Question de M. DUPLOMB Laurent (Haute-Loire - Les Républicains) publiée le 19/11/2020

M. Laurent Duplomb appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la nécessité de mieux réfléchir et d'affiner les financements actuellement consacrés à l'agriculture de précision, qui est indispensable pour réussir la transition agro-écologique.
Dans son plan de relance, le Gouvernement prévoit de miser sur l'innovation pour réduire l'usage des produits phytopharmaceutiques. Pour ce faire, 135 millions d'euros sont prévus afin de mettre en place une prime à la conversion des agroéquipements. Cette appréhension de l'agriculture de précision par le seul prisme des pulvérisateurs et autres agroéquipements apparaît beaucoup trop réductrice et limitée. Elle ne saurait donner sa pleine mesure à l'agriculture de précision, qui concerne tous les types d'agricultures (y compris biologique) et qui doit commencer avec un accompagnement financier des agriculteurs dans la réalisation d'un diagnostic précis d'hétérogénéité de leurs sols. Bien appréhendée, l'agriculture de précision peut également dépasser le seul champ des produits phytopharmaceutiques et permettre des réductions d'usage de l'ensemble des intrants (notamment des engrais azotés afin de satisfaire plus largement aux ambitions climatiques nationales et européennes affichées). L'une des idées directrices de l'agriculture de précision est d'abord de partir du sol des exploitations (qui est hétérogène), de le comprendre parfaitement et de s'y adapter grâce à une analyse intra-parcellaire. La cartographie des sols est ainsi un préalable indispensable. Ce n'est qu'à ce prix qu'il est effectivement possible de moduler ensuite - grâce à des agroéquipements plus performants et adaptés - les interventions culturales et de réduire de manière significative les doses d'intrants en tout point de la parcelle pour apporter la bonne dose, au bon endroit et au bon moment. Il en résulte par la même occasion des économies importantes pour l'agriculteur, qui voit ses charges liées aux achats d'intrants se réduire et ainsi son revenu mieux préservé.
En outre, favoriser cette approche des diagnostics intra-parcellaires aurait comme conséquence de créer de nouveaux emplois de services dans le secteur agricole (laboratoires d'analyses de terre, prestataires techniques, accompagnement des agriculteurs, métiers de services digitaux) et partout sur le territoire. Dans le cadre du plan de relance ou de la PAC, il lui demande donc si le Gouvernement envisage de favoriser un accompagnement spécifique des agriculteurs dans la réalisation de ces diagnostics d'hétérogénéité des sols, préalable indispensable à la modernisation des agroéquipements qu'il entend encourager.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 04/02/2021

L'analyse de terre est un outil d'aide à la décision indispensable aux agriculteurs afin d'optimiser la fertilisation, et donc à la fois les performances économiques et la limitation des impacts environnementaux. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation conduit et accompagne depuis de nombreuses années le développement de la connaissance des sols au bénéfice notamment des exploitants agricoles. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation anime un dispositif d'agrément des laboratoires d'analyses de terre afin que les acteurs faisant appel à des prestations disposent de résultats d'une qualité homogène et fiable pour orienter les décisions de gestion sur l'ensemble du territoire. Par ailleurs, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation co-préside et soutient le groupement d'intérêt scientifique sur les sols (Gis Sol) depuis près de 20 ans. Ce Gis favorise le développement des connaissances sur les sols notamment la caractérisation pédologique des sols, via le programme inventaire gestion et conservation des sols (IGCS). Les référentiels régionaux pédologiques issus du programme IGCS sont disponibles depuis mars 2020 sur le géoportail de l'institut national de l'information géographique et forestier. Le réseau mixte technologique sols et territoires, également soutenu par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, développe en complément des travaux permettant le passage des typologies de sols pédologiques à des typologies agronomiques (typterres) plus facilement utilisables par les acteurs de l'agriculture et mobilisables pour les outils d'aide à la décision (OAD). Le Gis Sol conduit aussi des programmes de suivi de la qualité des sols (également à des échelles nationales et régionales). Face à la multiplication des recherches pour diversifier les méthodes d'appréciation de la qualité des sols (biologiques, physiques, chimiques, voire physiques embarquées), le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a publié en 2017 un « Tour d'horizon des indicateurs relatifs à l'état organique et biologique des sols », en s'appuyant sur un panel d'experts. Concernant plus précisément les analyses de terre intraparcellaires, elles permettent en effet d'affiner la décision du gestionnaire disposant d'équipements, afin de moduler les itinéraires techniques à l'échelle parcellaire voire intraparcellaire. Pour autant, l'enquête « Pratiques culturales en grandes cultures » menée par les services statistiques du ministère de l'agriculture montre que la modulation intraparcellaire de l'apport d'azote ne concerne encore qu'une part restreinte des surfaces : cette part atteint 10 % pour les cultures de soja et de blé dur et apparaît encore plus faible pour toutes les autres cultures enquêtées. Des centaines de milliers d'analyses de terre étant réalisées annuellement, il serait opérationnellement très complexe de mobiliser le plan de relance pour soutenir ces analyses. En revanche, il existe des dispositifs qui soutiennent la réalisation d'analyse de sols, dans un cadre plus global d'accompagnement de la transition agro-écologique de l'agriculture (mesure agro-environnementale et climatique « sols » par exemple) ou des paiements pour service environnementaux.

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