Question de Mme GOULET Nathalie (Orne - UC) publiée le 29/10/2020

Question posée en séance publique le 28/10/2020

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Nathalie Goulet. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, je veux d'abord vous féliciter, vous et l'ensemble du Gouvernement, des mesures de dissolution, prises il y a quelques jours, du collectif Cheikh Yassine et, ce matin, de BarakaCity. Nous les attendions depuis longtemps. C'est désormais chose faite.

Mais, depuis quelques jours, des attaques d'une violence inacceptable contre le Président de la République et contre la France se propagent via des médias des pays arabes et des médias turcs, qui sont autant de vecteurs de haine, pouvant inciter à la violence physique. Tour Eiffel ensanglantée, discours haineux ou gravement antisémites, appels à la violence… La chaîne qatarienne Al-Jazeera en arabe multiplie les attaques, comme la chaîne turque TRT.

On sait que le Qatar et la Turquie soutiennent la mouvance des Frères musulmans, dont j'ai demandé à de multiples reprises l'interdiction en France. Leur leader Youssef Al-Qaradawi, interdit de séjour dans de nombreux pays européens, multiplie les appels à la haine. L'un des derniers en date était un hommage appuyé au travail d'Hitler, dans lequel il précisait que, même en chaise roulante, il irait abattre des juifs !

Nous avons, monsieur le ministre, les outils juridiques : le 4 de l'article 2 de la directive européenne sur les services de médias audiovisuels, qui a été retranscrite dans la loi du 30 septembre 1986. Les services télévisuels sont soumis au contrôle du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), particulièrement vigilant pour réprimer l'incitation à la haine, à la violence ou d'autres manquements. Il y a dix ans, le CSA avait interdit la chaîne du Hamas, Al-Aqsa, et même la chaîne Al-Manar. Or la situation, en 2010, était bien moins grave que celle que nous connaissons aujourd'hui.

Dès lors, ma question est simple, monsieur le ministre : allez-vous engager des procédures pour interdire la chaîne Al-Jazeera et la chaîne TRT des réseaux français ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 29/10/2020

Réponse apportée en séance publique le 28/10/2020

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur. Madame la sénatrice, permettez-moi de vous remercier des propos d'encouragement que vous avez adressés au Gouvernement de la République pour les décisions difficiles qu'il a à prendre.

Le collectif Cheikh Yassine, créé en 2004, a effectivement été dissous la semaine dernière en Conseil des ministres. L'association BarakaCity, créée en 2010, l'a été ce matin à la demande du Président de la République. D'autres suivront, à la demande de celui-ci. Nous pensons au Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF), dont la dissolution sera proposée au Premier ministre dans les semaines qui viennent.

Vous évoquez la question des réactions internationales. Le discours dans lequel le Président de la République a déclaré vouloir couper les influences étrangères des affaires intérieures françaises était juste : en France, nous considérons que les Français de confession musulmane ne relèvent d'aucune puissance étrangère. Nous considérons qu'il s'agit d'affaires françaises, dans le respect de la souveraineté française. Nous dénions à tout dirigeant, aussi grand son pays soit-il – la Turquie, par exemple –, la possibilité de se mêler des affaires françaises.

Troisièmement, vous avez évoqué la question des chaînes télévisées. Je veux apporter deux réponses, sous l'autorité du Premier ministre.

Le CSA est une autorité administrative indépendante qui peut prendre des dispositions. Je sais que le Premier ministre, à la demande du Président de la République, avec la ministre chargée de la culture et de la communication, aura l'occasion d'évoquer ce point avec le président du CSA, pour qu'une éventuelle mesure soit prise. L'autorité administrative indépendante y répondra.

Surtout, nous menons actuellement une négociation très importante : celle de la directive que met en place la Commission européenne. La semaine dernière, le Premier ministre et Clément Beaune ont discuté avec la présidente de la commission et le commissaire Thierry Breton pour que la directive Digital Services Act, dite « DSA », qui permet de lutter contre la haine en ligne et contre un certain nombre de vecteurs de communication, pour les encadrer, voire les interdire, soit transposée dans la loi française via le projet de loi dit « séparatisme », que j'aurai l'honneur de défendre devant le Parlement. Je suis sûr que, à ce moment, vous aiderez la France à avoir les moyens de lutter contre ses ennemis de l'extérieur ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour la réplique.

Mme Nathalie Goulet. Monsieur le ministre, je suis un peu déçue. Je ne suis pas d'accord pour que l'on attende le projet de loi « séparatisme » !

Nous subissons des attaques tous les jours. Celles, insupportables, qui ont été lancées contre le Président de la République française ne doivent pas continuer.

La directive donne au CSA les moyens de prendre des mesures de suspension provisoire. Il est extrêmement important que l'on n'attende pas une directive européenne et un texte de loi pour prendre des décisions.

M. le président. Il faut conclure.

Mme Nathalie Goulet. Vous savez très bien que ces vecteurs de haine peuvent entraîner de la violence physique sur nos concitoyens. Samuel Paty l'a payé. Il faut agir ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)

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