Question de M. PACCAUD Olivier (Oise - Les Républicains-R) publiée le 24/12/2020

M. Olivier Paccaud attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la politique menée en faveur de la sécurité routière.
Le Gouvernement a fait le choix de sanctionner plutôt que de sensibiliser aux dangers de la route. La France est d'ailleurs devenue la championne des radars, mobilisant ses actions sur la vitesse et la multiplication des radars, sans pour autant gagner en efficacité.
Il souhaite savoir si le Gouvernement compte revoir sa copie en incitant les conducteurs à améliorer leur pratique au volant plutôt que de sanctionner sans ménagement.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur - Citoyenneté publiée le 20/01/2021

Réponse apportée en séance publique le 19/01/2021

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Paccaud, auteur de la question n° 1441, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

M. Olivier Paccaud. Madame la ministre, depuis de nombreuses années, la sécurité routière est devenue une cause nationale. Même si le bilan annuel reste toujours dramatiquement élevé, avec plus de 3 000 morts, nous sommes désormais loin des hécatombes des années 1970, lorsque plus de 16 000 de nos compatriotes perdaient la vie sur les routes tous les ans.

Nos voitures sont devenues plus sûres, les routes sont aussi plus sécurisées. La ceinture de sécurité, le permis à point, les limitations de vitesse, les campagnes de prévention et la pédagogie ont porté leurs fruits ; la sanction aussi, probablement, par l'installation de radars.

Cependant, depuis quelques années, un plancher semble atteint et le nombre de décès liés à la circulation ne baisse plus. Par ailleurs, la multiplication des radars ne fait pas consensus et est ressentie par les Français non plus uniquement comme un instrument de sécurité routière, mais plutôt comme une arme fiscale déguisée. C'est ainsi que les radars sont devenus la cible prioritaire des « gilets jaunes » voilà deux ans.

Aussi, alors que de nouveaux radars « tourelles » sont en cours d'installation, ne serait-il pas judicieux d'orienter une part minime – 10 %, par exemple – des crédits consacrés à ces équipements vers la mise en place de radars pédagogiques, bien moins coûteux, mais tout aussi utiles ? Certes, ils ne rapportent pas un centime à l'État, mais ils font ralentir la plupart des automobilistes raisonnables. N'est-ce pas là le but ?

Quand on sait qu'un radar pédagogique coûte en moyenne 2 000 euros, alors que la plantation d'un radar « tourelle » est de plus de 32 000 euros, quand on sait aussi que de nombreux élus de petites communes souhaitent sécuriser la traversée de leur commune via ces machines, ne pourrait-on pas envisager la création d'enveloppes départementales spécifiquement dédiées à ces outils, par l'intermédiaire des préfectures ? Ne serait-ce pas là un bon moyen de démontrer à nos concitoyens que le Gouvernement s'intéresse plus à leur sécurité qu'à leur portefeuille ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur, les radars routiers sont d'abord un instrument de prévention. Vous l'avez rappelé : leur but est de faire ralentir les automobilistes et d'éviter un certain nombre d'accidents. La quasi-totalité des dispositifs de contrôle installés est d'ailleurs signalée par des panneaux très visibles. Les radars déployés, dont le nombre a été limité à 4 700 par une décision du comité interministériel de sécurité routière de 2015, ont d'abord une vocation préventive – j'insiste sur ce point.

Depuis l'installation d'un premier radar automatique en octobre 2003, le nombre de morts est passé de 5 731 au cours de cette même année à 3 244 en 2019 en France métropolitaine, soit une baisse de 43 % en quelques années. Selon les experts, une part très significative de cette baisse peut être directement attribuée à la politique de déploiement de ces radars.

S'il est vrai qu'ils ont aussi pour objet de permettre la constatation des infractions aux règles de vitesse et la verbalisation de leurs auteurs, ils constituent un élément fondamental de la politique de prévention des accidents de la route.

Votre affirmation d'une « multiplication » des radars est donc vraiment sujette à débat. Il a certes fallu remplacer et moderniser un certain nombre de radars entre 2019 et 2020, mais le programme des radars « tourelles », en cours de déploiement, n'a pas pour objet d'en augmenter le nombre. Il en va de même du programme d'externalisation de la conduite des voitures radars, désormais déployé dans quatre régions. Un tel déploiement, qui va se poursuivre en 2021 dans quatre nouvelles régions, a, là encore, une vocation préventive ou de remplacement.

Enfin, vous m'interrogez sur les intentions du Gouvernement concernant le comportement des conducteurs. Je vous confirme que notre intention est bien d'inciter les usagers de la route, au-delà des seuls conducteurs d'automobiles, à adopter une conduite plus apaisée et à partager plus harmonieusement l'espace public. C'est bien cet esprit qui inspire la dernière campagne de communication de la sécurité routière, largement diffusée à la télévision et sur les réseaux sociaux, qui rappelle que les transgressions quotidiennes des règles de sécurité routière se traduisent parfois par des drames.

C'est cet esprit qui guide quotidiennement les services de l'État, seuls ou en concertation avec leurs partenaires, associations ou élus locaux, pour concevoir, encadrer et organiser, chaque jour, sur le terrain, des dizaines d'actions d'éducation et de prévention sur les risques routiers, notamment dans les écoles, les collèges et les entreprises.

Permettez-moi de saluer leur engagement et leur mobilisation et de vous assurer, monsieur le sénateur, que le Gouvernement a fait le choix de poursuivre cette politique de prévention et d'éducation routière, dont les radars ne forment qu'une toute petite partie.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour la réplique.

M. Olivier Paccaud. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, mais je ne vous ai pas entendue parler des radars pédagogiques. Je pense pourtant sincèrement qu'ils peuvent jouer un rôle en matière de prévention. La proposition – modeste – que j'avance mérite donc à mon sens d'être examinée.

Il convient d'allier prévention et sanction, efficacité et sagesse, et d'adresser un message de confiance et de responsabilité aux Français, pour qui – je le dis très sincèrement ; n'y voyez là aucune marque de cynisme ou de provocation – radar rime trop souvent avec piège, tirelire ou « pompe à fric ».

Vous dites enfin que les radars sont signalés. Or ce n'est pas le cas des radars « tourelles » dans mon département. Mieux vaudrait privilégier les outils qui permettent aux automobilistes de ralentir à l'entrée des agglomérations.

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