Question de M. BOULOUX Yves (Vienne - Les Républicains) publiée le 10/12/2020

M. Yves Bouloux attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur la nécessité d'adapter la réponse pénale à la violence de la délinquance.

Récemment, les représentants de la conférence nationale des procureurs ont alerté le Gouvernement sur la violence de la délinquance.

Après une période d'accalmie observée pendant le premier confinement, la délinquance est en effet repartie à la hausse, avec une délinquance du quotidien dure et violente.

Selon eux, les peines alternatives ne correspondent plus à la réalité des dossiers. Si la régulation carcérale est nécessaire, certains criminels ne peuvent faire l'objet d'une détention à domicile, mais doivent faire l'objet d'une incarcération.

Aussi, il souhaite connaître les mesures que compte prendre le Gouvernement à la suite de ce message d'alerte formulé par la conférence nationale des procureurs.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 22/04/2021

La lutte contre les infractions qui altèrent les conditions de vie au quotidien des citoyens par l'insécurité qu'elles génèrent est une priorité de l'action du ministère de la justice. A ce titre, la circulaire de politique pénale générale du 1er octobre 2020 appelle l'attention des procureurs et procureurs généraux sur toutes les formes de violences, et notamment les violences urbaines. En matière criminelle et correctionnelle, depuis le début des années 2000, on observe une hausse de la sévérité des peines prononcées, notamment en matière de justice correctionnelle des majeurs. La fréquence du prononcé de l'emprisonnement ferme gagne 7 points que le condamné soit en état de récidive légale (passant de 54 à 61 %) ou non (passant de 21 à 28 %). Le quantum moyen ferme de cet emprisonnement est également en hausse. Pour les majeurs, il gagne un mois sur la période, que le condamné soit en état de récidive (9,2 mois en moyenne 2016-2020) ou non (8,3 mois). En cas de récidive, ce quantum moyen n'a d'ailleurs pas diminué après l'abrogation des peines planchers en 2014. Le taux de mise à exécution de ces peines traduit également le souci du ministère de la justice et des parquets de veiller à ce que les peines prononcées soient exécutées. Ce taux est de 84 % lorsque la peine est prononcée contradictoirement (lorsque la personne est présente lors de son jugement) et de 59 % lorsque la condamnation est contradictoire à signifier (lorsque la personne est absente lors de son jugement). Néanmoins, la privation de liberté, qui s'entend parfaitement pour les faits les plus graves, ne saurait constituer la seule réponse pénale adaptée à l'égard des délinquants mais aussi des récidivistes, en particulier concernant les courtes peines dont il est établi qu'elles sont inefficaces pour lutter contre la récidive. L'individualisation des peines et de leur exécution au regard de la personnalité, des problématiques personnelles et de l'évolution des personnes condamnées a en revanche un réel impact sur leur réinsertion et, partant, favorise la prévention de la récidive tout en évitant la désocialisation résultant d'une incarcération. Ce principe préside, depuis plusieurs années, au développement des aménagements de peine et des alternatives à l'incarcération. Ainsi, en consacrant le principe de l'individualisation de la peine et en renforçant le principe de motivation générale du choix de la peine, la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice invite le juge à déterminer la peine adaptée au prévenu en prenant en compte les circonstances de l'infraction et, par là même, la gravité des faits, ainsi que la personnalité de son auteur et sa situation matérielle, familiale et sociale. Par ailleurs, si cette loi préconise de favoriser le développement des alternatives à l'incarcération lorsque la nature des faits et la personnalité du condamné le justifient, elle n'exclut pas dans les situations les plus graves et lorsque les circonstances l'exigent, le prononcé d'un mandat de dépôt ou d'une peine d'emprisonnement. Les condamnations n'en restent pas moins prononcées par des juridictions qui apprécient souverainement et en toute indépendance la justesse de la peine à prononcer.

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