Question de M. GONTARD Guillaume (Isère - GEST) publiée le 05/11/2020

M. Guillaume Gontard interroge Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement, sur la situation des personnes sans domicile fixe en période de couvre-feu. Le Président de la République a annoncé le 15 octobre 2020 l'entrée en vigueur d'un couvre-feu en Île-de-France et dans huit grandes métropoles dans l'espoir de ralentir la propagation de la pandémie de Covid-19. La situation ne semble, hélas, pas s'améliorer.
Faut-il rappeler que 250 000 personnes, selon le dernier rapport annuel de la fondation abbé Pierre, n'ont pas la possibilité de rentrer chez eux à 21 heures parce que précisément ces personnes n'ont pas de domicile ? Elles sont par définition dans l'impossibilité évidente de respecter le couvre-feu et redoutent l'amende de 135 euros qu'elles pourraient recevoir. Le comble du cynisme !
C'est principalement dans les grandes agglomérations que survivent les personnes sans domicile, dont les demandeurs d'asiles et les personnes faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français.
Mardi 6 octobre 2020, Médecins sans frontières a alerté sur le taux élevé de contamination chez les personnes en situation de grande précarité. Des milliers de personnes composent le 115 chaque jour dans l'espoir de trouver un hébergement, parfois et trop souvent vainement. Plusieurs centaines de personnes se retrouvent sans solution pour la nuit et se voient en outre privées du soutien précieux et indispensable des maraudeurs qui, à ce jour, ne bénéficient pas de dérogation pour assurer leur mission auprès des plus fragiles après 21 heures. Pour rappel, la situation des personnes sans domicile n'est à ce jour pas non plus répertoriée parmi les motifs dérogatoires sur le site internet du service public. Parmi ces gens, des demandeurs d'asiles, parfois avec des enfants, se retrouvent à errer chaque nuit faute de prise en charge. Pourtant, par un arrêt de 2 juillet 2020, la Cour européenne des droits de l'homme a condamné la France pour avoir violé l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme en laissant des demandeurs d'asile à la rue plusieurs mois durant.
Dans ce contexte de vulnérabilité exacerbée par la propagation du virus, il lui demande de bien vouloir préciser les mesures qu'elle compte prendre et dans quels délais pour protéger les personnes sans domicile dont les demandeurs d'asile et personnes faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF), et par extension la population dans son ensemble et ce de façon digne et inconditionnelle.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre de la transition écologique - Logement publiée le 11/11/2021

On estime en France qu'environ 300 000 personnes sont sans domicile fixe, ce qui ne veut pas dire pour autant qu'elles dorment à la rue. En effet, 300 000 places d'hébergement sont ouvertes à ce jour, 200 000 dans le parc d'hébergement généraliste et 100 000 dans le parc spécialisé pour les demandeurs d'asile. On estime, d'après les recensements ponctuels qui ont été réalisés récemment dans des grandes métropoles, que moins de 10 000 personnes sont sans abri, c'est-à-dire qu'elles dorment à la rue au sens de l'INSEE (c'est-à-dire ayant passé la nuit précédant l'enquête dans un lieu non prévu pour l'habitat), auxquelles il faut ajouter les personnes dormant dans des campements ou des bidonvilles. Dans le cadre de la crise sanitaire liée à la COVID-19 et des restrictions de circulation, une tolérance a évidemment été appliquée pour les publics précaires se trouvant dans l'impossibilité de produire une attestation justifiant leurs déplacements afin de ne pas entraîner un renoncement à l'accès à des dispositifs essentiels et inconditionnels. Dans une instruction en date du 27 mars 2020, il a été demandé aux préfets de rappeler aux forces de l'ordre le discernement dont elles devaient faire preuve lors du contrôle du public sans domicile fixe ou en situation de grande précarité. Les préfets ont également organisé un dispositif de suivi téléphonique pour mobiliser les personnels des maraudes afin d'éviter les déplacements des personnes à la rue. Au final, peu de situations ont été réellement remontées et elles se sont réglées sans préjudice pour les personnes. En ce qui concerne la veille sociale, les acteurs du secteur ont pu continuer leurs activités en cochant la case « assistance aux personnes vulnérables ou précaires » sur leur attestation. Ils disposent donc bien de l'ensemble des possibilités d'accomplir leur mission. En outre, des équipes mobiles sanitaires pluridisciplinaires ont été déployées sur l'ensemble du territoire afin de diagnostiquer, d'orienter et d'assurer le suivi sanitaire des personnes sans domicile ou en situation de grande précarité. Surtout, dès le début de la crise sanitaire, les services de l'État se sont organisés avec les associations pour mettre à l'abri les plus démunis, avec l'ouverture de plus de 40 000 places supplémentaires d'hébergement dans le parc généraliste. La préfecture d'Île-de-France a aussi organisé des opérations de mise à l'abri pour les publics migrants et des maraudes dans les campements afin d'orienter ces publics soit vers les hébergements du dispositif dédié aux demandeurs d'asile soit vers le 115. Concernant les tensions observées dans les régions confrontées aux flux migratoires les plus importants, 3 000 places sont créées dans des Centres d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA), où ces derniers sont hébergés en attente de l'instruction de leur demande du statut de réfugié, et 1 000 autres dans des Centres d'accueil et d'examen des situations (CAES), sorte de premier sas permettant l'orientation, notamment des familles et femmes avec enfants, en fonction de leur situation administrative. Ces 4 000 places nouvelles viendront s'ajouter aux places déjà existantes dans le dispositif national d'accueil, avec environ 43 000 en CADA et 64 000 dans les autres structures dont 8 700 places en centres provisoires d'hébergement (CPH) pour les personnes les plus vulnérables : jeunes de moins de 25 ans, couples avec enfants sans ressources, personnes isolées.

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