.

Pour l'apprentissage, nous avons voulu aller vite, car c'est maintenant que les jeunes s'inquiètent, maintenant qu'ils doivent pouvoir signer un contrat. Nous avons donc décidé une aide exceptionnelle, inédite dans notre pays : une prime de 5 000 euros pour l'embauche d'un apprenti mineur, 8 000 euros pour un apprenti majeur. En fait, ce dispositif couvre l'intégralité du coût de l'embauche, à quelques dizaines d'euros près pour les plus âgés. Ainsi, la première année d'apprentissage aura un coût quasi nul pour les entreprises.

Il nous a semblé important d'envoyer ce signal inédit, car les jeunes ont compris la dynamique de l'apprentissage : ils ont compris que c'est une voie d'excellence, une voie d'avenir. Ainsi, depuis notre réforme, la demande augmente énormément – nous l'avons constaté, cette année encore, dans Parcoursup et Affelnet. Nous devons être au rendez-vous pour ne pas décevoir nos jeunes !

Le risque est du côté de l'offre, du côté des entreprises, pour les raisons que vous avez décrites. D'où l'aide exceptionnelle que nous avons décidée, mais aussi la possibilité accordée aux centres de formation d'apprentis d'accueillir jusqu'à six mois un jeune sans qu'il ait encore son contrat d'apprentissage, pour l'aider à consolider ses acquis et à trouver un maître d'apprentissage. Je pense aussi à la lutte que nous menons contre la fracture numérique : pendant le confinement, 90 % des apprentis ont pu suivre leur formation à distance, mais 10 % ne l'ont pas pu ; nous devons équiper tous nos apprentis pour « rattraper » ceux qui ont été en difficulté.

Plus que jamais, nous pensons que l'apprentissage est une voie d'excellence, une voie de réussite ; plus que jamais, l'emploi des jeunes est pour nous une haute priorité. Nous aurons l'occasion d'y revenir à l'issue de la concertation en cours, mais ne doutez pas que, pour moi, c'est la première priorité de notre plan de relance de l'emploi !

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour la réplique.

M. Olivier Henno. Merci pour votre réponse, madame la ministre. Oui, il est indispensable de faire des efforts pour cette génération, qui prend le Covid en pleine face sur le plan économique.

Je salue les mesures prises en faveur de l'apprentissage. Il est vrai que le reste à charge est extrêmement réduit. Reste à bousculer encore un peu les mentalités des entreprises, en mobilisant tous les partenaires sociaux. De ce point de vue, l'Allemagne est un exemple : au sein de Bayer, la première donnée mise en avant est le nombre d'apprentis, avant même le chiffre d'affaires. Voilà le chemin à suivre !

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