Question de Mme ESTROSI SASSONE Dominique (Alpes-Maritimes - Les Républicains) publiée le 15/10/2020

Mme Dominique Estrosi Sassone interroge Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales au sujet des intempéries qui ont frappé les Alpes-Maritimes les 2 et 3 octobre 2020.

Durant deux jours et une nuit, la tempête Alex a durement touché les Alpes-Maritimes. Plusieurs morts et disparus dont des pompiers portant secours sont à signaler, les communes sont défigurées, les routes sont effondrées, les ponts sont brisés, les maisons ont été inondées ou emportées par les flots, les dégâts humains et matériels sont immenses.

Depuis plusieurs années, le Parlement et les rapports d'experts sont unanimes, le fonds dit Barnier est complètement insuffisant face à l'ampleur des dégâts des catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes. Alors que ce fonds culmine en pratique à 127 millions d'euros, les dégâts, rien que dans les Alpes-Maritimes, sont estimés au lendemain de la tempête Alex entre 150 et 200 millions d'euros pour les travaux d'urgence mais devraient atteindre un milliard d'euros.

Le travail avec les compagnies d'assurance doit donc débuter pour réformer ce fonds sans faire peser de nouveaux coûts aux habitants des zones identifiées et exposées. De 1989 à 2018, 35 000 communes ont fait l'objet d'au moins une déclaration de catastrophe naturelle et la fédération française de l'assurance (FFA) reconnaît qu'il y aura un quasi-doublement des sinistrés à cause du changement climatique dans les années à venir.

Par ailleurs, la procédure de déclaration de catastrophe naturelle doit être révisée. Il faut la décentraliser et publier les avis et les rapports d'expertise pour expliquer les démarches menées dans les bureaux des ministères. Les élus locaux doivent pouvoir prendre la parole pour apporter leur témoignage de terrain, reflet de la réalité au moment de la catastrophe naturelle.

Ces réformes, le Sénat les a proposées dans le cadre d'une proposition de loi adoptée à l'unanimité moins le groupe La République en marche en janvier 2020 à l'issue d'une mission d'information consacrée aux catastrophes naturelles. Le Gouvernement s'était engagé à faire suivre ce texte à l'Assemblée nationale expliquant l'importance « d'aboutir rapidement à cette nécessaire réforme ».

Bien entendu, la crise sanitaire a stoppé le travail parlementaire de fond pour se consacrer à l'urgence économique et sociale mais désormais les sinistrés attentent des actes, les maires et plus largement les élus locaux sont en première ligne pour affronter le traumatisme des sinistrés qui ont parfois tout perdu mais également pour reconstruire les vallées de la Tinée, de la Roya et de la Vésubie.

Elle lui demande quelle suite elle entend apporter à la réforme de la gestion des catastrophes naturelles, quel concours financier pour les communes des Alpes-Maritimes et si le Gouvernement entend consacrer un volet du futur projet de loi de décentralisation aux catastrophes naturelles.

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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la relance


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé de l'économie sociale, solidaire et responsable publiée le 06/11/2020

Réponse apportée en séance publique le 05/11/2020

Mme le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, auteur de la question n° 1308, transmise à M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Mme Dominique Estrosi Sassone. Ma question porte sur les conséquences de la tempête Alex, qui a très durement frappé les Alpes-Maritimes, tout particulièrement dans les vallées de la Roya, de la Tinée et de la Vésubie. Cinquante-cinq communes des Alpes-Maritimes ont été déclarées en état de catastrophe naturelle, et le montant des dégâts, même s'il n'est pas encore complètement chiffré, serait compris entre 1 milliard et 1,5 milliard d'euros pour la reconstruction, qui sera titanesque.

Depuis plusieurs années, le Parlement, en particulier le Sénat, et les rapports d'experts sont unanimes pour dire que le fonds dit Barnier est insuffisant face à l'ampleur des catastrophes naturelles. Alors que ce fonds culmine en pratique à environ 130 millions d'euros, son transfert dans le budget général de l'État dans le projet de loi de finances pour 2021 ne l'étoffera pas suffisamment pour répondre aux besoins sans risquer de faire peser de nouveaux coûts sur les habitants des zones identifiées et exposées aux risques via une hausse des franchises d'assurances, ce qui serait particulièrement injuste.

Dans ces vallées sinistrées, la crise sanitaire est une épreuve supplémentaire, puisque le confinement risque de briser l'élan de solidarité. Le confinement met en exergue le traumatisme des sinistrés qui ont perdu leur habitation, puisqu'on leur demande maintenant de rester « chez eux ». Le Gouvernement doit entendre l'appel des maires, qui demandent un assouplissement du confinement dans les communes les plus touchées au profit d'un couvre-feu qui permettrait l'acheminement par les bénévoles du matériel de première nécessité et l'assistance aux populations, à commencer par un soutien moral qui est très important.

Enfin, les maires ont identifié un obstacle législatif, réglementaire et administratif à la reconstruction, à savoir le principe de construction dans la seule continuité territoriale. Instauré par la loi Montagne, ce principe risque demain de bloquer des projets de construction portés par les élus et les administrés.

Madame la secrétaire d'État, quel concours financier sera apporté par l'État aux communes pour la reconstruction à côté du fonds Barnier ? Le Gouvernement compte-t-il revoir la loi Montagne pour faciliter la reconstruction dans les vallées et éviter l'asphyxie des possibilités de construction ? Enfin, le Gouvernement va-t-il assouplir le confinement dans les communes les plus sinistrées pour que la solidarité nationale continue de s'exprimer pleinement ?

Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable. Madame la sénatrice Estrosi Sassone, je veux d'abord et avant tout témoigner de toutes mes pensées et du soutien de l'ensemble du Gouvernement envers les victimes, leurs proches et tous les habitants touchés par ce sinistre.

Je commencerai par votre question concernant les mesures sanitaires. Nous avons rendez-vous mercredi prochain pour faire le point sur la situation. Nous espérons que les contaminations auront alors baissé, mais je ne peux prendre aucun engagement concernant la levée du confinement dans les communes de ces vallées sinistrées. L'objectif est de couper les contaminations et de faire baisser l'intensité de la pandémie. Dans ces conditions, même si je sais que la situation est difficile, le Gouvernement ne souhaite pas modifier les choses dans les jours qui viennent.

À la suite des intempéries exceptionnelles, terribles, qui ont touché de nombreuses communes du département des Alpes-Maritimes, le Président de la République a indiqué dès le 2 octobre dernier que l'État prendrait toute sa part dans la phase de reconstruction.

Dès le 7 octobre, l'arrêté reconnaissant l'état de catastrophe naturelle pour cinquante-cinq communes du département des Alpes-Maritimes a été pris en conseil des ministres – il a été publié au Journal officiel du 8 octobre –, afin que les entreprises et les particuliers dont les immeubles assurés sont endommagés par les inondations et les coulées de boue soient indemnisés rapidement par leur assureur dans le cadre du régime des catastrophes naturelles.

Les sinistres causés sur les équipements publics non assurables des collectivités territoriales seront indemnisés par la dotation de solidarité en faveur des équipements des collectivités territoriales touchés par des événements climatiques.

En outre, conformément aux déclarations du Président de la République du 2 octobre, 100 millions d'euros seront rendus disponibles sur le budget de l'État pour répondre aux situations difficiles créées par les inondations dans les Alpes-Maritimes. Dans le même objectif, les ressources nettes de frais de gestion affectées au fonds Barnier, qui étaient jusqu'à présent plafonnées annuellement à hauteur de 131,5 millions d'euros, sont portées à 205 millions d'euros.

Nous sommes aussi extrêmement attentifs aux difficultés rencontrées par les particuliers et les professionnels touchés par ces événements climatiques. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a engagé une réflexion profonde en vue d'une réforme du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles.

Mme le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour la réplique.

Mme Dominique Estrosi Sassone. Ce que nous souhaitons, c'est que cet engagement et la solidarité nationale s'inscrivent dans la durée. Il est vrai que la réactivité a été immédiate, mais nous devons maintenant nous inquiéter de la manière dont ces vallées vont pouvoir revivre et se reconstruire.

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