Question de M. BRISSON Max (Pyrénées-Atlantiques - Les Républicains) publiée le 21/01/2021

M. Max Brisson appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'intérêt de la vaccination afin d'empêcher de nouvelles vagues d'influenza aviaire sur les élevages de canards et d'oies.

Cette vaccination est essentielle afin d'assurer durablement le maintien d'une production avicole d'excellence dans les départements du sud-ouest de la France. En effet, depuis plusieurs semaines, les Landes, les Hautes-Pyrénées et les Pyrénées-Atlantiques subissent une nouvelle épidémie d'influenza aviaire hautement pathogène. Celle-ci intervient après celle de 2017 et alors que l'ensemble des professionnels ont entrepris d'importants investissements de bio-sécurité lesquels se traduisent par un lourd endettement pour de nombreuses entreprises du secteur. Ces dernières sont dorénavant dans l'impossibilité d'investir de nouveau pour se conformer à d'éventuelles nouvelles règles de bio-sécurité qui pourraient leur être imposées.

Conséquence du dépeuplement intensif, elles s'apprêtent de plus à subir une absence totale d'activité jusqu'à l'été 2021 renforçant la fragilité financière de nombreuses structures et pouvant conduire l'aval de la filière à rechercher d'autres produits à transformer.

C'est la raison pour laquelle les opérations d'abattage actuellement prescrites par les autorités sanitaires, identiques à celles décidées voilà trois ans, désespèrent les éleveurs dont certains risques de basculer dans la précarité. Ils ont le sentiment de l'inutilité des efforts jusque là consentis puisque les mêmes actions sont reproduites comme si toutes les mesures préventives étaient finalement inopérantes.

Face à cette situation beaucoup de producteurs s'interrogent sur l'interdiction qui leur est faite, afin de prémunir leurs élevages contre le H5N8, de recourir au vaccin actuellement produit en France et utilisé dans plusieurs pays du pourtour méditerranéen mais interdit dans notre pays.

Cette politique de non-vaccination met en grande difficulté une filière qui contribue à l'image de la France comme pays de la gastronomie et qui s'inscrit dans une logique de circuits courts à l'origine d'un secteur économique de production- transformation-commercialisation de première importance pour les départements des pays de l'Adour.

Aussi, compte tenu des conséquences économiques et sociales des vagues successives d'épidémies du H5N8, il l'interroge sur la possibilité d'autoriser, en fonction des situations, des campagnes de vaccination préventive lorsque les alertes de l'influenza aviaire auront été détectées sur des couloirs de migrations d'oiseaux sauvages.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 10/02/2021

Réponse apportée en séance publique le 09/02/2021

Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, auteur de la question n° 1465, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Max Brisson. Monsieur le ministre, comme vous le savez, les éleveurs du Sud-Ouest affrontent une vague d'influenza aviaire hautement pathogène. Ils se trouvent une nouvelle fois confrontés à des mesures d'abattage massives et préventives.

Ils avaient pourtant entrepris depuis 2017 de lourds investissements de biosécurité, au prix d'un sévère endettement de leurs entreprises.

Au 1er février, 409 foyers d'influenza aviaire étaient recensés dans le Sud-Ouest ; 2 millions de canards ont été abattus de manière préventive. Nos éleveurs vivent un drame ! Monsieur le ministre, que leur proposez-vous ?

Certes, vous avez montré une réelle réactivité en matière d'indemnisations. Mais au-delà, pourquoi ne pas avoir travaillé à une modulation des abattages pour tenir compte de la diversité des formes d'élevages ?

Ces éleveurs craignent de devoir à nouveau consentir des investissements importants au titre de la biosécurité, ce qui rime avec plus d'endettement : que leur répondez-vous ? Ils craignent de ne plus pouvoir pratiquer demain l'élevage en plein air et de devoir appliquer la claustration : que leur garantissez-vous ?

Quand la crise sera derrière nous, il faudra aborder les sujets de la densité et de la circulation des élevages. Ne devrons-nous pas aussi, comme l'affirmait le professeur Jean-Luc Guérin au journal Sud Ouest, lever le tabou autour de la vaccination aviaire ?

Évidemment, nous ne faisons pas fi de la question de l'exportation. Monsieur le ministre, soyons clairs : je ne vous demande pas d'autoriser des campagnes de vaccination systématiques, mais de les permettre préventivement, dès que les signes de l'influenza aviaire seront détectés sur les couloirs de migrations.

Je renouvelle donc ma demande : envisagez-vous, pour l'avenir, dans le cadre de protocoles stricts, de recourir à des campagnes de vaccination préventive afin de protéger notre filière avicole de futures vagues d'influenza aviaire ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur Brisson, je voudrais d'abord, une nouvelle fois, rappeler que nous sommes – vous et nous – aux côtés de nos éleveurs qui subissent de nouveau une terrible épreuve. Vous l'avez dit : plus de 2 millions de palmipèdes ont dû être abattus pour limiter la propagation du virus de l'influenza aviaire. Rappelons que, si la forme d'influenza aujourd'hui présente sur notre territoire n'est pas transmissible à l'homme, elle est très fortement contagieuse entre les différentes espèces de palmipèdes et certaines volailles du genre Gallus.

Face à cela, trois réponses sont nécessaires. Premièrement, il faut continuer d'éteindre l'incendie ; c'est le but des abattages préventifs et de toutes les autres mesures sanitaires que nous prenons. Je voudrais à cet égard rendre hommage aux actions collectives des services de l'État, de la profession – le Comité interprofessionnel des palmipèdes à foie gras (Cifog) mène un travail énorme avec nous –, des vétérinaires et de toutes celles et tous ceux qui accompagnent les éleveurs.

Deuxièmement, il faut accompagner financièrement les éleveurs, en indemnisant les mesures d'abattage ou, comme on dit, « de dépeuplement », mais aussi, dans un deuxième temps, les pertes d'exploitations très importantes qu'ils subissent en conséquence.

Troisièmement, il faut envisager la suite ; c'est le sens de votre question. On s'y prendra avec méthode, en réunissant toutes les parties prenantes. On sait bien qu'il y a des points importants à régler.

D'abord, ce n'est pas, selon moi, une question de modèle. Je crois beaucoup à l'élevage en plein air ; je pense, comme vous, que ce qui importe est plutôt la rapidité de la réponse quand le virus arrive. À ce titre, les dérogations offertes pour laisser les canards en plein air posent plus question que le modèle même.

Ensuite, j'estime qu'il ne doit pas y avoir de sujet tabou. Le vaccin, notamment, ne doit pas être tabou. En revanche, cette approche comporte des difficultés. Rappelons avant tout qu'il n'y a pas de vaccin homologué à ce jour ! L'homologation se fait d'ailleurs à l'échelle européenne. Par ailleurs, les services sanitaires et vétérinaires européens ne sont pas très favorables aux vaccins, car ils craignent les migrations de palmipèdes porteurs sains du virus ; on peut entendre cet argument, d'un point de vue vétérinaire. Enfin, certains pays n'acceptent pas l'importation de volailles vaccinées.

Il faut prendre tout cela en compte, mais cela ne doit pas nous empêcher d'ouvrir la réflexion. Je m'engage évidemment devant vous à traiter tous les sujets qui seront sur la table.

Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.

M. Max Brisson. Merci de cette réponse circonstanciée, monsieur le ministre. Nous avons de nombreux points d'accord. Je crois en effet qu'il faut travailler sur la génétique et les souches résistantes, poser la question des densités et des circulations. Tous ces chantiers sont devant nous. En 2017, un protocole avait été signé ; il convient certainement de le repenser et de le retravailler au vu de cette troisième vague d'influenza aviaire, encore plus pathogène que les précédentes.

Quant à la vaccination, monsieur le ministre, vous dites qu'il n'y a pas de sujet tabou. Alors, ouvrez ce chantier ! Je crois d'ailleurs que M. le Premier ministre l'a annoncé à Mont-de-Marsan. Je ne vous demande pas une vaccination systématique, mais une vaccination d'alerte sur les couloirs de migration lorsque des foyers d'influenza aviaire sont révélés. Je crois que nous pouvons arriver à un accord ; la profession, sous toutes ses formes, y est prête aujourd'hui.

M. Julien Denormandie, ministre. Elle commence à bouger !

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