Question de Mme PONCET MONGE Raymonde (Rhône - GEST) publiée le 26/11/2020

Mme Raymonde Poncet Monge attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation en Palestine.

Alors que la pandémie occupe les esprits, la situation des Palestiniens ne cesse d'empirer.

À Jérusalem d'abord : on apprend l'expropriation de 200 commerces palestiniens à Jérusalem-Est, des projets de construction de 96 logements dans la colonie de Ramat, 1 200 dans la colonie de Givat Hamatos, des ordres de démolitions et d'expropriations dans les quartiers palestiniens de Sheikh Jarrah et de Silwan, la privation de tout droit élémentaire, sans compter le harcèlement par les autorités israéliennes sur la base de la loi du 8 mars 2018 par laquelle elles prétendent bannir de Jérusalem les Palestiniens pour « défaut d'allégeance ».

Dans la vallée du Jourdain également. Le mardi 3 novembre 2020, une nouvelle démolition de grande envergure a eu lieu à Humsa al-Fuqa. Selon le bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA), les habitats de 74 personnes dont 41 enfants ont été détruits ainsi que nombre d'infrastructures, dont certaines financées par la France et l'Union européenne. L'escalade est gravissime : c'est la destruction la plus importante menée par les autorités israéliennes en dix ans.

Depuis le début de l'année 2020, Israël a détruit plus de 670 structures palestiniennes et privé de toit 869 Palestiniens. La destruction de propriétés dans des territoires occupés est une violation du droit international humanitaire tout comme le déplacement forcé de populations est un crime de guerre. Enfin, la colonisation en Cisjordanie progresse (plus de 413 000 colons y résident, hors Jérusalem-Est). Une annexion de fait est en cours sur le terrain.

Les condamnations de la France et de l'Union européenne ne suffisent plus. Le temps des sanctions est venu. Le 24 juin 2020, le ministre des affaires étrangères a annoncé devant le Sénat une série de mesures en cas d'annexion formelle d'une partie de la Cisjordanie, notamment le renforcement des mesures de différenciation, la remise en cause de la participation d'Israël à différents programmes de coopération européens ou l'accord d'association UE-Israël. Ce dernier point est d'autant plus d'actualité qu'après la signature des accords de normalisation Israël-Émirats arabes unis-Bahreïn, certains envisagent de reprendre les réunions du conseil d'association, stoppées en 2012.

Ainsi, elle lui demande quelles actions concrètes la France compte prendre, au sein de l'UE et de manière bilatérale, à l'encontre de la politique d'Israël pour mettre fin à l'occupation de Jérusalem-Est et au harcèlement dont sont victimes les Palestiniens de Jérusalem, empêcher ces destructions illégales d'infrastructures et obtenir des réparations. Elle lui demande si, face à l'annexion de facto de la Cisjordanie occupée, la France va mettre en œuvre les mesures de sanctions annoncées le 24 juin 2020 et si au sein de l'UE, la France compte peser pour empêcher la reprise des réunions du conseil d'association UE-Israël.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès des ministres de l'économie, des finances et de la relance, et de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques publiée le 16/12/2020

Réponse apportée en séance publique le 15/12/2020

Mme le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, auteure de la question n° 1382, adressée à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Mme Raymonde Poncet Monge. Alors que la pandémie occupe les esprits, la situation des Palestiniens se dégrade de jour en jour. À Jérusalem-Est, transferts forcés, expropriations, destructions et privations des droits élémentaires se multiplient. Les projets de construction de colonies de peuplement s'accélèrent : 1 257 sont en cours.

Les Palestiniens sont privés de droits et harcelés par les autorités israéliennes sur le fondement de la loi du 8 mars 2018 par laquelle elles prétendent bannir de Jérusalem les Palestiniens pour « défaut d'allégeance ». Dans la vallée du Jourdain, le 3 novembre, les habitats d'un village bédouin de 74 personnes, dont 41 enfants, ont été détruits, ainsi que des infrastructures financées par la France et l'Union européenne.

Israël a détruit plus de 670 structures palestiniennes et privé de toit 869 Palestiniens. La destruction de propriétés dans des territoires occupés viole le droit international humanitaire tout comme le déplacement forcé de populations est un crime de guerre. Nous ne protégeons pas notre compatriote Salah Hamouri et sa famille, qui sont persécutés.

En Cisjordanie occupée, la colonisation progresse : plus de 413 000 colons y résident désormais, et cela continue.

Ne nous payons pas de mots, monsieur le secrétaire d'État : une annexion de fait est en cours !

Que compte enfin faire la France, au sein de l'Union européenne et de manière bilatérale, pour mettre fin à ce processus ininterrompu de violations du droit international ? Va-t-elle se contenter de formuler de nouveaux regrets et des condamnations ou va-t-elle enfin prendre des mesures à même de stopper cette politique israélienne du fait accompli ?

Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Cédric O, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Madame la sénatrice, la France est attachée à la solution des deux États, sur le fondement du droit international et des paramètres agréés. Il n'y a pas d'autre solution en vue d'un règlement juste et durable du conflit israélo-palestinien.

Dans ce cadre, notre pays fait de la préservation de la présence palestinienne à Jérusalem-Est l'une de ses priorités. À cet égard, je tiens à rendre hommage ici à l'action des collectivités territoriales, qui jouent, par leurs actions de coopération, un rôle de pointe en soutien à la résilience de la population palestinienne, notamment à Jérusalem-Est.

La colonisation est contraire au droit international. Elle réduit la possibilité d'un État palestinien contigu et viable. Elle attise les tensions déjà vives sur le terrain et fragilise la confiance entre les parties, qui est nécessaire en vue d'une reprise du dialogue. La France appelle régulièrement les autorités israéliennes à s'abstenir de toute mesure en matière de colonisation.

Cette position se traduit par des mesures concrètes.

Premièrement, nous nous coordonnons avec nos principaux partenaires européens pour réagir de manière conjointe et cohérente à l'accélération de la politique de colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, à travers la construction de nouveaux logements dans les colonies et les démolitions d'infrastructures palestiniennes. La colonie de Givat Hamatos, que vous avez évoquée, constitue un motif particulier de préoccupation, car les constructions envisagées seraient particulièrement graves pour la solution des deux États.

Deuxièmement, nous veillons à l'introduction dans tous les accords bilatéraux avec Israël de clauses territoriales, afin de matérialiser la distinction juridique entre le territoire d'Israël et les territoires occupés.

Troisièmement, nous avons soutenu la mise en place d'un étiquetage différencié des produits des colonies.

Concernant les accords qui régissent les relations entre l'Union européenne et Israël, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a souligné en juin qu'une décision d'annexion ne pourrait rester sans conséquence. La suspension de l'annexion dans le cadre de l'accord de normalisation entre Israël et les Émirats arabes unis est, à cet égard, un pas dans la bonne direction : nous demandons que cette mesure devienne définitive.

La normalisation des relations entre États arabes et Israël est une chance pour la région. Elle doit s'accompagner d'une reprise du dialogue entre Israéliens et Palestiniens. C'est le sens des efforts entrepris par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères avec ses homologues allemand, égyptien et jordanien.

Une nouvelle réunion sera organisée au Caire prochainement à la suite de celle qui a été organisée à Amman en septembre dernier. Les parties seront associées au processus.

Mme le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour la réplique.

Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le secrétaire d'État, je suis tout de même un peu surprise de constater que les réponses n'ont pas beaucoup évolué depuis le débat organisé au Sénat en juin dernier. Les mêmes arguments nous sont répétés. En gros : si cela continue, nous agirons !

Depuis ce débat, la situation des Palestiniens de Jérusalem continue de s'aggraver de jour en jour. La planification méthodique de leur éviction se déroule sur fond d'impuissance de la France, dont la parole n'est pas respectée.

Monsieur le secrétaire d'État, le temps de l'action, des sanctions et du courage politique est venu. Une majorité de parlementaires vous le demande, en regard des propos qu'a tenus M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères lors du débat organisé au Sénat en juin.

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