Question de M. HUGONET Jean-Raymond (Essonne - Les Républicains) publiée le 06/08/2020

M. Jean-Raymond Hugonet attire l'attention de M. le Premier ministre sur les conséquences de la fermeture anticipée des réacteurs de la centrale nucléaire de Fessenheim sur les émissions de gaz à effet de serre. L'énergie nucléaire étant une énergie très faiblement émettrice de gaz à effet de serre, la fermeture de ces réacteurs aura pour conséquence d'accroître indirectement les volumes d'émission de ces gaz en France et en Europe.

L'électricité joue un rôle majeur dans nos sociétés depuis un siècle. Elle a permis et permettra demain encore le développement industriel et sociétal du pays y compris celui de la voiture électrique dont on dit qu'elle est l'avenir de l'automobile demain. Elle ne peut être considérée comme une marchandise parmi d'autres.

C'est pour cela que depuis l'après-guerre, l'État a décidé d'en faire une fonction régalienne. Cette décision a permis l'électrification du pays, son redressement économique, le développement de l'hydroélectricité et, pour répondre à la crise pétrolière des années 1970, le déploiement du programme électronucléaire qui a pu bénéficier du savoir nucléaire militaire.

La France dispose d'un parc électronucléaire cohérent et indépendant des grandes puissances qui produit une électricité décarbonée à 90 %, pour un prix très compétitif car le moins cher.

La France est aujourd'hui un des meilleurs élèves de la planète en matière de lutte contre le réchauffement climatique. La France est même le quatrième exportateur d'électricité en Europe, ce qui profite à EDF, et à l'État son actionnaire à 80 %.

La politique de transition énergétique du Gouvernement a pour objectif de réduire la part du nucléaire à 50 % de la production électrique, en fermant un tiers de nos soixante centrales nucléaires. Le Gouvernement a commencé par la fermeture anticipée des réacteurs de la centrale nucléaire de Fessenheim.

Et pourtant, l'exemple allemand se révèle catastrophique pour la qualité de l'air. Pour répondre aux besoins des consommateurs, l'Allemagne doit avoir recours aux centrales à charbon en fonction des aléas, de la constance et de la force du vent. Cela devrait nous alerter

C'est la raison pour laquelle il lui demande de lui indiquer comment la France va continuer à assurer la production massive à un prix très compétitif d'une électricité qui est à la base de notre développement économique et sociétal.

Il souhaite savoir quelles sont les autres centrales nucléaires qui vont fermer.

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Transmise au Ministère de la transition écologique


Réponse du Ministère de la transition écologique publiée le 11/03/2021

L'atteinte de la neutralité carbone à l'horizon 2050, fixée dans la loi énergie-climat de 2019, est une priorité de la France pour répondre à l'enjeu climatique, et elle suppose que le mix-électrique soit sur le long terme totalement décarboné. Par ailleurs, la France s'est engagée dans une transition énergétique qui repose, d'une part, sur la sobriété et l'efficacité énergétique et, d'autre part, sur la diversification des sources de production et d'approvisionnement avec le développement des énergies renouvelables et la réduction de la part du nucléaire. La loi Énergie-Climat fixe ainsi comme objectif l'atteinte de 50 % d'électricité d'origine nucléaire dans le mix en 2035. La diversification du mix électrique, dans le cadre d'une stratégie de réduction lissée et pilotée des capacités nucléaires existantes, sera poursuivie pour atteindre cet objectif, notamment parce qu'un système électrique plus diversifié est un système électrique plus résilient à un choc externe comme par exemple une baisse de la capacité de production des réacteurs suite à un incident, à un défaut générique ou à une longue période de maintenance (courante ou réexamen périodique), qui conduirait à l'indisponibilité de plusieurs réacteurs. À ce titre, il convient de noter que ce risque s'est matérialisé lors de la crise Covid 19 avec un impact sur la disponibilité des réacteurs nucléaires. Une telle diversification est cohérente avec les engagements climatiques de la France : elle sera réalisée sans nouveau projet de centrales thermiques à combustibles fossiles, ne conduira pas à une augmentation des émissions de gaz à effet de serre et est compatible avec l'objectif de mise à l'arrêt de l'ensemble des centrales à charbon sur le territoire métropolitain d'ici à 2022. Les études réalisées par RTE dans le cadre de son bilan prévisionnel de long terme publié en 2017 ont démontré en outre qu'un mix avec de fortes proportions d'énergies renouvelables est possible en 2035 tout en respectant le critère de sécurité d'approvisionnement. L'étude publiée en janvier 2021 par RTE et l'AIE a par ailleurs précisé les conditions de faisabilité d'un système électrique comportant une proportion encore plus forte d'énergies renouvelables, en mettant en exergue les conditions techniques qui devraient être respectées afin de garantir la sécurité d'approvisionnement dans cette configuration. Il faut rappeler que la compétitivité croissante des énergies renouvelables électriques permet d'en accélérer le développement tout en limitant très fortement, voire en supprimant dans certains cas, le recours à des subventions de l'Etat. La fermeture de la centrale de Fessenheim s'inscrit dans le cadre de cette démarche. Elle ne conduira pas, sur le moyen terme, à une augmentation des émissions de CO2 de la France. Conformément à la politique énergétique de la France et en ligne avec les objectifs de la programmation pluriannuelle de l'énergie, l'électricité d'origine renouvelable doit en effet passer de 21 % de la production totale en 2018 à presque 30 % en 2025. L'électricité venant en remplacement de Fessenheim sera donc essentiellement renouvelable. À ce titre, dans son bilan électrique 2019, le gestionnaire du réseau RTE a chiffré les émissions évitées grâce aux productions d'origine renouvelable (environ 111 TWh soit plus 21 % de la production électrique totale) à environ 20 millions de tonnes de CO2 par an (5 millions de tonnes en France et 15 millions de tonnes dans les pays voisins). Pour ce qui est des imports, la France est historiquement exportatrice nette d'électricité et cette situation ne devrait pas changer dans les prochaines années. Pour mettre en œuvre la diversification du mix électrique, la programmation pluriannuelle de l'énergie fixe une trajectoire de fermeture de douze autres réacteurs d'ici 2035. Les prochaines fermetures seront confirmées trois ans avant leur mise en œuvre respective. EDF a proposé au Gouvernement d'étudier la mise à l'arrêt de paires de réacteurs sur les sites de Blayais, Bugey, Chinon, Cruas, Dampierre, Gravelines et Tricastin, liste établie en tenant compte de la stratégie d'EDF pour minimiser l'impact économique et social, ainsi que sur le réseau électrique, de ces fermetures. Sauf exception, les fermetures ne devront conduire à l'arrêt complet d'aucun site nucléaire. Cette durée d'anticipation permettra au Gouvernement d'accompagner les territoires concernés. En particulier, des contrats de transition écologique seront établis, afin de permettre à ces territoires de s'inscrire dans de nouvelles dynamiques de développement. Enfin, le Gouvernement conduit actuellement un programme de travail sur le mix électrique post 2035. Avant cet horizon, de nouvelles capacités nucléaires n'apparaissent pas nécessaires ; au-delà, se pose la question des nouveaux moyens de production d'électricité décarbonée à construire pour assurer l'équilibre offre-demande à mesure du déclassement du parc existant. Ce travail vise à instruire, en particulier, l'opportunité et les modalités d'un éventuel programme industriel de nouveaux réacteurs nucléaires, ainsi que d'un scénario de mix électrique 100 % renouvelable à l'horizon 2050. Les conclusions de ces travaux sont attendues pour mi-2021.

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