Question de Mme DEROCHE Catherine (Maine-et-Loire - Les Républicains) publiée le 02/07/2020

Mme Catherine Deroche attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la prise en charge des patients atteints d'un lymphœdème post-cancer.
Le lymphœdème, gonflement d'une partie du corps provoqué par le ralentissement ou le blocage de la circulation de la lymphe, trouve le plus souvent son origine dans le traitement des cancers lors de l'ablation de certains ganglions. À titre d'exemple, sur 54 % de nouveaux cas de cancer du sein par an, 15 à 20 % des femmes opérées par curage axillaire développeront un lymphœdème.
Cependant, la prise en charge des patients pour traiter ces patients n'est pas à la hauteur des soins.
Elle lui demande les intentions du Gouvernement pour y remédier.

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Transmise au Ministère des solidarités et de la santé


Réponse du Ministère auprès du ministre des solidarités et de la santé - Autonomie publiée le 22/07/2020

Réponse apportée en séance publique le 21/07/2020

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, auteure de la question n° 1246, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Mme Catherine Deroche. Ma question a pour objet ces séquelles de traitement du cancer que sont les lymphœdèmes.

Après un cancer du sein avec curage axillaire, une femme sur cinq présente un lymphœdème du membre supérieur, et les lymphœdèmes du membre inférieur après cancer pelvien – cancer de la prostate chez l'homme ou cancer gynécologique chez la femme – touchent un patient sur quatre.

Ces séquelles deviennent une maladie chronique. Elles ne se guérissent pas, mais elles exigent un véritable traitement. D'ailleurs, ce dernier fait l'objet d'un consensus tant national qu'international. Il consiste à réduire le volume du membre concerné, de façon à améliorer la qualité de vie du patient et à éviter les complications infectieuses, qui, pour ce type de pathologies, sont très fréquentes.

Au cours des premières semaines, l'on appose des bandes à allongement court ; vient ensuite un traitement d'entretien au long cours, avec des compressions élastiques. Mais les bandes à allongement court ne sont pas prises en charge par l'assurance maladie et les compressions élastiques ne le sont que partiellement. Certains patients aux revenus modestes renoncent donc à ces soins ou ne renouvellent pas les bandages assez souvent. C'est ce que nous a signalé le docteur Vigne, chef du service de lymphologie de la fondation Cognacq-Jay, que le groupe cancer, que je préside, a entendu au mois de mars dernier.

Ma question est simple : va-t-on améliorer la prise en charge de ces traitements ? Les pathologies dont il s'agit peuvent entraîner des handicaps très lourds. Tous les exemples que M. Vigne a cités lors de son audition en apportaient la preuve flagrante !

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie. Madame la sénatrice Catherine Deroche, vous interrogez le ministre des solidarités et de la santé au sujet de la prise en charge des lymphœdèmes post-cancer.

Vous l'avez rappelé, le lymphœdème secondaire auquel vous faites référence est une dégradation du système lymphatique : il survient lorsqu'un système lymphatique auparavant normal est endommagé.

Les lymphœdèmes peuvent avoir une cause chirurgicale, infectieuse, chimiothérapeutique, tumorale ou encore iatrogène. Ils sont donc susceptibles d'apparaître consécutivement à un traitement du cancer, et plus particulièrement à la suite du curage des ganglions sous l'aisselle, dans le cas du cancer du sein.

L'incidence du lymphœdème secondaire post-cancer est insuffisamment connue, mais la Haute Autorité de santé, la HAS, estime qu'après cancer du sein celle-ci varierait selon le type de traitement : le risque serait moins élevé chez les femmes qui subissent une biopsie des ganglions sentinelles que chez celles qui subissent un évidement des ganglions axillaires. Ainsi, la fréquence de survenue de cette pathologie est estimée actuellement entre 15 % et 28 % après curage axillaire classique et entre 2,5 % et 6,9 % après utilisation de la technique du ganglion sentinelle.

La prise en charge du lymphœdème est complexe. Ses deux principaux objectifs sont de traiter la cause spécifique du lymphœdème, par des soins adaptés, et de traiter le lymphœdème lui-même pour atténuer ses conséquences sur la qualité de vie des patients.

Le premier objectif a fait l'objet, pour le cancer du sein, d'une note de cadrage de la HAS en juillet 2012. On l'atteint principalement grâce à des compressions par bandages, par le port de manchons, par un drainage lymphatique manuel ou encore par des interventions chirurgicales utilisant différentes techniques pour restaurer une circulation normale de la lymphe. Dans le cadre de la prise en charge au titre des affections de longue durée, ces actes sont remboursés à 100 % par l'assurance maladie.

Quant au second objectif – l'amélioration de la qualité de vie des patients –, il passe par des conseils pratiques de vie au quotidien ainsi que par un bilan et un suivi d'activité physique, psychologique et diététique.

À ce titre, le parcours de soins global après le traitement d'un cancer, créé par l'article 59 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, dont les textes réglementaires sont en cours de finalisation, vise à améliorer la prise en charge des patients après le cancer sur l'ensemble du territoire en organisant la mise en place et la réalisation de bilans d'activité physique, psychologique et diététique, ainsi que des consultations de suivi psychologique et diététique.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour la réplique.

Mme Catherine Deroche. Madame la ministre, les drainages lymphatiques, effectués par exemple par des kinésithérapeutes, sont effectivement remboursés. Mais, comme l'a souligné le docteur Vigne, tous les patients ne bénéficient pas de la technique du ganglion sentinelle, dont vous dites qu'elle pourrait réduire les risques de lymphœdème. (Mme la ministre déléguée le concède.)

Certains patients se retrouvent avec des membres supérieurs ou inférieurs énormes et cette pathologie est extrêmement invalidante. Elle entraîne des conséquences à la fois sanitaires, sociales, professionnelles et personnelles. Or, pour les intéressés, les traitements par compression sont mal pris en charge.

Vous avez rappelé les dispositions votées au titre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 ; je regrette d'ailleurs que les décrets d'application ne soient toujours pas pris : il est temps que ce suivi global des patients traités pour un cancer soit mis en œuvre.

J'y insiste, ces bandes doivent être remboursées, car les personnes modestes renoncent à les utiliser !

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