Question de Mme DOINEAU Élisabeth (Mayenne - UC) publiée le 25/02/2021

Mme Élisabeth Doineau attire l'attention de Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques sur la participation des employeurs territoriaux à la prévoyance.

Dans le cadre de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, une ordonnance relative à la protection sociale complémentaire des agents publics devrait être présentée au conseil des ministres. À travers le principe d'une participation obligatoire et progressive des employeurs publics au financement de la complémentaire santé de leurs agents, le projet actuel d'ordonnance marque une avancée pour la protection des agents territoriaux qui, comme les données publiques l'attestent, connaissent une dégradation progressive de leur état de santé depuis plusieurs années.

Cependant, cette réforme ne saurait être efficace auprès des agents territoriaux sans intégrer la question de la prévoyance. En effet, en cas d'arrêt long, un agent territorial sur deux n'est pas couvert en prévoyance. Cela signifie qu'après trois mois d'arrêt maladie, il ne percevra plus que 50 % de son traitement. Cela entraîne aujourd'hui des situations de grande précarité, étant donné que 75 % des agents territoriaux sont issus de la catégorie C et disposent donc de salaires peu élevés.

Au final, une partie des agents territoriaux en arrêt long renonce à cotiser à leur complémentaire santé, quand bien même leur collectivité la finance déjà à 50 %.

Pour éviter qu'une partie des agents ne soient pas en mesure de souscrire à une complémentaire santé, il est donc indispensable que le dispositif mis en œuvre par le Gouvernement permette une amélioration sensible de la protection des agents sur le risque prévoyance. Pour ce faire, la participation des employeurs en prévoyance devrait être au même niveau que celle en santé dès 2022. Ceci est d'autant plus important que le risque en prévoyance est encore plus sensible au phénomène d'antisélection. Cette mesure permettrait par ailleurs une meilleure mutualisation du risque sur un socle minimal de garanties incapacité-invalidité dont les bases doivent être définies.

Aussi, elle lui demande les mesures qu'elle compte mettre en oeuvre afin de prévenir le phénomène de précarisation des agents territoriaux lié aux arrêts longs.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance - Comptes publics publiée le 04/06/2021

Réponse apportée en séance publique le 03/06/2021

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, auteure de la question n° 1541, adressée à Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques.

Mme Élisabeth Doineau. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur la participation des employeurs territoriaux à la prévoyance. Dans le cadre de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, une ordonnance relative à la protection sociale complémentaire des agents publics devrait être présentée au conseil des ministres.

Au travers du principe d'une participation obligatoire et progressive des employeurs publics au financement de la complémentaire de santé de leurs agents, le projet d'ordonnance actuel marque une avancée pour la protection des agents territoriaux, qui, comme les données publiques l'attestent, connaissent une dégradation progressive de leur état de santé depuis plusieurs années.

Cependant, cette réforme ne saurait être efficace auprès des agents territoriaux sans intégrer la question de la prévoyance. En effet, en cas d'arrêt long, un agent territorial sur deux n'est pas couvert en prévoyance. Cela signifie qu'après trois mois d'arrêt maladie, il ne percevra plus que 50 % de son traitement. Cela entraîne aujourd'hui des situations de grande précarité, étant donné que 75 % des agents territoriaux sont issus de la catégorie C et disposent donc de salaires très peu élevés.

Finalement, une partie des agents territoriaux en arrêt long renonce à cotiser à leur complémentaire santé, quand bien même leur collectivité la finance déjà à 50 %.

Pour éviter qu'une partie des agents ne soit pas en mesure de souscrire une complémentaire de santé, il est donc indispensable que le dispositif mis en œuvre par le Gouvernement permette une amélioration sensible de la protection des agents sur le risque prévoyance. Pour ce faire, la participation des employeurs en prévoyance devrait être au même niveau que celle qui concerne la santé, dès 2022.

C'est d'autant plus important que le risque en prévoyance est encore plus sensible au phénomène d'anti-sélection. Cette mesure permettrait par ailleurs une meilleure mutualisation du risque sur un socle minimal de garanties incapacité-invalidité, dont les bases doivent être définies.

Aussi, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre, monsieur le ministre, afin de prévenir le phénomène de précarisation des agents territoriaux lié aux arrêts longs ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Madame la sénatrice Doineau, la protection sociale complémentaire des agents publics est un sujet majeur.

J'ai eu l'honneur de porter devant vous la loi de transformation de la fonction publique, et je connais, en tant qu'ancien maire, les disparités de protection entre les agents, notamment les plus précaires, en matière de santé et de prévoyance.

La loi du 6 août 2019 prévoit une habilitation à légiférer par ordonnance sur le sujet. Depuis lors, Amélie de Montchalin, ma collègue chargée de la fonction publique, a mené toutes les concertations nécessaires.

Je tiens à signaler, pour ce qui concerne la fonction publique territoriale, que les associations représentant les employeurs territoriaux réunies autour de Philippe Laurent dans le comité de liaison des employeurs territoriaux se sont unanimement accordées sur leur intérêt pour ce sujet et sur leur volonté de participer au financement de la protection sociale complémentaire des agents publics.

Les situations sont disparates : certaines collectivités la financent déjà à hauteur de 50 %, d'autres ont des contrats collectifs, d'autres encore ne font rien. La situation au sein des administrations de l'État est tout aussi disparate.

Une ordonnance du 17 février dernier fixe l'obligation de financement de la protection sociale complémentaire. Concrètement, après une montée en charge progressive commençant en 2022, tous les agents publics bénéficieront en 2026 d'une prise en charge par leur employeur de 50 % du coût de la complémentaire de santé.

Le choix a été fait, à l'issue des concertations, de commencer par le chantier, passez-moi l'expression, de la complémentaire de santé. Celui de la complémentaire prévoyance devra aussi être abordé. Toutefois, les organisations syndicales et les représentants des employeurs publics ont choisi de différer la mise en œuvre de ces deux aspects.

L'amélioration de la couverture santé est de nature à limiter les risques et à participer à une forme de prévention, mais elle ne ferme pas ce sujet majeur de la prévoyance que vous avez évoqué.

Il faut préciser que cette réforme représentera, pour l'ensemble des employeurs publics, un coût de 500 millions d'euros en 2022, pour atteindre 1 milliard d'euros en 2024, au rythme de la montée en charge du dispositif d'accompagnement.

Nous aurons l'occasion, dans les mois et les années à venir, d'ouvrir le chantier de la prévoyance. Pour les raisons indiquées, le choix a été fait de séquencer les chantiers, mais aussi, par cette ordonnance, de rétablir une forme d'égalité : une égalité de droits pour les agents publics de bénéficier d'une participation de l'employeur à hauteur de 50 % ; une égalité de devoirs pour les employeurs publics, puisque, sur ce sujet comme sur d'autres – je pense à la prime de précarité pour les contrats courts –, les employeurs publics, dans leur collégialité, s'étaient exonérés des obligations pesant sur les employeurs privés. Ainsi, l'équité est rétablie.

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour la réplique.

Mme Élisabeth Doineau. Je remercie M. le ministre, qui a beaucoup travaillé sur le sujet. Je serai très attentive à l'équité qui est nécessaire pour les complémentaires de santé comme pour la prévoyance des agents territoriaux.

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