Question de Mme LOPEZ Vivette (Gard - Les Républicains) publiée le 17/12/2020

Mme Vivette Lopez attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le mouvement des black blocs ainsi que sur les violences et saccages auxquels il est associé.

On constate en effet que si les blacks blocs agissaient, au début des années 2000, principalement lors des sommets internationaux, chaque manifestation nationale est désormais marquée par la présence de ces groupuscules ultra violents qui, sous prétexte de manifester, importent dans les cortèges des méthodes radicales et paramilitaires. Les forces de l'ordre doivent ainsi faire face à des émeutiers et des casseurs qui commettent pillages et dégradations d'une ampleur inédite et qui essaient délibérément de s'en prendre à leur intégrité physique. Ces comportements répétés ne sont pas acceptables dans un État de droit.

Face à l'escalade de la violence, et parce que la nature même des black blocs (les black blocs n'ont pas d'existence juridique : ils n'ont pas de siège, ni de représentant, et ne sont pas constitués en association) rend difficile leur dissolution, l'État français a décidé de muscler, en 2019, son arsenal législatif pour lutter contre les black blocs , en adoptant la loi n° 2019-290 du 10 avril 2019 visant à renforcer et garantir le maintien de l'ordre public lors des manifestations. Force est pourtant de constater que la situation a empiré et que les mesures existantes sont inefficaces face à un phénomène désormais chronique.

Aussi, elle lui demande les mesures que le Gouvernement entend prendre pour mettre un terme à la présence des black blocs lors des manifestations afin que l'ordre public et le droit à manifester soient garantis.

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 18/02/2021

Le maintien de l'ordre a profondément évolué ces dernières années sous l'effet de plusieurs phénomènes. De nouvelles formes de mobilisation sont observées depuis plusieurs années, ainsi qu'une radicalisation croissante des mouvements de contestation. Ce retour de la radicalité se conjugue avec des mobilisations caractérisées par leur imprévisibilité, l'absence fréquente de déclaration ou de service d'ordre et un refus de l'exercice codifié des manifestations tel qu'il a pu exister dans le passé. Ces évolutions mettent gravement en cause la liberté de manifester et la capacité de la garantir. Une rénovation des principes du maintien de l'ordre était nécessaire pour répondre à ce nouveau contexte. Après de premiers ajustements apportés aux techniques de maintien de l'ordre, une révision en profondeur de la doctrine a été engagée. Ce travail, qui a associé l'ensemble des services concernés du ministère et des personnalités extérieures, a abouti à l'élaboration d'un nouveau schéma national du maintien de l'ordre (SNMO), présenté par le ministre de l'intérieur le 11 septembre 2020. Plusieurs de ses mesures sont immédiatement applicables. D'autres seront mises en œuvre progressivement. Parallèlement, l'arsenal juridique a été renforcé, avec le décret du 20 mars 2019 instituant une contravention pour participation à une manifestation interdite sur la voie publique et la loi n° 2019-290 du 10 avril 2019 visant à renforcer et garantir le maintien de l'ordre public lors des manifestations. Le nouveau SNMO, commun aux différentes forces et accessible au public, développe une doctrine protectrice pour les manifestants et ferme avec les auteurs de violences. Il s'agit en effet de concilier deux objectifs prioritaires : permettre à chacun de s'exprimer librement dans les formes prévues par la loi et empêcher tout acte violent contre les personnes et les biens à l'occasion des manifestations. Il réaffirme la priorité à l'intervention face aux auteurs de violences (plus grande mobilité des forces) mais renforce également les conditions de la légitimité de l'action de l'État et les garanties du libre exercice du droit de manifester en dynamisant et modernisant les actions de communication et de prévention des tensions. Cette nouvelle doctrine porte en particulier les évolutions suivantes : le développement de l'information des organisateurs et des manifestants ; la reconnaissance de la place particulière des journalistes au sein des manifestations ; une plus grande transparence dans l'action des forces de l'ordre ; une modernisation des sommations ; des moyens de dialogue avec le public renouvelés, y compris en s'appuyant sur les réseaux sociaux ; un cadrage des techniques d'encerclement ; une intégration plus formelle du dispositif judiciaire, sous l'autorité du Parquet ; la confirmation de l'intérêt de l'emploi des moyens et armes de force intermédiaire, tout en adaptant leur emploi. Plus spécifiquement sur les phénomènes radicaux violents le ministère de l'Intérieur poursuit l'adaptation des dispositifs de MO, dans l'esprit du SNMO, en mettant en œuvre, avant, pendant et après les manifestations, les mesures suivantes : - en amont des manifestations, il s'agit de renforcer le travail des services de renseignements pour mieux détecter les individus les plus violents et prévenir au maximum la constitution d'un black bloc. Dans cette phase amont, il s'agit également de mieux sécuriser les parcours de manifestation en lien avec les municipalités aux fins de retirer tous les objets pouvant servir d'armes ou de projectiles. En application de l'article 78-2 et suivant du CPP des réquisitions sont sollicitées à chaque fois qu'un risque de troubles à l'ordre public est identifié. Ces réquisitions permettent, le jour de la manifestation des contrôles renforcés dans certains périmètres notamment dans les transports permettant l'accès au lieu de manifestation. Pendant la manifestation, si des violences devaient être commises, des interpellations ciblées dans les meilleures conditions de sécurité sont conduites par des unités spécifiquement formées. Il peut s'agir en particulier des peletons d'intervention des EGM, des SPI4G des CRS ou des BRAV de la préfecture de police de Paris. Ces opérations sont conduites avec discernement et un usage proportionné de la force en prenant en compte l'environnement notamment la présence de manifestants pacifiques ou de journalistes.  Sur la partie aval de la manifestation pour permettre la judiciarisation des auteurs de violence ou de destruction, en lien avec l'autorité judiciaire, la présence d'équipes judiciaires dédiées au traitement de ce type d'évènements a été renforcée. L'objectif étant de favoriser un traitement rapide des procédures pénales diligentées à cette occasion. La mise en œuvre de cette doctrine ferme avec les individus radicaux et violents et qui vise à garantir le droit de manifester et la liberté d'expression a produit les effets attendus notamment lors des dernières manifestations du 12 décembre 2020 et du 16 janvier 2021.

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