Question de M. BONNE Bernard (Loire - Les Républicains) publiée le 24/12/2020

M. Bernard Bonne attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le plan pollinisateurs récemment présenté ainsi que sur le projet de révision de l'arrêté « abeilles » de 2003.
Cette révision se fonde sur des recommandations de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) et vise à élargir l'interdiction des produits phytosanitaires aux fongicides et aux herbicides pendant la période de floraison ; si toutefois des dérogations étaient acceptées, les applications ne pourraient être effectuées que pendant trois heures après le coucher du soleil.
Ces dispositions, déconnectées des réalités du terrain, entraîneraient des conséquences considérables et dramatiques pour l'arboriculture et sont incompatibles avec la protection des vergers.
Elles entraîneraient tout d'abord une distorsion de concurrence avec les autres États membres de l'Union européenne ; il conviendrait à tout le moins d'harmoniser les évaluations du risque pollinisateurs.
Une telle disposition aurait un impact agronomique fort entraînant une perte certaine de production, la protection des vergers durant la période de floraison étant indispensable et le traitement devant être conduit très rapidement dès lors que la contamination est constatée.
Les restrictions horaires prévues sont par ailleurs inapplicables, ce délai étant insuffisant sachant qu'il faut au moins 35 minutes pour protéger une parcelle de 1 hectare ; cette mesure conduirait de fait à une multiplication des passages de traitements ; ces traitements de nuit entraîneraient aussi des risques pour les applicateurs ainsi que des nuisances sonores pour les riverains.
Enfin et surtout, il convient de rappeler que l'arboriculture et les pollinisateurs sont interdépendants ; la production fruitière offre un important bol alimentaire aux pollinisateurs et à l'inverse les pollinisateurs sont indispensables pour la production fruitière car cette dernière dépend à 60 % de la pollinisation en termes de tonnage du volume produit.
Aussi, et alors que cette interdépendance fait l'objet de contrats de partenariat entre apiculteurs et arboriculteurs, il demande au Gouvernement de bien vouloir réexaminer ce dossier et de revenir sur toute nouvelle mesure réglementaire stricte, déconnectées du terrain et qui conduirait à la disparition de nombreuses exploitations arboricoles.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 30/09/2021

La préservation des pollinisateurs constitue un enjeu majeur pour garantir la pollinisation nécessaire pour garantir des productions végétales diversifiées et de qualité, pour maintenir l'autonomie alimentaire nationale et pour préserver la diversité des espèces animales et végétales essentielle aux équilibres des écosystèmes. Le 28 juin 2021, une consultation du public sur un plan d'actions en faveur des pollinisateurs domestiques et sauvages a été lancée pour une durée de trois semaines. Ce plan contient un nombre important de mesures concrètes visant à enrayer le déclin des insectes pollinisateurs sauvages et les pertes de colonies d'abeilles mellifères, et ambitionne de restaurer les services agricoles et écologiques rendus par la pollinisation. Le plan d'actions prévoit également la révision de l'arrêté du 18 novembre 2003 relatif aux conditions d'utilisation des insecticides et acaricides à usage agricole en vue de protéger les abeilles et autres insectes pollinisateurs. Le projet d'arrêté est soumis à la consultation du public de manière concomitante au projet de plan d'actions. Il est par ailleurs notifié à la Commission européenne au titre de la directive (UE) 2015/1535 relative aux règles techniques. Cette nouvelle réglementation vise à renforcer la protection des pollinisateurs lors de l'utilisation de produits phytopharmaceutiques en privilégiant les périodes d'absence des abeilles sans imposer aux agriculteurs de travailler de nuit. Elle s'appuie sur deux avis de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (voir sur le site de l'ANSES : https://anses.fr/fr/system/files/PHYTO2018SA0147.pdf et https://anses.fr/fr/system/files/PHYTO2019SA0097.pdf) et sur les travaux d'un groupe de travail associant différentes parties prenantes (représentants des filières agricoles et apicoles, instituts techniques et scientifiques, associations de défense de l'environnement et administrations) qui a été réuni à plusieurs reprises en 2019, 2020 et 2021. Le nouvel arrêté prévoit des conditions d'utilisation des produits phytopharmaceutiques plus protectrices pour les pollimisateurs, notamment en étendant à toutes les familles chimiques de l'obligation d'évaluer spécifiquement les risques pour les pollinisateurs en cas d'application en période de floraison, aussi bien pour les produits actuellement autorisés que pour les nouvelles autorisations, et en encadrant l'application des produits lorsqu'elle est autorisée en période de floraison. En parallèle, la France suit très attentivement les travaux engagés au niveau européen pour réviser le document guide de 2013 de l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) pour l'évaluation des risques pour les abeilles liés aux produits phytopharmaceutiques (voir sur le site de l'EFSA : https://www.efsa.europa.eu/fr/efsajournal/pub/3295). Lors de la réunion des ministres européens de l'agriculture du 28 juin 2021, les États membres se sont accordés pour fixer un nouvel objectif de protection des abeilles correspondant à une diminution maximale de 10 % de la taille des colonies suite à un traitement phytopharmaceutique, ce qui correspond à une division par plus de deux du seuil actuel. Sur cette base, l'EFSA va finaliser la révision du document guide, qui sera soumis à la consultation du public à l'automne. Son entrée en application est prévue en 2023, ce qui permettra une évaluation des risques plus complète qu'à l'heure actuelle, non seulement pour les abeilles domestiques mais également pour les bourdons et les abeilles sauvages. 

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