Question de M. BONNECARRÈRE Philippe (Tarn - UC) publiée le 04/03/2021

M. Philippe Bonnecarrère attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les conséquences de l'application du nutriscore sur les fromages à l'exemple du fromage de Roquefort ou du Pérail de brebis.

Ces fromages sont composés de lait de brebis et d'un peu de sel pour les conserver.

Il s'avère que cette composition est suffisante pour que tous les fromages fermiers et toute la gamme de fromages au lait de chèvre, vache et brebis soient pénalisés dans ce classement.

La quasi-totalité des fromages se classent en catégorie D et E (90 %) ce qui serait signe d'une mauvaise composition avec une couleur orange-rouge perçue comme « à éviter » pour le consommateur. Or, le calcul du nutriscore se fait sur une portion de 100 g d'aliment, alors que la quantité moyenne réellement consommée des fromages se situe autour d'une portion de 30 grammes.

Par extension d'usage, un classement en catégorie E pourrait avoir un impact très important dans le futur : interdiction de faire passer des messages publicitaires à la télévision aux heures de grande écoute en famille, volonté d'éviter ces produits dans le circuit de la restauration collective qui teste actuellement le nutriscore, ou encore réduction de l'accès à la promotion en grandes surfaces.

Les conséquences d'une application du nutriscore au fromage auraient de surcroît un impact extrêmement nocif pour les producteurs de lait, pour les fromageries et plus généralement pour toute la filière élevage.

Aussi, il lui demande si la solution ne serait pas une exception pour les produits d'appellation d'origine protégée (AOP) et d'indication géographique protégée (IGP), comme l'a mise en place l'Italie ou encore l'Espagne pour son huile d'olive, de façon à préserver les fromages de cette notation très pénalisante et à travers eux notre patrimoine national.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 01/07/2021

Le Nutri-score est le dispositif que les pouvoirs publics français ont choisi de recommander à l'issue d'une démarche scientifique, innovante, inclusive et fondée sur le dialogue avec les parties prenantes. Ce logo fournit au consommateur, sur la face visible des emballages alimentaires, une information lisible et facilement compréhensible sur la qualité nutritionnelle globale des produits, au moment où il fait ses courses. Il peut ainsi comparer les produits et orienter ses choix vers des aliments de meilleure qualité nutritionnelle. Fondée par l'arrêté du 31 octobre 2017, la démarche d'engagement en faveur du Nutri-score est volontaire, en conformité avec le droit européen. Le Nutri-score est largement déployé par les professionnels de l'alimentation et plébiscité par les Français. En juillet 2020, 415 entreprises étaient engagées dans la démarche Nutri-score en France, dont les parts de marché représentent environ 50 % des volumes de vente. Désormais, ce sont près de 500 entreprises qui se sont engagées en faveur du logo. De même, près de 94 % des Français ont déclaré être favorables à sa présence sur les emballages. Enfin, plus d'un Français sur deux déclare avoir changé au moins une habitude d'achat grâce au Nutri-score. De nombreux travaux scientifiques ont permis de montrer que le Nutri-score était un outil efficace pour différencier la qualité nutritionnelle des denrées alimentaires, de manière cohérente avec les recommandations alimentaires, en France mais également dans de nombreux pays européens. Le Nutri-score et les signes de l'origine et de la qualité (SIQO) répondent à des objectifs différents. Les SIQO constituent une « garantie » pour les consommateurs en termes de qualité, de savoir-faire, de protection de l'environnement, d'origine et de terroir, quand le Nutri-score informe le consommateur sur la qualité nutritionnelle des produits transformés, et permet de comparer les produits entre eux. Les fromages font déjà l'objet d'une adaptation dans le calcul du Nutri-score, pour prendre en compte leur teneur élevée en calcium. Si les fromages sont classés pour la majorité en D et parfois en E, ceci s'explique par le fait qu'ils contiennent des quantités non négligeables de graisses saturées et de sel et sont également caloriques. Mais, comme tous les produits classés D ou E avec le Nutri-score, les fromages peuvent parfaitement être consommés dans le cadre d'une alimentation équilibrée. Informer les consommateurs sur la réalité de la qualité nutritionnelle de ces aliments n'exclut pas de les consommer mais en quantités et/ou fréquences conformes aux recommandations nutritionnelles du programme national nutrition santé (deux produits laitiers par jour pour les adultes, trois produits laitiers pour les enfants), ce qui est totalement en cohérence avec la signification de leur classement sur l'échelle du Nutri-score. Des évolutions du mode de calcul du Nutri-score sont néamoins possibles ainsi, sept pays sont désormais engagés en faveur du Nutri-score : la France, la Belgique, l'Espagne, l'Allemagne, les Pays-Bas, le Luxembourg et la Suisse. Une gouvernance a été mise en place entre ces pays, comprenant notamment un comité scientifique. Ce comité, composé d'experts scientifiques indépendants, s'est réuni pour la première fois le 12 février 2021 et aura pour mission d'évaluer la pertinence scientifique des propositions d'évolution du mode de calcul du Nutri-score. La France soutiendra des évolutions dans ce cadre. La Commission européenne prévoit par ailleurs, dans sa stratégie « de la ferme à l'assiette », publiée en mai 2020, une proposition législative d'étiquetage nutritionnel en face avant, harmonisé et obligatoire, pour le 4e trimestre 2022. Dans ce cadre, le Gouvernement souhaite que le Nutri-score soit le dispositif retenu. Enfin consciente que le système doit prendre en compte des spécificités liées aux produits comme les fromages, la France portera des propositions dans un cadre européen afin que l'algorithme du Nutri-score et les critères utilisés tiennent compte de ces spécificités.

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