Question de Mme LOISIER Anne-Catherine (Côte-d'Or - UC-R) publiée le 15/04/2021

Mme Anne-Catherine Loisier attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur les difficultés d'accès aux traitements innovants pour les patientes souffrant de cancers du sein, résistant à des chimiothérapies classiques.

Parmi les différents types de cancer du sein, le cancer du sein triple négatif (TN) est l'une des formes les plus agressives.

Chaque année, il touche plus de 10 000 femmes, souvent jeunes et sans antécédent. Lorsque les premières métastases sont décelées, leur espérance de vie ne dépasse pas 15 mois.

Aucune chimiothérapie classique ne permet aujourd'hui de traiter efficacement ces patientes dont la plupart terminent leur parcours en soins palliatifs, faute d'alternative thérapeutique.

Aujourd'hui, des cliniques privées allemandes redonnent espoir à ces patientes en proposant un traitement révolutionnaire au prix de 100 000 euros et non remboursé par la sécurité sociale. Il repose sur un vaccin conçu spécialement à partir de leurs propres cellules, couplé à une thérapie ciblée.

Si cette option ne fait pas l'unanimité en France, il n'empêche que les inégalités d'accès à des traitements novateurs ne peuvent demeurer plus longtemps.

Un autre médicament, aux effets prouvés sur le cancer triple négatif métastatique, vient d'arriver dans notre pays. Le Trodelvy, issu d'un laboratoire américain, est délivré dans le cadre d'une autorisation temporaire d'utilisation (ATU) nominative (au cas par cas), à la demande du médecin prescripteur. Mais les difficultés d'approvisionnement limitent aujourd'hui la prescription pour de nombreuses patientes qui pourraient bénéficier de ce traitement de la dernière chance.

Dans ce contexte, il y a urgence à débloquer cette situation pour que l'ATU soit élargie à l'ensemble des patientes pour qui le temps est compté.

Plus généralement, elle lui demande ce qu'il envisage pour rendre accessibles les nouvelles thérapies du cancer du sein en France.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles publiée le 07/05/2021

Réponse apportée en séance publique le 06/05/2021

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, auteure de la question n° 1634, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

Mme Anne-Catherine Loisier. Monsieur le secrétaire d'État, j'attire votre attention sur les difficultés d'accès aux traitements innovants pour les patientes souffrant de cancers du sein résistant aux chimiothérapies classiques.

Le « triple négatif » est l'une des formes les plus agressives de cancer du sein. Il touche chaque année plus de 10 000 femmes, souvent jeunes et sans antécédents. Lorsque les premières métastases sont décelées, leur espérance de vie ne dépasse pas quinze mois.

Jusqu'à présent, aucune chimiothérapie classique ne permet un traitement efficace : la plupart de ces patientes terminent leur parcours en soins palliatifs faute d'autre solution thérapeutique. Aujourd'hui, des cliniques privées allemandes leur redonnent espoir, mais le traitement qu'elles proposent coûte plus de 100 000 euros et il n'est pas remboursé par la sécurité sociale. Il repose sur un vaccin conçu individuellement, à partir des cellules des malades, couplé à une thérapie ciblée. À ma connaissance, cette option n'a pas été agréée en France, mais elle soulève le problème de l'inégalité d'accès à des traitements novateurs.

Un autre médicament existe. Ses effets sur le cancer triple négatif métastatique sont confirmés et il vient d'arriver en France. Il s'agit du Trodelvy, issu d'un laboratoire américain et délivré dans le cadre d'une autorisation temporaire d'utilisation (ATU) nominative, donc au cas par cas, à la demande du médecin prescripteur.

Malheureusement, ce médicament connaît des difficultés d'approvisionnement, qui limitent aujourd'hui sa prescription. Or, pour de nombreuses patientes, il représente une dernière chance.

Qu'envisagez-vous pour rendre accessibles ces nouvelles thérapies du cancer du sein en France et élargir l'ATU à l'ensemble des patientes pour qui le temps est compté ?

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles. Madame la sénatrice Anne-Catherine Loisier, avant tout, soyez convaincue que l'ensemble du Gouvernement, à commencer par le ministre des solidarités et de la santé, éprouve la préoccupation que vous exprimez. Moi-même, j'ai été récemment saisi de ce dossier et je souhaite, comme vous, assurer les meilleurs traitements pour le cancer du sein dit « triple négatif ».

Vous l'avez rappelé : ces cancers touchent environ 10 000 personnes par an et sont difficiles à traiter par chimiothérapie ou par hormonothérapie. Ils nécessitent donc des réponses innovantes.

Vous formulez deux propositions : élargir l'accès à l'ATU pour le Trodelvy et permettre l'accès à des immunothérapies ciblées de façon précoce.

Le dispositif d'ATU est en cours de réforme, en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021. Actuellement soumis à la concertation, les textes devraient être publiés d'ici à l'été.

J'en viens plus spécifiquement au Trodelvy, traitement de la biotech Immunomedics. Je rappelle qu'il est disponible depuis novembre dernier, via une ATU nominative : comme vous l'indiquez, le médecin doit valider et proposer le traitement pour un patient identifié.

À la fin de l'année 2020, à la suite du rachat d'Immunomedics par Gilead, la production de cette spécialité est devenue temporairement insuffisante pour couvrir les besoins globaux : vous l'avez également évoqué. Le laboratoire Gilead a donc informé l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) qu'il ne pouvait plus fournir d'ATU nominative en France et qu'il réservait sa production aux patientes résidant aux États-Unis, jusqu'à ce que ses capacités de production soient suffisantes pour permettre de nouveau un accès en France.

L'ANSM a dû prendre la décision de réserver les unités disponibles aux patientes qui en bénéficient déjà, afin de ne pas provoquer de rupture de traitement.

Le laboratoire Gilead a déposé une demande d'autorisation de mise sur le marché (AMM) en procédure accélérée auprès de l'Agence européenne du médicament le 4 mars dernier. Le dossier est en cours d'évaluation. En réponse à un courrier signé par Olivier Véran, le laboratoire a assuré mettre tout en œuvre pour augmenter la capacité de production du Trodelvy en vue d'une mise à disposition précoce du produit dans notre pays. C'est indispensable pour éviter aux patientes une perte de chance.

Pour conclure, je vous répondrai brièvement au sujet de l'accès à des immunothérapies ciblées dans des cliniques allemandes. Un certain nombre de praticiens ont souligné les difficultés éthiques que soulèvent de telles pratiques, aux coûts particulièrement élevés. La France est attachée au principe d'évaluation de l'efficacité et de la sécurité des traitements. L'objectif de la réforme des ATU est bien d'inciter les laboratoires à permettre l'accès aux traitements innovants efficaces le plus rapidement possible, sans faire courir de risques trop élevés aux patients.

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour la réplique.

Mme Anne-Catherine Loisier. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Vous l'avez compris : il est urgent d'agir. Aujourd'hui, un certain nombre de patientes sont dans une situation désespérée. Je vous remercie par avance de bien vouloir hâter la marche de l'administration !

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