Question de Mme GOULET Nathalie (Orne - UC) publiée le 28/05/2020

Mme Nathalie Goulet attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur la situation problématique que rencontre le patrimoine français des ouvrages hydrauliques, notamment en milieu rural. Au troisième rang national quant à leur fréquentation, les moulins hydrauliques représentent un patrimoine vernaculaire de proximité qui, tout au long des siècles, a apporté la prospérité le long de nos cours d'eau et auquel nos compatriotes restent attachés.

Or, aujourd'hui, des milliers d'édifices ruraux sont en péril.

En effet, le ministère de la transition écologique a décidé de la destruction de nombreux ouvrages hydrauliques au nom de la continuité « dite » écologique, certes n'incluant que les seuils en rivières, or, ces derniers sont indissociables par destination.

Les conséquences sur le patrimoine autre que bâti sont multiples.

Ce sont des milliards gaspillés par les agences de l'eau pour détruire ou mutiler l'essentiel du troisième patrimoine des Français : les moulins à eau, qui attestent d'une présence historique et millénaire.
Le patrimoine rural doit faire l'objet d'une attention toute particulière au risque de disparaître totalement au fil du temps, pour ne pas dire au fil de l'eau.

Que ce soit le patrimoine paysager, le patrimoine de la faune et de la flore, le patrimoine immatériel, le patrimoine bâti, c'est bien tout le patrimoine rural et l'histoire de l'homme au fil de l'eau, qui est en danger.

Elle souhaite donc connaître les mesures qu'elle entend mettre en œuvre pour que soit mis en place un moratoire sur la destruction des ouvrages hydrauliques en rivières, qui persiste malgré les nombreuses dissensions avec les acteurs et associations de défense de ce patrimoine. Elle souhaite également savoir quel consensus, souhaitable, envisageable et réalisable, le ministère de la transition écologique serait susceptible de proposer pour retrouver une continuité apaisée sur un sujet qui tient à cœur à de nombreux Français.

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Transmise au Ministère de la transition écologique


Réponse du Ministère de la transition écologique publiée le 21/01/2021

Face au double défi de l'effondrement de la biodiversité et d'un maintien de la qualité de l'eau, la restauration de la continuité écologique est une politique importante pour l'atteinte du bon état des cours d'eau et pour respecter nos engagements à préserver la biodiversité d'eau douce. Cette dernière est en effet particulièrement menacée, d'après les derniers chiffres de l'UICN (Union internationale pour la conservation de la nature) datant de 2019, 28 % des crustacés et 39 % des poissons sont menacés, quand 19 % des poissons présentent un risque de disparition. L'importance de cette politique de restauration de la continuité écologique des cours d'eau a été réaffirmée en France par les Assises de l'eau en juin 2019 et le plan biodiversité qui prévoit de restaurer la continuité sur 50 000 km de cours d'eau d'ici à 2030. La stratégie biodiversité 2020 de la Commission européenne en fait également un enjeu majeur, elle inclut un objectif de restauration de 25 000 km de cours d'eau d'ici 2030. La mise en œuvre de cette politique sur le terrain est toutefois délicate car elle doit être conciliée avec le déploiement des énergies renouvelables dont fait partie l'hydroélectricité, la préservation du patrimoine culturel et historique, ou encore le maintien d'activités sportives en eaux vives participant au développement de nos territoires. C'est pourquoi le ministère de la Transition écologique est engagé, depuis quelques années, dans un travail de conciliation des différents enjeux avec les acteurs concernés afin de mettre en œuvre cette politique dans un climat apaisé. S'agissant en particulier de la dimension patrimoniale, des travaux en commun avec le ministère de la Culture et les représentants des propriétaires de moulins ont permis de progresser vers une meilleure prise en compte de la valeur historique et paysagère des ouvrages hydrauliques, mais n'ont pas encore été pleinement déployés localement. Par ailleurs, des difficultés persistent, par exemple en terme de financement de certaines solutions techniques d'intervention sur les ouvrages, points sur lesquels le ministère continue de travailler. Répondant aux objectifs du Gouvernement de simplification administrative, et demandée par les collectivités gestionnaires des cours d'eau et milieux humides, la rubrique 3.3.5.0 relative aux travaux de restauration des fonctionnalités naturelles des milieux aquatiques exclusivement soumise à déclaration au titre de la loi sur l'eau, créée par le décret n° 2020-828 du 30 juin 2020, vise principalement à faciliter la réalisation de travaux qui vont dans le sens d'un meilleur fonctionnement des écosystèmes naturels et de l'atteinte des objectifs de la directive cadre sur l'eau. Cette simplification ne met pas en péril le patrimoine et ne remet pas en cause le droit de propriété des riverains (droit à valeur constitutionnelle, qui n'est en rien modifié par les textes précités et demeure préservé par les mêmes dispositions qu'auparavant). La procédure de déclaration comporte une analyse d'incidences adaptée à l'ampleur des interventions envisagées. Les dispositions légales qui prévoient une consultation du public, en application de l'article 7 de la charte de l'environnement, restent par ailleurs applicables. En cas de nécessité (ce qui n'est généralement pas le cas des travaux soumis au régime de déclaration), le public peut donc bien toujours être consulté en application des articles L. 123-19 et suivants du code de l'environnement. À ce jour, la politique de restauration de la continuité écologique a permis d'identifier les cours d'eau sur lesquels il était important d'intervenir (11 % des cours d'eau), et sur ces cours d'eau, de procéder à des interventions sur environ 5 000 ouvrages. Dans la grande majorité des cas, la solution technique trouvée a consisté à aménager l'ouvrage (mise en place d'une passe à poisson, d'une rivière de contournement, abaissement du seuil…), sans qu'il n'y ait suppression du barrage ou du seuil.

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