Question de M. RAMBAUD Didier (Isère - LaREM) publiée le 13/08/2020

M. Didier Rambaud attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les difficultés des producteurs de fromages AOP-IGP liées à la crise sanitaire.

La situation de crise sanitaire liée à la lutte contre l'épidémie de covid-19 a entrainé en effet des conséquences sans précédent sur la filière de production des fromages AOP-IGP, fromages fermiers et fromages de pays.

Avec la fermeture des lieux de vente et de consommation des fromages, la fin des repas familiaux ou festifs qui permettent traditionnellement l'achat de ce type de produits ou encore de nouvelles habitudes de consommation, une des premières conséquences de cette crise est un surstockage massif des produits invendus alors même que les fromages AOP-IGP, fromages fermiers et fromages de pays souffrent d'une durée de vie limitée à quelques semaines seulement. L'impact économique a été chiffré par le Conseil national des appellations d'origine laitières (CNAOL) à 40% de perte de chiffre d'affaire sur 2 mois, soit 157 millions d'euros de pertes. Quant à la perte de rémunération des producteurs sur la période concernée, elle est de 17 millions d'euros. Le Gouvernement a indiqué dès le 9 juin prendre la pleine mesure des besoins des filières AOP et IGP, avec notamment une modification temporaire des cahiers des charges AOP et IGP permettant d'éviter le gaspillage.

Néanmoins, les acteurs de la filière les plus impactés n'ont pu bénéficier pleinement du fonds de solidarité, le seuil de 80 % de perte de chiffre d'affaire durant le confinement étant trop restrictif du fait des modalités de gestion mis en place pour réduire le gaspillage.

Les acteurs de la filière souhaitent la mise en place, à l'instar des plans accordés aux filières viti-vinicoles et horticoles, la mise en place d'un « plan fromages AOP / IGP » qui permettrait des aides adaptées pour compenser les pertes et permettre la mise en œuvre d'une stratégie de relance valorisant nos signes de qualité. Ce plan pourrait permettre un accompagnement des collectifs d'opérateurs, dans une meilleure réponse aux attentes de qualité globale (préservation des ressources, engagements sociétaux) et une promotion forte de nos AOP et IGP.

Aussi, il lui demande comment le Gouvernement pourrait répondre à cette demande et ainsi éviter la disparition de producteurs fragilisés par la crise, dans un domaine éminemment représentatif de la culture et de la gastronomie française.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 04/02/2021

La crise sanitaire a des impacts importants pour de nombreuses filières agricoles et agroalimentaires. C'est notamment le cas de la filière laitière, et en particulier des filières sous indication géographique, et des producteurs laitiers fermiers, dont l'activité est si importante pour le patrimoine et l'économie des territoires français. Lors de la première vague du printemps, ces filières ont fait face à des difficultés liées à des pertes de débouchés, compte tenu de la fermeture d'une majorité du secteur de la restauration hors domicile, de celle d'un nombre important de marchés, et de l'orientation des achats alimentaires vers des produits de première nécessité et moins d'achats festifs par les consommateurs. En outre, la période de forte production laitière (du fait du pic de collecte annuel) a aggravé la problématique. Les fromages sous indication géographique maillent l'ensemble du territoire, avec une production souvent issue de très petites entreprises (TPE) et de petites et moyennes entreprises (PME), dont certaines ont été durement touchées par la crise. Pour préserver ce type d'entreprise, le Gouvernement a mis en place dès le mois de mars 2020 des dispositifs d'urgence transversaux à caractère rétroactif en faveur des entreprises et de l'emploi : chômage partiel, fonds de solidarité, garanties à l'export, reports de cotisations sociales et d'impôts, prêts garantis par l'État, dont peuvent bénéficier les exploitations agricoles et les entreprises de transformation, notamment les TPE et PME. De plus, le ministre chargé de l'agriculture a porté au plan européen la nécessité d'activer des mesures de gestion des marchés. Il était en effet indispensable que la Commission européenne active sans attendre ces outils et le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a mobilisé l'ensemble des partenaires européens pour porter conjointement cette demande. Concernant la filière fromagère, il s'agissait en particulier d'activer rapidement une aide financière au stockage privé de fromages, qui a été mise en place début mai 2020. Au niveau national, le ministère chargé de l'agriculture a travaillé avec les services de l'institut national de l'origine et de la qualité pour mettre en place une procédure rapide pour permettre aux fromages sous indication géographique qui le souhaitent d'adapter temporairement leur cahier des charges pour faire face à la crise. Il s'agissait pour eux de pouvoir continuer à bénéficier de leur appellation, malgré les évolutions des conditions de production compte tenu de la crise (en permettant la congélation d'une partie des volumes sous forme de caillé ou de fromages en blanc par exemple), tout en veillant à préserver ce qui fait la typicité de ces fromages. Le ministère chargé de l'agriculture a travaillé également avec le conseil national des appellations d'origine laitières sur l'évolution des dispositifs de régulation de l'offre de fromages sous indication géographique déjà mis en œuvre pour huit des fromages sous appellation, ou à la mise en place de telles règles pour de nouveaux fromages pour permettre une meilleure maîtrise de l'offre de ces derniers. Ces travaux ont par exemple conduit à adapter les règles de régulation de l'offre de l'appellation d'origine protégée Comté et à mettre en œuvre une nouvelle règle de régulation de l'offre pour l'indication géographique protégée raclette de Savoie. Avec la crise, la situation des populations les plus précaires se détériore et les besoins de soutien augmentent, en particulier en ce qui concerne les besoins alimentaires. Les producteurs et les entreprises de la filière font régulièrement preuve de solidarité en donnant une partie de leurs productions pour les personnes les plus démunies. Ces dons, qui peuvent être effectués par les producteurs ou par les entreprises de transformation, bénéficient d'une défiscalisation à hauteur de 60 % ou 75 % du don, en fonction des conditions réglementaires prévues par le code général des impôts. En juillet 2020, pour simplifier les procédures de passation des marchés publics dans le but de faciliter la relance de l'économie, un décret a été adopté. Ce décret autorise pour les produits alimentaires livrés avant le 10 décembre 2020, la conclusion de marchés publics sans publicité ni mise en concurrence lorsque le marché répond à un besoin inférieur à 100 000 euros hors taxes et porte sur la fourniture de denrées alimentaires qui ont été produites, transformées et stockées pendant la crise sanitaire (soit avant le 11 juillet 2020). Les mesures prises par le Gouvernement pour enrayer la propagation du virus lors de la deuxième vague de la covid-19 pourraient avoir des conséquences économiques pour les filières fromagères sous signe de qualité notamment en raison de la fermeture des restaurants et des incertitudes sur les consommations saisonnières liées aux fêtes de fin d'année et au tourisme hivernal. C'est pourquoi le Gouvernement a poursuivi et renforcé les dispositifs d'aide aux entreprises les plus touchées par les conséquences économiques de la crise sanitaire. Ainsi les opérateurs des filières des fromages sous indication géographique ayant subi des pertes importantes de chiffres d'affaires pourront être éligibles aux mesures de soutien aux entreprises mises en œuvre par le Gouvernement pour soutenir l'activité économique et l'emploi, telles que le fonds de solidarité et le dispositif d'exonération de cotisation sociales. En particulier, le secteur de la production de fromages sous indication géographique fait partie de la liste, définie par décret, des secteurs dont l'activité dépend des secteurs les plus touchés (bars et restaurants, tourisme, culture, évènementiel…), ce qui permet notamment de bénéficier d'une prise en charge de la perte de chiffre d'affaire supérieure à 1 500 euros dès lors que les autres critères d'éligibilité sont remplis. Le Gouvernement est aujourd'hui pleinement mobilisé pour assurer la relance de l'économie française et, notamment, celle des secteurs agricoles et agroalimentaires.

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